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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome I.djvu/71

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Abal est d'ailleurs probablement fautive : on ne la rencontre nulle part dans l’Ancien Testament, et saint Jérôme, qui a cité cette addition des Septante dans son Prologue de Daniel, t. xxv, col. 492, écrit, non pas Abal, mais « Abda », nom véritablement hébreu. Voir Abda.

ABANA (hébreu: Ἀbânâh; Septante: Ἀϐανά), fleuve de Damas. On lit Amanah dans le qeri et même dans le ketib d’un certain nombre de manuscrits (cf. B. Kennicott, Vet. Testam. heb., Oxford, 1776, t. i, p. 651, et J. B. de Rossi, Var. Lect. Vet. Test., Parme, 1785, t. ii, p. 230), dans le Targum de Jonathan et dans la version syriaque; variante qui s’explique facilement par la confusion ou la permutation entre le beth, ב, et e mem, ס. Les Septante et la Vulgate portent Abana, et cet accord suffit, selon quelques auteurs, pour donner la préférence à cette leçon.


2. — Le Barada (ancien Abana), a Damas. D'après une photographie.


L’Abana n’est mentionné qu'une fois dans la Sainte Écriture, à propos de Naaman le lépreux, IV Reg., v, 12. Ce général des armées syriennes vient de Damas demander sa guérison au prophète Élisée, qui lui recommande alors d’aller se laver sept fois de suite dans les eaux du Jourdain. Mais l’officier, tout infatué de l’abondance et de la qualité des eaux de son pays, répond avec mécontentement et dédain : « Est-ce que l’Abana et le Pharphar, fleuves de Damas, ne sont pas meilleurs que toutes les eaux d'Israël, pour que je m’y lave et sois purifié? »

Deux rivières importantes arrosent le pays de Damas : le Barada et l’Aouadj; et un regard jeté sur la carte mène facilement à cette conclusion, que ce sont là les deux fleuves (neharôt) cités par Naaman. Or il semble naturel que le plus considérable et le plus familier à un habitant de la ville soit mentionné le premier. De nos jours, dit J. L. Porter, un indigène, s’adressant à un étranger, ne mettra jamais le Nahr el-Aouadj avant le Barada, qui fait la prospérité et la gloire de la grande cité. Five years in Damascus, Londres, 1855, t. i, p. 276. De plus, la leçon Amana nous reporte naturellement au mont Amana, dont parle le Cantique des cantiques, iv, 8, et dont, suivant plusieurs critiques, le nom est donné ou emprunté à la rivière qui y prend sa source. Ct. Polus, Synopsis Crit. sac., in Cant. IV, 8 ; Gesenius, Thesaurus ling. heb., au mot Ἀmanah. Or le même passage distingue nettement l’Amana de l’Hermon, qui donne naissance à l’Aouadj , tandis que l'autre fleuve sort, bien plus au nord, des montagnes de l’Anti-Liban. Il faut donc distinguer aussi l’Aouadj de l’Abana, qui s’identifie facilement avec le Barada; identification confirmée du reste par la version arabe, qui se trouve dans la Polyglotte de Walton, et qu'on fait généralement remonter au Xe ou au XIe siècle : elle traduit l'hébreu Abana par Barda, qu'Etienne de Byzance appelle dès le Ve siècle Bardinès.

Δαμασκός…, περὶ τὸν Βάρδινην ποταμόν.
Damas…, près du fleuve Bardinès.

L'Abana est donc bien, croyons-nous, le Barada (en arabe: le froid, le glacé), le χρυσοῤρδας, « fleuve d'or » des Grecs, ainsi appelé, non parce que ses eaux roulent effectivement des paillettes d'or, mais parce que de tout temps, à l'époque de Strabon et de Pline aussi bien qu'aujourd'hui, elles ont répandu sur leur passage la fertilité et les richesses.

Le Barada forme la branche orientale de cette croix qui, dans l'hydrographie syrienne, a pour tronc l'Oronte au nord, le Jourdain au sud, et pour branche occidentale le Leitani. Cf. Élisée Reclus, Asie antérieure, Paris, 1884, p. 719. Il prend sa source sur une haute crête de l'Anti-Liban, le Djébel-Zebdâni, à une altitude de 1 066 mètres