Aller au contenu

Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome II.djvu/770

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

1475 DOMINICAINS (TRAVAUX DES) SUR LES SAINTES ÉCRITURES 1470

gustin Giustiniani, évêque de Nebbio en Corse, et attiré par François I er à l’Université de Paris, où le premier il enseigna pendant cinq ans la langue hébraïque. Giustiniani avait préparé la publication d’une grande polyglotte. Mais il lui fut impossible de réaliser intégralement le projet, un particulier ne pouvant couvrir les énormes dépenses nécessaires pour un semblable travail. Le Psautier seul a été publié : Psalterium hebrseum, grœcum, arabicum et chaldaicutn, cum tribus latinis in interpretationibus et glossis, in-f°, Gênes, 1516. Ce sont des octaples dont les huit colonnes sont distribuées sur une double page dans l’ordre suivant : 1° texte hébreu, 2° traduction latine de l’hébreu par l’auteur, 3° Vulgate latine, 4° grec, 5° arabe, 6° Targum ou paraphrase chaldaïque, 7° traduction latine de la précédente, 8° scholies et brèves annotations. L’ouvrage fut tiré à deux mille exemplaires, plus cinquante sur vélin. Une grande partie de l’ouvrage total était achevée, spécialement le Nouveau Testament. C. Gessner a donné un spécimen de « e dernier, copié à Rome, en 1517, dans sa Bibliotheca universalis, Zurich, 1549. La polyglotte de Giustiniani est la première en date. Non seulement son Psautier contient les versions chaldaïque et arabe, qui ne sont pas dans la polyglotte d’Alcala ; mais bien que l’impression de celle-ci ait été commencée en 1514, les exemplaires n’en ont pas été mis en distribution avant 1522, comme le remarque Tischendorf, Novum Testamentum grxce, Leipzig, 1891, t. iii, p. 205. Échard, t. ii, p. 96 ; A. Giustiniani, Annali délia republica di Genova, Gênes, 1834-1835, 2e édit, t. ii, p. 456-466. 2° L’édition et la revision du texte de la Vulgate ont été l’objet de divers travaux. Jacques de Gouda, poète et humaniste à Cologne, a publié un Correctorium Bibliæ j cum difficilium quarumdam dictionum luculenta in- } terpretatione, Cologne, 1508. Hain [Repert., 7498) donne, la date de 1500. Échard, t. ii, p. 44 ; Geiger, Joli. Reuchlin, p. 359. — Le Vénitien Albert Castellani a donné une édition corrigée de la Vulgate avec un appareil scientifique : Biblia latina cum pleno apparatu versissime et nitidissime impressa, Venise, 1506, 1519 ; Lyon, 1506. L’édition du texte est qualifiée de studiosissime revisa, correcta, emendata, et ad~ instar correctissimorum exemplarium tam antiquorum quam novorum incontracta, comparata et collata. Échard, t. ii, p. 48. — L’édition corrigée de la Vulgate latine de Jean Henten, hiéronymite en Espagne, puis dominicain à Louvain, a été une des plus célèbres du xvi" siècle ; c’est celle du moins qui a exercé le plus d’influence sur les corrections d’alors. A la suite de la suppression des Bibles réputées hétérodoxes par décret impérial, les théologiens de Louvain chargèrent Henten, qui appartenait à l’université, de préparer cette édition. L’éditeur consulta les meilleurs exemplaires et une vingtaine de manuscrits, dont les plus anciens avaient six cents et plus d’années. Elle fut publiée à Louvain, en 1547 ; puis à Anvers, 1567, 1569, 1570 ; Francfort, 1571. Elle est connue sous le nom de Bible de Louvain. Échard, t. ii, p. 196. Ungarelli déclare que « l’édition de Louvain, en général, vaut mieux et mérite plus de foi que la Bible ordinaire », c’est-à-dire celle qu’accompagne la glose dite ordinaire de Strabon. Dans les Analect. jur. pont., 1852, p. 1334. Le travail de Henten fut repris plus tard par les théologiens de Louvain, qui en développèrent l’appareil scientifique. Cette Bible fut publiée par Plantin, Anvers, 1573. Reusch, Die Selbstbiographie des Cardinale Bellarmin, in-8°, Bonn, 1887, p. 112.

