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1469 DOMINICAINS (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 1470

Berger, La Bible française, p. 257) et Antoine du Four (Échard, t. ii, p. 22), dont les noms ont été aussi prononcés à l’occasion des traductions françaises de la Bible. 2° C’est le nom d’un dominicain qui est le premier attaché à la traduction catalane de l’Écriture, celui de Romeu de Sabruguera (Barthélémy de la Bruyère), maître à l’Université de Paris, en 1306, correspondant de Jacques II d’Aragon, supérieur de cette province en 1312, mort en 1313. On n’est pas autorisé à affirmer positivement que Romeu ait traduit des parties de la Bible autres que le Psautier. En revanche, cette traduction est certaine. M. S. Berger détermine ainsi le procédé de travail de l’auteur : « Le traducteur travaillait sur un texte latin, mais il avait le Psautier français, soit sous les yeux, soit dans la mémoire. » Berger, dans la Romania, t. xix (1890), p. 524-535. Voir plus haut, col. 346.

3° La première édition de la Bible en dialecte valencien a été publiée à Valence, en 1478, par les soins du dominicain Jaime Borrell. Cette traduction avait été faite à la fin du xive ou au commencement du xv » siècle, à la chartreuse de Portacæli, aux portes de Valence, par Boniface Ferrier, avec le concours d’autres personnes doctes. Boniface, frère du célèbre dominicain saint Vincent Ferrier, devint supérieur général des Chartreux dans l’obédience de Benoit XIII, pendant le grand schisme. J. Borrell a revu, corrigé et publié l’œuvre primitive. « Il semble avoir changé beaucoup de mots à son modèle, surtout dans l’intention de le rapprocher du latin. » Berger, p. 530. La bibliothèque Mazarine possède, sous le n° 1228, un exemplaire de ce rare incunable. Calai, des incun. de la bibl. Mazar., Paris, 1893, p. 684 ; S. Berger, Romania, t. xix, p. 528-530.

4° Jean Lopez, dans la seconde moitié du xve siècle, a traduit en castillan les évangiles de l’année liturgique ; la première moitié a été éditée : Los evangelios desde Aviento hasta la domenica in Passione, in-f°, Zamora, 1490. Échard, t. i, p. 826. Les Dominicains ont aussi participé aux traductions italiennes de la Bible. Sixte d^ Sienne attribue la première traduction à Jacques de Voragine, archevêque de Gènes (Bibl. Sanct., lib. iv, ad verb. Jacob, arch. Gen., edit. Neapol., t. i, p. 397). C’est vraisemblablement sur cette autorité que s’est basé Richard Simon, quand il écrit : « Je croy que la plus ancienne traduction de la Bible en italien est celle de Jacques de Voragine, archevêque de Gênes : Possevin en parle comme d’une version peu exacte ; d’autres, au contraire, l’ont estimée. » Hist. crit. du Vieux Test., Paris, 1680, p. 598. Il n’est pas invraisemblable que le grand vulgarisateur de la légende des saints ait aussi songé à une vulgarisation de l’Écriture. Sixte de Sienne, qui était un spécialiste et a longtemps vécu à Gênes, comme l’observe Échard (t. i, p. 459), a dû avoir de bonnes informations. Cette donnée concorderait avec le jugement de M. S. Berger déclarant « que l’original qu’a glosé Cavalca était très rapproché des textes usités dans le midi de la France ». Romania, t. xxiii, 1894, p. 395.

Dominique Cavalca de Pise, un des vulgarisateurs les plus féconds du commencement du XIVe siècle, a traduit ou paraphrasé les Actes des Apôtres en italien. Il est un des trois dominicains toscans qui ont écrit en langue vulgaire à la même époque et que Gino Capponi, dans sa Storia délia republ. di Firenze, 1875, t. i, p. 320, appelle i sommi autori délia età prima. Il est fort curieux que les Vaudois se soient approprié l’œuvre de Cavalca ; cela nous place assez loin de la théorie des Vaudois initiateurs des vulgarisations de la Bible. M. S. Berger observe à ce propos : « Le tableau que nous voyons est tout différent de l’image que nous nous faisions d’ordinaire de l’œuvre littéraire et religieuse des Vaudois. Un « barbet » s’appropriant sans scrupule la version d’un dominicain, n’est-ce pas une chose étrange et inattendue ? Il me semble, au contraire, que rien n’est plus vaudois que cela. Les Vaudois prenaient leur bien où ils le trouvaient ; personne

n’a jamais eu une plus grande puissance d’accommodation. » Romania, t. xxiii, p. 393. « À la considérer deprès, sa version (de Cavalca) est moins une paraphrasa qu’une glose continue. Le traducteur juxtapose sans cesse la traduction délayée au mot propre ; en effaçant simplement les mots ajoutés au texte, on obtiendrait assez facilement une version à peu près littérale. » Ibid., p. 394.

