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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome IV.djvu/413

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    1. MARIE##

MARIE, MÈRE DE DIEU

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alors laissé à Nazareth, à la garde’de parents ou de voisins, auxquels Marie le confiait quand il y avait lieu de le faire. Luc, ii, 44. Le silence et l’humilité gardaient contre toute indiscrétion le trésor que renfermait la maison de Nazareth. Jésus, Marie et Joseph passaient pour des personnes ordinaires, ainsi que le montre la suite de l’Évangile. Il est même à croire que le divin Enfant, pour laisser à sa mère le mérite de sa foi et de sa confiance en Dieu, ne lui révéla jamais rien des mystères de l’avenir, et que, pendant près de trente années, Marie, assurée de posséder auprès d’elle le Fils de Dieu, vécut surtout des souvenirs de ce qu’elle avait entendu et vu au moment de l’incarnation et de la naissance du Sauveur. Luc, ii, 19.

II. le voyage À jéhusalem. — 1° À l’âge de douze ans, Jésus devint ben-hatfôrâh, « fils de la Loi, » c’est-à-dire soumis aux obligations qu’elle imposait à tout Israélite. Il accompagna donc dès lors ses parents à Jérusalem aux fêtes de la Pâque. La première fois qu’il s’y rendit, il resta à dessein dans la ville quand ses parents s’en retournèrent après l’achèvement des fêtes. Ceux-ci, ne le voyant pas auprès d’eux le premier jour, crurent qu’il cheminait avec d’autres personnes de la nombreuse caravane des gens de Galilée. Voir t. ii, col. 249, 250. Le soir venu, ils constatèrent son absence, reprirent le lendemain la route de Jérusalem et, le troisième jour venu, le retrouvèrent dans le Temple. Ce fut une grande épreuve pour Marie et comme un avantgoût de ce qu’elle aurait à subir plus tard pendant la passion et la sépulture du Sauveur. Elle connaissait trop bien ce qu’était Jésus pour redouter un accident fortuit ; mais elle se demandait pourquoi l’Enfant, ordinairement si docile, si prévenant et si affectueux, avait jugé à propos de se dérober ainsi à l’improviste aux soins de ses parents. Ce fut le sentiment douloureux qu’elle exprima par sa question : « Mon fils, pourquoi nous avoir traités de la sorte ? Voici que ton père et moi nous te cherchions tout éplorés. » À la réponse de Jésus : « f Pourquoi me cherchiez-vous 1 Ignoriez-vous qu’il me faut être aux affaires de mon Père ? » ni Marie ni Joseph ne comprirent rien. Luc, ii, 41-50. Ce renseignement n’a pu venir â l’évangéliste que par Marie elle-même, avouant humblement qu’elle ne comprenait pas tout dans la conduite du Sauveur. Quelle que fût en effet la science surnaturelle mise par l’Esprit-Saint dans l’âme de Marie, il n’était pas nécessaire que Marie eût sur-le-champ l’intelligence de tous les mystères qui se présentaient et que sa science allât plus loin que ne le réclamait l’accomplissement actuel de sa mission.

2° Au retour du voyage, ’Jésus « leur était soumis », reprenant pour de longues années encore la vie d’humilité et d’obéissance qu’il n’avait voulu interrompre qu’un moment. Ce nouveau fait s’ajouta aux précédents pour alimenter les méditations de Marie ; « sa mère conservait toutes ces choses dans son cœur. » Les deux passages dans lesquels saint Luc, ii, 19, 51, note que Marie conservait dans son cœur tout ce qu’elle voyait et entendait, sont comme l’indication de la source principale à laquelle l’évangéliste a puisé les récits de l’enfance de Jésus. Cf. Richard, Zur Quellenkritik der Kindheitsgeschichte Jesu, dans les Akten des Kongr. kathol. Gelehrten, Munich, 1901, p. 169. Quant au divin Enfant, elle le voyait grandir en sagesse, en âge et en grâce devant Dieu et devant les hommes. Luc, ii, 51, 52. La vie de Marie se poursuivit tranquillement à Nazareth, sans qu’aucun accident ait été relaté par les évangélistes. Le seul événement qu’on peut sûrement attribuer â cette période fut la mort de saint Joseph, qui disparut quand son rôle de protecteur de Jésus fut devenu inutile, et que sa survivance eût plutôt constitué un embarras au moment où le divin Maître commençait son ministère public.

