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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome IV.djvu/343

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    1. MANASSÉ##

MANASSÉ (TRIBU DE) — MANASSÉ (PRIÈRE DE)

G52

de Jéblaam et de Mageddo, qui devinrent seulement tributaires. Jud., i, 27, 28. — Gédéon, qui était de la tribu, l’appela aux armes contre les Madianites et les Amalécites. Jud., vi, 15, 35. — Les lévites obtinrent des villes dans les deux territoires : â l’ouest Thanac et Balaam ou Jéblaam, Jos., xxi, 25 ; I Par., vi, 70 (hébreu, 55), (Gethremmon, Jos., xxi, 25, et Aner, I Par., vi, 70, sont probablement des fautes de copistes) ; à l’est, Gaulon et Bosra, Jos., xxi, 27, ou Gaulon et Astaroth selon I Par., vi, 71. — Après avoir aidé leurs frères à prendre possession de la terre de Chanaan, les Mânasséens orientaux revinrent, avec Gad et Ruben, dans le territoire qu’ils avaient conquis. Jos., xxii, 1-9. Quant à l’autel élevé sur les bords du Jourdain, Jos., xxii, 10-34, voir Gad 4, Histoire, t. iii, col. 30. Ils fournirent des troupes à Jephté contre les Ammonites. Jud., XI, 29. — La tribu tout entière prêta aussi un bon appui à David, I Par., xii, 19-21, et parmi les guerriers qui prirent part à son élection poyale, on en comptait 18000 du groupe occidental. I Par., xii, 31. On ne dit pas quel fut le contingent du groupe oriental dans les 120000 hommes qui vinrent d’au delà du Jourdain. I Par., xii, 87. Pour l’administration civile et religieuse, David leur préposa des lévites et des officiers. I Par., xxvi, 32 ; xxvii, 2021. — Salomon, de son côté, établit Bengaber comme préfet ou intendant sur le pays d’Argob et de Basan. III fieg., iv, 13. — Manassé occidental, comme les autres tribus séparées de Juda, tomba dans l’idolâtrie. Cependant un certain nombre de ses membres se montrèrent fidèles au vrai Dieu à l’époque d’Asa, d’Ézéchias et de Josias. II Par., xv, 9 ; xxx, 1, 10, 11, 18 ; xxxi, 1 ; xxxiv, 6, 9. — La demi-tribu orientale abandonna également le Dieu de ses pères ; aussi, après avoir, vers la fin du règne de Jéhu, succombé sous une invasion victorieuse d’Hazaël, roi de Syrie, IV Reg., x, 33, elle fut emmenée en captivité par les Assyriens. I Par., v, 26. — Dans le nouveau partage de la Terre-Sainte, d’après Ézéchiel, xlviii, 4-5, Manassé est placé au nord, entre Nephthali et Éphraïm. — Enfin saint Jean, Apoc, vii, 6, le cite entre Nephthali et Siméon.

III. Caractère et importance. — Manassé, comme on le voit, n’eut pas l’importance politique d’Éphraïm, et en cela se trouvent réalisées la bénédiction et la prédiction de Jacob. Gen., xlviii, 14, 19, 20. La valeur guerrière de cette tribu ressort cependant de l’histoire de la conquête, où nous la voyons s’emparer de contrées difficiles à aborder, bien défendues par la nature et l’art humain. C’est pour cela sans doute qu’elle fut placée, d’un côté aux avant-postes de la région transjordane, pour défendre l’accès du pays, de l’autre à l’entrée des monts de Samarie, pour garder les voies qui, du nord, de la plaine d’Esdrelon, conduisent au cœur de la Palestine, à Sichem ou à Jérusalem. Aussi possédait-elle, de ce dernier côté, des villes d’une importance capitale, comme le montre l’histoire : Dor, sur la route maritime, Mageddo, Thanac et Jéblaam, premiers forts avancés sur la ligne des montagnes, Bethsan, sur la route du Jourdain. Sa valeur guerrière est en quelque sorte incarnée dans Machir, Jaïr et Gédéon. Elle contraste singulièrement avec l’indifférence et la jouissance égoïste de la tribu voisine, Issachar. Voir Issachar, iii, Caractère, t. iii, col. 1010. Si Manassé occupa une position stratégique remarquable il ne fut pas moins favorisé pour l’étendue et la richesse du territoire qui lui fut concédé et le mettait, avec Juda, au premier rang des tribus d’Israël. Aussi Dieu, dans une parole de triomphe, l’associe-t-il à Éphraïm, qui est « la force de sa tête » et à Juda, son « sceptre ». Ps.

lix (hébreu, lx), 9 ; cvn (cviii), 9.