Au xve siècle, les Dominicains italiens se livrent encoreà des travaux de vulgarisation scripturaire. Marino de Venise réédite la Bible italienne en 1477, d’après la traduction du càinaldule Nicolas Malermi. Il y ajoute des rubriques qui sont des résumés des chapitres selon l’exposition de Nicolas de Lyre et d’autres docteurs : Biblia vulgare… rubricata per me Fralre Marino da Venetia dell’ordine de’Predicatori de la sacra pagina humile professore, sequendo la expositione di Nicolao de Lyra e de li altri dolori, 2 in-f°, Venise, 1477. Vers le mêmetemps, Barthélémy de Modène, inquisiteur à Ferrare, traduit en italien les Psaumes et y ajoute un commentaire dans la même langue. Échard, t. i, p. 807 ; t. ii, p. 823 ; Le Long, 1. 1, p. 354. En 1494, Frédéric de Venise traduit l’Apocalypse en langue vulgaire et y joint des commentaires : La exposition dell’Apocalipsis per volgar con le ghiose di Maistro Federigo da Veniexia del ordine de’Fratri Predicatori in mcccclxxxxiiii. L’ouvrage a été édité en 1515 et 1519, sans nom de lieu, et l’on en possède des manuscrits. Échard, t. i, p. 706 ; Propugnatore, 1880, t. i, p. 119 ; 1884, t. ii, p. 260 ; Romania, t. xxiii, p. 417.

Nous pouvons encore signaler à titre de renseignement quelques manuscrits italiens de la Bible dont l’existence confirme encore le fait que l’ordre s’est servi pour ses religieuses de la Bible vulgaire et a travaillé à en répandre la connaissance. Tel est le manuscrit de la Marciana, à Venise, cl. i, it. 2. C’est un Nouveau Testament d’écriture bolonaise du xive siècle. Il est incomplet et suivi d’un calendrier en italien, dont la présence indique la destination usuelle de l’ouvrage. « Notre manuscrit, dit M. S. Berger, a été écrit dans un couvent de Dominicains ou de Dominicaines de la province de Ravenne. Il a été donné, au xvp siècle, à la chartreuse de Venise ; mais on voit, par les notes qui sont sur ses marges, que de 1363 à 1414 il appartenait au couvent de Saint -André de Ferrare. Dans ce manuscrit, qui représente la version ordinaire, les leçons sont marquées en marge, de même que les jours où elles doivent être lues, d’une écriture du XIVe siècle. Peut-être servait-il à la lecture publique, au réfectoire de Saint-André de Ferrare. » Romania, t. xxiii, p. 415. Pareillement la Bibliothèque Nationale possède deux volumes de la Bible italienne écrite par le dominicain napolilain Nicolas de Nardo (ital. 3 et 4). Il achevait d’écrire le livre d’Ézéchiel à la fin d’octobre 1466, et l’Apocalypse, par conséquent, comme il le dit, toute la Bible, le 15 mars 1472. Échard, 1. 1, p. 837 ; G. Mazzatinti, Invent, dei mss. ital. délie bibliol. di Francia, t. i, Rome, 1836, p. i ; Romania, t. xxiii, p. 428. Il est donc manifeste que, au xve siècle surtout, la lecture de la Bible en languevulgaire s’était remarquablement développée en Italie, et que l’ordre des Frères Prêcheurs s’y était activement employé.

5° Un phénomène semblable s’observe en pays de langue allemande. Lorsqu’on connaît l’essor donné à la langue nationale par les mystiques du XIVe siècle, dont le plus grand nombre et les plus célèbres appartiennent aux Frères Prêcheurs, on ne peut pas s’étonner de voir ces derniers tenir une place exceptionnelle dans la question de la vulgarisation de la Bible en Allemagne. Cette question de la traduction de la Bible en allemand a fait, un grand pas à la suite des récents travaux du D’F. Jostes, dont nous transcrivons les résultats. Nous constatons d’abord dans les couvents des Dominicaines allemandes le même fait signalé plus haut pour les Dominicaines. d’Italie : la lecture de l’Écriture en langue vulgaire. L’ini-