Au concile de Trente, les Pères et théologiens de l’ordre de Saint -Dominique prirent une part importante aux travaux et aux décrets sur l’Écriture (février-avril 1546), comme le déclarent les légats au cardinal Farnèse. Vercellone, Dissert, acad., p. 82. Ce fut Févêque de Fano, Pierre Bertano, qui soutint la nécessité d’avoir dans l’Église un texte officiel, qui put servir de base doctrinale et faire foi. Le Plat, Monuments, Louvain, 1781, t. iii, p. 398. Ambroise Catharin mit en évidence les dif ficultés relatives à l’état dans lequel se trouvait alors la Vulgate. Theiner, Acta genuina SS. Concilii Tridentini, Zagrab, 1875, t. i, p. 49. Dominique Soto soutint que la Vulgate latine était l’œuvre de saint Jérôme ( Pallavicini, Histoire du Concile de Trente, Paris, 1864, liv. vi, ch, xvii, 5), contrairement aux doutes émis déjà par Santé Pagnino et Cajetan.

Les Dominicains prirent aussi part aux travaux qui, pendant près de quarante-cinq années (1546-1592), furent conduits à Rome, avec des vicissitudes diverses, pour aboutir à l’édition de la Vulgate de Sixte -Quint. Lorsque saint Pie V, un pape dominicain, réorganisa la.commission, en 1569, et donna une nouvelle vigueur à l’entreprise, trois des membres de la commission appartenaient à l’ordre : Sébastien Locatelli, procureur général ; Thomas Manriquez, maître du sacré palais, et maître Paolino. Sous Grégoire XIII, Pierre Chacon, dépuis cardinal, fournit une collaboration importante, ainsi que le constate Pierre Morin, un des membres les plus actifs de la commission. Ungarelli, Analecta, p. 1325. Sixte-Quint, qui publia l’édition romaine, ne tint compte que très partiellement des travaux préparatoires, et ramena de sou propre chef son édition à celle de Louvain. Ungarelli, p. 1334. Ce point de vue fut encore maintenu quand Grégoire XIV reprit le travail de correction en sous-œuvre. Le premier des canons qui réglaient la méthode de revision portait : Revoeanda esse Biblia Sixtina ad ordinarix textum, et Lovaniensem prxcipue (Ungarelli, Anal., p. 1335), de sorte que l’œuvre de Jean Henten, qui formait le fond de la Bible de Louvain, se trouva fournir l’élément essentiel dans les éditions officielles romaines de la Vulgate.

/II. TRADUCTIONS LITTÉRALES LATINES DE LA BIBLE

D’après les textes obiginaux. — Le développement de la philologie et de la critique textuelle, plus la position prise par la Réforme à l’égard de l’Écriture, motivèrent les grands travaux de traductions scientifiques entrepris par les Dominicains dès le commencement du xvi » siècle. La première et la plus célèbre des traductions littérales est celle de Saute Pagnino, de Lucques, sorti des écoles de Saint -Marc de Florence, érigées par Savonarole. Il avait travaillé vingtcinq ans à cette œuvre. Léon X s’était engagé à faire les frais de la publication. Un commencement de publication avait même eu lieu, quand le pape mourut (1521). Pagnino publia son œuvre avec le concours pécuniaire de généreux particuliers, ses parents et compatriotes, à Lyon, en 1527 (ancien style) : Veteris et Novi Testamenti nova translatio. Elle est dédiée à Clément VII. Rééditée à Cologne, 1541, et à Paris, 1557, cette traduction fut revue par Arias Montanus, qui maintint en marge les leçons primitives de Pagnino et la publia dans sa célèbre polyglotte, Anvers, 1572. Elle a ainsi paru dans les nombreuses éditions de cette œuvre. Voir t. i, col. 954-955.

L’utilité de l’œuvre de Pagnino fut si manifeste, que les protestants l’adoptèrent et en donnèrent diverses éditions. Michel Servet la publia à Lyon, en 1542, avec une préface et un appareil de sa façon. Les Genevois l’éditèrent en 1568 et 1586 ; les protestants de Zurich en 1579 (Échard, t. ii, p : 117) ; B. Bertram l’introduisit dans la petite polyglotte de Heidelberg, 1586. H.Vuilleumier, Les hébraïsants vaudois au xvi’siècle, Lausanne, 1892, p. 78. Il y a une édition de Francfort-sur-le-Main, 1600. R. Simon, Hist. crit. du V. T., p. 504, mentionne une édition de Hambourg. La faculté de théologie de Leipzig joignait aussi la traduction Pagnino -Montanus à sa Bible hébréogrecque de 1657, et l’on publiait encore à Bàle, en 1675, le Psautier hébraïque avec la version de Santé Pagnino.

Au moment où Pagnino achevait son œuvre, le cardinal Cajetan se livrait à une entreprise similaire. Dépourvu d’une connaissance personnelle des langues anciennes, il dirigea le travail de plusieurs spécialistes pour constituer une traduction littérale de toute l’Écriture. La tentative de Cajetan est fort remarquable, parce qu’à raison