A. Legendre.

8. MANASSÉ (PRIÈRE DE), écrit apocryphe. — On lit au second livre des Paralipoménes, xxxiii, 13, que Manassé, converti par la tribulation, s pria Dieu et fut

exaucé. » Plus loin le texte ajoute, ꝟ. 18-19 : <t Le reste des actions de Manassé et sa prière à Dieu et les paroles que les voyants lui adressèrent au nom de Jéhovah, Dieu d’Israël, tout cela se trouve dans les Annales des rois d’Israël. Et sa prière, et la miséricorde qui lui fut faite, et son péché, et son apostasie, et les endroits où il bâtit des hauts-lieux, dressa des aschéras et érigea des statues, tout cela est écrit dans les Paroles d’Hozaï » ( « des voyants », tûv ap(àvT(uv, d’après les Septante, Voir Hozaï, t. iii, col. 167). Au moment où écrivait l’auteur des Paralipoménes, la prière de Manassé existait donc dans les Annales des rois d’Israël et dans les Paroles d’Hozaï. Or, un certain nombre de manuscrits grecs et latins contiennent une prière de Manassé et l’on se demande naturellement si c’est la traduction de celle dont parle l’hagiographe. Malgré Fùrst, Ewald et Bail, cette hypothèse ne peut être admise. Rien, dans la prière, ne trahit un original hébreu ni la main d’un traducteur. Le style est coulant et libre, et la phrase paraît trop longue et trop cadencée pour être une traduction. Si l’on y remarque quelques hébraïsmes de pensée plutôt que d’expression, c’est le cas pour toutes les productions littéraires des Juifs hellénistes. Il faut en conclure avec Fritzsche, Berthold, Bissell, Zôckler, Ryssel et Schùrer, que cette petite composition a été primitivement rédigée en grec et n’a donc rien de commun avec la prière des Annales des rois d’Israël ou des Paroles d’Hozaï à laquelle se réfère l’auteur des Paralipoménes.

1° Analyse et doctrine. — La prière débute par une invocation au Dieu des patriarches, au Dieu tout-puissant, au Dieu plein de miséricorde, 1-7 : « Vous donc, Seigneur, Dieu des justes, vous n’avez pas établi la pénitence pour les justes, pour Abraham, Isaac et Jacob, qui n’ont pas péché contre vous, mais vous l’avez établie pour moi, pour le pécheur. » 8. Suit une humble confession des crimes passés et une instante demande de pardon, 9-13 : « Puisque vous êtes, Seigneur, le Dieu de ceux qui se repentent, donnez en ma personne un exemple de votre bonté. » La fin est une protestation d’éternelle reconnaissance, 14-15. Cette pièce n’est pas un pastiche, ni une mosaïque de phrases empruntées, comme tant d’autres compositions de ce genre ; un véritable souffle de piété l’anime. L’idée principale, savoir que Dieu est le Dieu des pécheurs aussi bien que des justes et qu’il se laisse fléchir par le repentir sincère, idée suggérée d’ailleurs dans le récit des Paralipoménes, est exprimée avec une force inusitée. Il y a un courant d’idées semblables au Livre de la Sagesse, xii, 2, 10, 19, etc. On peut supposer que les deux compositions appartiennent à la même époque et au même milieu. La conversion de Manassé embarrassait le judaïsme plus récent. On disait que la grande Synagogue avait damné Manassé malgré son repentir. Cf. Weber, Jùdische Théologie, Leipzig, 2e édit., 1897, p. 141, 326.

2° La prière deManassé et la tradition. — Les Constitutions apostoliques, II, 22, t. i, col. 641-649, racontent assez longuement la pénitence de Manassé et rapportent in extenso sa prière apocryphe. Quelques détails de cette histoire ont été sûrement empruntés aux légendes juives. Dans sa prison, Manassé, lié et chargé de fers (wctt<naiàTpa>iivoi), n’avait pour nourriture que du pain de son et pour boisson que de l’eau mêlée de vinaigre, en très petite quantité. C’est alors que son cœur fut touché et qu’il adressa à Dieu sa prière. Dès qu’il eut achevé, une flamme ardente l’entoura et fondit ses chaînes de fer. S’il est impossible d’admettre, avec Fabricius et Nestlé, que la prière soit l’œuvre de l’auteur des Constitutions apostoliques ou de son devancier, l’auteur de la Didascalia, et qu’elle soit passée de là dans les manuscrits grecs, on doit convenir que toute ou presque toute la tradition postérieure se fonde sur le récit des Constitutions et dépend absolument d’elles. On s’en aperçoit aux expressions identiques et aux