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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome IV.djvu/68

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LATINES (VERSIONS) NON DERIVEES DE LA VULGATE

Wiseman, et que Rönsch lui-même a accepté pour l’Itala dans laquelle il croit retrouver des africanismes caractérisés. Itala und Vulgata, Marbourg, 2e édit., 1875, p. 5. — Encore ici cet argument est loin de satisfaire tous les esprits ; et des savants tels que White, dans Scrivener, op. cit., t. ii, p. 44, note 1 ; Kennedy, Dictionary, p. 54 ; Corssen, Bericht, p. 82, ne craignent même pas de dire que la preuve tirée des africanismes est de moins en moins goûtée dans le monde de la science. Il est vrai que des mots, des locutions, des phrases de notre vieille Bible latine se retrouvent chez les écrivains d’Afrique et ne se recontrent guère que chez eux. Seulement l’on doit observer que durant cette époque, IIe et IIIe siècles, presque tous les représentants de la littérature latine chrétienne sont Africains. Il n’est donc pas étonnant que le vocabulaire des textes bibliques ne se rencontre guère que chez eux. C’est la réponse de White et de Kennedy (loc. cit.). En outre, on a fait remarquer que certains mots souvent donnés pour exclusivement africains sont des composés ou des dérivés formés par des procédés en usage chez tous les auteurs latins de la décadence. M. Misset ; U. Robert, Heptat., p. xxii-xxrv. Mais il y a plus ; pendant que, au nom de la philologie, tel savant conclut à l’africanisme d’un document, au nom de cette même philologie un autre savant conclura à l’origine gauloise ou peut-être lyonnaise de ce même document. « Les grammairiens anciens, dit M. Gaston Boissier, ne paraissent pas avoir réussi à découvrir bien sûrement quels étaient les signes distinctifs de la latinité d’Afrique. Ceux d’aujourd’hui ont-ils été plus heureux ? Je ne le pense pas. » Journal des savants, 1895, p. 38-39.

D’autres auteurs, parmi ceux surtout qui sont partisans de la pluralité des versions latines, placent en Italie les tout premiers commencements d’une traduction latine. Tel est, par exemple, l’avis de Gams, dans sa Kirchengeschichte von Spanien, Ratisbonne, 18621879, t. i, p. 86-Î02. Ct. t. iii, 2* Abth., p. 501. Kaulen va plus loin. C’est à Rome même qu’il fait apparaître la plus ancienne, d’après lui, de toutes les versions, à savoir la célèbre Italique. Einleitung, § 146. — Nous ne voyons pas, quant à nous, la nécessité de décider en quel pays parut le premier essai d’une version latine de la Bible. Convaincu, comme on peut l’être en matière probable, de la thèse que nous avons défendue plus haut, de la pluralité des versions, nous disons simplement que la Bible fut traduite, partiellement au moins, dans différents pays et d’une façon indépendante, sans que nous voyions clairement quel pays commença le premier. L’Afrique avait déjà son texte complet ou à peu près dès le IIe siècle ; c’est ce qui résulte des témoignages historiques que nous avons apportés, en traitant de l’antiquité des versions latines. Nous ne doutons pas qu’il ne faille en dire autant de Rome ou de l’Italie, et peut-être aussi de plusieurs autres Églises d’Occident, en Espagne, dans les Gaules. Le lecteur n’a qu’à se rappeler, en effet, ce qui a été dit précédemment sur la pluralité des versions, et même sur le classement des textes. Car il y a tout lieu de croire que si nous avons des textes d’Afrique, d’Europe, d’Italie, ce n’est pas seulement parce qu’ils étaient usités dans ces pays, mais bien encore parce que beaucoup d’entre eux y avaient pris naissance. — Kennedy, Dictionary, p. 54-55, à la suite de Sanday, place dans la province de Syrie l’origine première de nos versions latines, Cette hypothèse n’a aucune vraisemblance.