IU. LA PERPÉTUELLE VIRGINITÉ DE MARIE. — 1° Marie

eut le privilège d’associer en sa personne la virginité et la maternité divine. Sa virginité ressort des textes évangéliques, de sa question à l’ange, Luc, I, 34, de la réponse de celui-ci, Luc, i, 35, 37, de la conduite de saint Joseph, Matth., i, 19-25, de l’application à Marie de la prophétie d’Isaïe, vil, 14 ; Matth., i, 22, 23, des allusions de Notre-Seigneur s’adressànt aux Juifs. Joa., viii, 19. La virginité de Marie avant son enfantement, affirmée par saint Ignace, Ad Ephes., xviii, 2, t. v, col. 660, est ensuite prouvée par les Pères au moyen du texte d’Isaïe. Cf. S. Justin, Apol., 133 ; Dial., 43, 66, 67, 77, t. vi, col. 381, 568, 628, 629, 656 ; S. Irénée, ffæ »-es v iii, 21, 1, 5, t. vii, col, 946, 951 ; Tertullien, Adv. Jtidmos, 9, t. ii, col. 618, etc. Sa virginité dans l’enfantement même, d’abord suspecte à quelques Pères, cf. Origène, In Luc, Hom. xiv, t. xiii, col. 1834 ; Tertullien, Adv. Marc, iii, 11 ; iv, 21 ; De carne Christ., 23, t. ii, col. 336, 411, 412, 790, etc., à cause de l’abus que les docètes faisaient de ce point de doctrine, cf. Clément d’Alexandrie, Strom., vu, 16, t. ix, col. 529, fut ensuite démontrée à l’aide du texte d’Isaïe, vii, 14, et d’un texte d’Ézéchiel, xliv, 2. Cf. S. Irénée, Heeres., iv, 33, t. vii, col. 1080 ; S. Ambroise, Epist. xlii, 5, t. xvi, col. 1125. Le texte de la loi, Exod., xhi, 2 ; Num., viii, 16, cité par saint Luc, il, 23, implique seulement que Jésus est le premier-né de Marie, mais ne veut pas dire nécessairement que sa naissance s’était produite selon les règles ordinaires. La loi parlait de ce qui arrive communément, mais ne visait pas la naissance miraculeuse du Fils de Dieu. Aussi la virginité de Marie dans son enfantement ne fait-elle aucun doute pour saint Augustin, Epist. cxxxvii, 8, t. xxxiii, col. 519 ; Serm., li, 18, t. xxxviii, col. 313 ; Enchirid.t 34, t. XL, col. 249 ; saint Léon, Serm., xxi, 2, t. liv, col. 192 ; saint Fulgence, De fide ad Petr., 17, t. xl, col. 758 ; Gennade, De eccl. dogniat., 36, t. xlii, col. 1219 ; saint Cyrille d’Alexandrie, Hom. xi, t. lxxvii, col. 1031 ; saint Jean Damascène, De fide orthodox., iv, 14, t. xciv, col. 1161 ; Paschase Radbert, De partu Virginis, t. cxx, col. 1367, etc.

2° Après la naissance du Sauveur, Marie persévéra dans une virginité constante. Les paroles de saint Matthieu, i, 18, 25 : « Avant qu’ils ne fussent ensemble, » et « Il ne la connut pas jusqu’à ce qu’elle eut enfanté son fils premier-né », ne constituent pas d’objection contre la virginité de Marie. « Avant qu’ils ne fussent ensemble » marque seulement le temps où Marie et Joseph, n’étant encore que fiancés, n’habitaient pas dans la même maison. Il est vrai que le verbe uuveXÔeîv s’emploie pour signifier non seulement « se réunir », mais aussi « avoir commerce » avec quelqu’un. Cf. Xénophon, Memor., II, II, 4, etc. Alors même que, malgré le contexte, on admettrait ce sens, , comme l’ont fait quelques Pères, il ne s’ensuivrait nullement que ce qui ne s’était pas produit jusque-là se produisit après. Cf. S. Jérôme, In Malth., i, 2, t. xxvl, 24, 25. L’autre expression, « il ne la connut pas jusqu’à ce qu’elle eut enfanté, » doit s’expliquer de même. Elle ne prouve en aucune façon qu’après la naissance du Sauveur, Joseph sortit de la réserve que lui commandaient les plus hautes convenances, les mystères dont il avait été témoin et l’éminente vertu que suppose sa vocation. Cf. S. Jean Chrysostome, In Matth., v, 3, t. lvii, col. 58 ; S, Jérôme, De perpet. virginit. B. M., 6, t. xxiii, col. 183-206 ; S. Ambroise, De institut, virgin., 38, 43, t. xvi, col. 315, 317 ; S. Thomas, Sunim. theol., III a, q. xxviii, a. 3 ; Pétau, De incarn., XIV, iii, 11, etc. Le titre de premier-né donné par saint Matthieu, i, 25, à Jésus ne suppose pas nécessairement qu’il y ait eu d’autres enfants après lui. Le premier-né est avant tout celui qui n’a été précédé d’aucun autre. Ce nom s’imposait d’autant plus impérieusement chez les Juifs que le premier enfant mâle devait être consacré au Seigneur, sans qu’on eût à s’inquiéter s’il en viendrait d’autres après lui. Exod., xxxiv, 19 ; Num., xviii,