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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/142

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sage où cette traduction devait créer une équivoque par laquelle tous les chrétiens auraient été trompés jusqu’aujourd’hui.

Les défenseurs de la tradition locale, parmi lesquels se trouve Victor Guérin, présentent en sa faveur, entre autres, les arguments suivants : 1° La conjecture de Reland est une possibilité sans aucune preuve positive ; les témoignages historiques positifs lui sont tous contraires ; les variantes des manuscrits ont Judxx et Judse, une fois David. Cf. Tischendorf, Novum Testamentum grsece, -edit. 8° critica major, t. i, p. 419. — 2° Les faits du récit de saint Luc devant se concentrer dans l’enceinte de la maison de Zacharie, on ne voit pas quelles raisons devaient l’obliger à nommer Ja ville ; plusieurs faits et mi 77. — Église de la Nativité de saint Jean-Baptiste, h. Aïn-Kârem. D’après une photographie.

racles sont racontés en son Évangile sans que le lieu en soit marqué. Cf. v, 12 ; vii, 37 ; viii, 41 et suiv. ; ix, 28, 52 ; x, 38 ; xi, 1 ; xvii, 12. — 3° Saint Luc indiquant lui-même, 1, 65, la Judée comme théâtre des événements dont il parle, ne peut pas nommer Jota, qui de son temps était une ville, mon de Judée, mais d’idumée. — 4° Dans la plupart des livres de la ISible grecque, ’lo-JSa et’Io’jSaîa sont employés indifféremment pour désigner soit le royaume de Juda, soit la province de Judée ; mais jcô). : s’loùoa est, à une ou deux exceptions près, l’expression constamment usitée pour dire « une ville de Judée » ; on la trouve dans les mêmes chapitres où le mot’louS » a est employé pour désigner la Judée. Cf. II Par., xvii ; Jer., vu et xvii ; I Mach., iii, etc. ; saint Luc, pour dire « une ville de Judée », devait se servir de l’expression consacrée. — 5° La résidence de Zacharie n’implique pas nécessairement une ville sacerdotale ou lévi tique ; dés les temps les plus reculés, nous trouvons des prêtres et des lévites habitant des villes qui ne sont pas désignées, par Josué, comme villes lévitiques. Jud., xvii, 7 ; I Reg., i, 1, et I Par., vi, 57-58 ; II Esdi.,

xi, 20 ; xii, 28-29 ; I Mach., ii, 1. — 6° L’Onomasticon d’Eusèbe est une nomenclature incomplète des lieux bibliques ; VEpitaphium Pauise, une lettre rapide, non un traité, où ne sont mentionnés non plus ni le prétoire ni Gethsémani, connus cependant et vénérés des chrétiens. Les relations des autres pèlerins abondent en omissions qui ne peuvent détruire les témoignages positifs de Virgilius, de Théodosius, d’Épiphane hagiopolite, du Commenioratorium de Casis Dei et des autres. Le culte du titulaire primitif d’une église n’a jamais empêché le culte accessoire au même lieu d’autres saints et martyrs, ni l’érection ou la dédicace à ceux-ci de chapelles, d’autels, de tombeaux, d’images et d’inscriptions. — 7° Si l’on excepte l’assertion des Fragments sur la Galilée, dont l’erreur est évidente, et le chiffre incertain de la Chronique pascale, les autres contradictions ne sont qu’apparentes et s’évanouissent devant l’examen attentif du contexte fait de bonne foi. — 8° Les traditions locales de la Terre Sainte, au xiie siècle et dans les siècles précédents, étant généralement identiques aux traditions des IVe et me siècles, chacune d’elles, s’il n’est pas démontré formellement qu’elle s’est introduite postérieurement, a la même valeur et autorité : aucun document positif, formel et certain ne le démontrant pour la tradition d"Âïn-Kârem, l’arbitraire seulement peut la faire considérer comme apocryphe. — Il faut reconnaître cependant que l’absence de textes formels remontant aux premiers siècles ne permet pas de résoudre le problème avec une entière certitude.

IV. État actuel. —’Aïn-Kârem (fig. 76) est un village d’environ mille habitants, dont plus de la moitié sont musulmans. Bâti sur une colline, derrière les montagnes qui s’étendent à l’ouest de Jérusalem, il domine à gauche la belle vallée de Coloniéh, toute plantée d’oliviers et d’arbres fruitiers de toute espèce. Vers l’est du village se dresse l’église de la Nativité de saint Jean, avec son monastère carré et massif, auquel a été adjoint un hospice pour les pèlerins. L’ancienne église avait du être abandonnée après les croisades. Le patriarche de Jérusalem y venait seulement une fois l’an, à la fête de la Nativité du précurseur, célébrer les saints mystères. Elle ne tarda pas à tomber en ruines. Les musulmans y parquèrent leurs troupeaux, vendant aux chrétiens la permission d’y venir prier. Les Franciscains en achetèrent le terrain en 1579, et parvinrent à s’y établir en 1690. Ils relevèrent le sanctuaire et le couvent ; ce sont ceux que nous voyons aujourd’hui. L’église (fig. 77), assez spacieuse, est à trois nefs ; une coupole portée par quatre solides piliers la surmonte. Les divers tableaux qui la décorent représentent la vie du saint précurseur. Du côté de l’Évangile, sept degrés de marbre mènent à une grotte naturelle transformée en chapelle, dont le rocher forme la voûte. C’est sans doute la caverne dont parlent l’higoumène russe Daniel et le moine Phocas. Des bas-reliefs de marbre y rappellent de nouveau les faits de la vie de saint Jean. Au-dessous du pavé du porche de l’église est le fragment de mosaïque dont nousavons parlé. Vers l’extrémité ouest de la colline s’élève un grand et bel établissement fondé pour les orphelines par le P. Alphonse -Marie Ratisbonne, qui repose dans le cimetière de la maison. Plusieurs cavernes sépulcrales, creusées dans les flancs de la colline, attestent l’antiquité de la localité. À cinq cents pas au sud de l’église de saint Jean coule la « fontaine de Carerh », ’Aïn-Kârem ; les chrétiens la nomment fréquemment « la fontaine de la Vierge » ( fig. 78). La plate-forme de la chambre d’où elle jaillit, abritée de voûtes nouvellement relevées, auxquelles on a adjoint un minaret, est le lieu de prière des musulmans. La haute montagne du flanc de laquelle elle s’échappe a son versant nord faisant face au village, semé de jolies maisonnettes blanches émergeant du milieu de la verdure des vignes et des arbres fruitiers dont la montagne est toute couverte. Elles servent de retraite à de pieuses Russes, qui viennent y passer les dernières années de leur vie. Au milieu de ces constructions, à