2. LATINE (VERSION) DE SAINT JEROME. Voir Vulgate.

3. LATINES (VERSIONS) NON DÉRIVÉES DE LA VULGATE.

I. Catholiques. — 1° La Polyglotte de Ximénès, Alcala de Hénarès, 1522, contient la Vulgate entre le texte hébreu et le texte grec. Mais on y trouve aussi une version latine interlinéaire du texte grec alexandrin et une version latine de la paraphrase chaldaïque d’Onkélos. Une traduction latine interlinéaire accompagne tous les textes grecs, protocanoniques ou deutérocanoniques, sauf pour le Psautier, où il n’y a que la Vulgate et la version de saint Jérôme. Voir Polyglotte.

2° Santés Pagninoa fait une traduction latine du texte hébreu, Nova Translatio, Lyon, 1527. On reproche à cette traduction d’être trop servilement littérale, parfois inexacte et trop habituellement dans la dépendance des interprétations rabbiniques. Voir Pagnino.

3° Cajetan professait que ce n’était point entendre l’Écriture qu’entendre l’interprète latin, et qu’il fallait en conséquence recourir au texte hébreu pour l’Ancien Testament et au grec pour le Nouveau. Cf. P. Sarpi, Hist. du concile de Trente, trad. Amelot, Amsterdam, 1683, p. 142. Dans ses différents commentaires, il s’appliqua donc à donner une version latine des textes primitifs. Mais comme il n’avait de l’hébreu et du grec qu’une connaissance fort imparfaite, il fit appel à la collaboration d’un juif, expert en langue hébraïque, et d’un chrétien possédant à fond le grec. Une telle méthode était trop aventureuse pour donner de bons résultats, et les libertés que l’auteur prenait si volontiers à l’égard de la tradition scripturaire ne donnèrent pas grand crédit à son œuvre. Voir Cajetan, t. II, col. 47.

4° Isidore Clario, dans sa Vulgata editio Novi ac Veteris Testamenti, Venise, 1542, 1557, sous prétexte de corriger la Vulgate, se permit d’en changer arbitrairement le texte, et en parla en tels termes dans sa préface, que son ouvrage fut mis à l’Index. Ses corrections sont d’ailleurs en général assez peu judicieuses. Voir Clario, t. ii, col. 793.

5° Arias Montano revit la traduction de Pagnino et l’inséra dans la Polyglotte d’Anvers, Hebraicorum Bibliorum V. T. latina interpretatio, Anvers, 1572. Il y exagère encore la littéralité de Pagnino, au point de rendre inexactement le sens d’un bon nombre de passages. Voir Arias Montano, t. i, col. 954.

6° Thomas Malvenda, pour défendre la Vulgate, entreprit une version latine du texte hébreu, mais fut interrompu par la mort pendant qu’il traduisait Ezéchiel. Thomas Turcus a publié l’ouvrage : Commentaria in S. S. una cum nova de verbo ad verbum ex hebræo translatione, Lyon, 1650. Malvenda se sert des versions antérieures et des travaux de différents auteurs, mais sans jamais indiquer de références. De plus, sous prétexte de rendre plus littéralement l’hébreu, il forge de nouveaux mots latins, ce qui donne à son œuvre un air barbare.

7° Houbigant, dans sa Biblia hebraica cum notis criticis et versione latina ad notas criticas facta, Paris, 1743-1754, n’a donné qu’une œuvre imparfaite, parce qu’il n’a pu avoir sous la main tous les manuscrits hébreux qu’on a recueillis depuis, et parce que trop souvent il pousse la hardiesse jusqu’à la témérité dans ses corrections du texte massorétique. Voir Houbigant, t. iii, col. 765.

8° J. de la Haye a réuni dans sa Biblia maxima, Paris, 1660, les traductions latines d’une foule de versions anciennes. Elles sont au nombre de vingt ou trente pour certains passages, ce qui produit une confusion inutile et une accumulation indigeste de documents qui se répètent sans profit appréciable.

II. Protestants. — 1° S. Munster, cordelier devenu luthérien, publia à Bâle, 1534 et 1546, une traduction latine de l’Ancien Testament faite sur l’hébreu. Il s’y inspire des explications des rabbins et ne tient pas assez compte des anciennes versions. Il est cependant littéral et ordinairement exact. Sa traduction est préférée à celles de Pagnino et d’Arias Montano.