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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome IV.djvu/840

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NIL

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canaux et, par suite, la ruine du pays. Cf. IV Reg., xix, 24.

II. Le Nil dans la Bible. — Le Nil, sous son nom de Ye’ôr, est souvent mentionné dans le Pentateuque. C’est du Nil que sortent les vaches vues en songe par le pharaon de Joseph. Gen., xli, 1-3. C’est dans le Nil que le pharaon ordonne de précipiter tous les enfants mâles des Hébreux. Exod., i, 22. Moïse y est exposé dans une corbeille de jonc et recueilli par la fille du prince. Exod., il, 3-6. C’est au Nil que Moïse prend l’eau qu’il répand sur la terre et qui se change en sang. Exod., iv, 9 ; Ps. lxxvii (lxxviii), 44. Le serviteur de Dieu change bientôt après en sang toute l’eau du fleuve. Exod., vii, 17-22. Il en fait sortir les grenouilles qui ravagent la terre d’Egypte, Exod., viii, 5-13. Voir Plaies d’Egypte.

— Les prophètes parlent aussi souvent du Nil. Isaïe, xix, 6, appelle ses eaux « les eaux de la mer », il "nous montre, ꝟ. 8, les pêcheurs qui y jettent l’hameçon, xvin, 2, les barques de papyrus qui fendent ses ondes, vm, 8, les mouches qui abondent sur ses bords ; Jérémie, xl vi, 7-8, décrit la marche majestueuse du fleuve ; Amos, ix, 4, fait allusion à la crue et à la baisse du Nil ; Nahum, iii, 8, dit que cette « mer » servait de « rempart » à Thèbes ; Ézéchiel, xxix, 3, représente le pharaon comme un grand crocodile qui se tient couché au milieu du fleuve et qui dit : Mon fleuve est à moi, mais que Dieu en arrachera. Cf. xxxil, 2. — Le livre de [Job qui est plein d’allusions à l’Egypte, décrit l’hippopotame et le crocodile du Nil. Job, xl, 10-28.

III. Cours du Nil. — L’Egypte, dit Hérodote, II, v, est un don du Nil. C’est au Nil en effet et à ses inondations régulières que l’Egypte doit toute sa fécondité. C’est par la partie inférieure de son cours que le Nil fut d’abord connu et, jusqu’à ces dernières années, les sources de ce fleuve étaient inconnues. La partie la plus rapprochée de la Méditerranée porte le nom de Delta parce que le fleuve s’y divise en plusieurs branches qui forment la figure d’un À grec dont la base serait Ja Méditerranée. Les trois branches principales sont la Canopique à l’ouest qui aboutit près du cap d’Aboukir ; la Pelusiaque qui descend le long de la chaîne arabique à l’est, et enfin la Sébennityque qui divise en deux parties à peu près égales le triangle compris entre la branche Pelusiaque et la branche Canopique. Ces trois artères principales sont réunies l’une à l’autre par une quantité considérable de canaux, de fossés naturels ou artificiels qui répandent partout la fécondité. Au sud du Delta une bande de terre végétale s’étend le long des rives du fleuve entre deux chaînes de collines distantes d’environ 20 kilomètres. Le Nil coule au milieu. C’est moins un fleuve qu’un lac sinueux, coupé de bancs de sable et d’ilôts, au milieu duquel serpente un chenal. La plaine se resserre de plus en plus. À Thèbes elle a encore 15 à 16 kilomètres de large ; au défilé de Dgébéléin ou Djebel Silsiléh, il ne reste que le lit même du fleuve entre deux escarpements de pierre. Au delà le fleuve est traversé de l’Est à l’Ouest entre le 24e et le 18 8 degré de latitude par cinq bancs de granit qui forment des rapides et qu’on appelle les cataractes.

La première, sorte de couloir sinueux, va du port d’Assouân à l’île de Philse. La seconde, au sud d’Ouadi-Halfah étend ses rapides sur une largeur de 16 kilomètres environ et forme un archipel de 350 îlots. A Kkartoum le cours du fleuve se dédouble. Le principal qu’on appelle le Nil blanc ou Bahr-el-Djebel, vient du lac Albert-Nyanza à l’ouest, le second, le Nil bleu ou Bahr-el-Azrek, descend des montagnes d’Ethiopie. G. Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 1-16 ; Elisée Reclus, Nouvelle Géographie, t. x, p. 49-111 ; Sir Harry Johnston, The Nile question, in-8°, Londres, 1903, p. 160-174, 276-293, 299-319. Les anciens Égyptiens ignoraient quelles étaient les sources du Nil. Cf. Papyrus Sallier, h, 12.

IV. L’inondation du Nil. — Chaque année, au mois de février, le Nil blanc, grossi par les pluies qui tombent dans la région des grands lacs, coule précipitamment vers le nord entraînant dans son cours toutes les mares restées de l’inondation précédente. Il se grossit des eaux du Bahr-el-Ghazâl, à l’ouest, qui lui apporte les eaux des plaines situées entre le Darîbur et le Congo et de celles du Sobat, à l’est, qui apporte les eaux des montagnes d’Abyssinie. Vers la fin d’avril, le niveau du fleuve s’élève à Khartoum d’environ 30 centimètres et s’écoule lentement vers l’Egypte. Le courant conserve jusqu’au Delta une teinte verte qui provient des débris des plantes qu’il ramasse sur son passage. C’est ce qu’on appelle le Nil vert ; on dit qu’alors le Nil est empoisonné et donne d’atroces douleurs à ceux qui boivent ses eaux. Trois ou quatre jours après le Nil vert commence la crue véritable. Le Nil bleu amène les eaux du plateau central de l’Abyssinie et son cours a une telle impétuosité qu’il reste séparé du Nil blanc jusqu’à 500 kil. environ au delà de Khartoum. Les cataractes mettent un frein à la fureur du fleuve et forment comme six étages de bassins à travers lesquels l’eau se tamise peu à peu. L’arrivée de l’inondation est signalée à Syène vers le 8 juin et au Caire du 17 au 20. C’est ce qu’on appelle la nuit de la goutte ; deux jours après

438. — Le dieu Nil. — D’après À Guide to the tkird and fourth Egyptian Boom, Londres, p. 158.

elle est dans le Delta. Cette nuit de la goutte est le souvenir d’une tradition égyptienne d’après laquelle, vers le milieu de juin, Isis pleurant son frère Osiris laisse-’rait tomber dans le fleuve une larme qui serait cause de l’inondation. Pausanias, X, xxxii, 10. Cf. Lane, Manners and Customsof modem Egyptians, Lonàres, 1871, t. ii, p. 224. Le Nil monte peu à peu et atteint sa pleine hauteur vers le 15 juillet. Pendant cette crue le limon qu’il charrie lui donne une couleur rouge, qui ressemble parfois à celle du sang, mais qui ne nuit pas à la qualité de l’eau. Quand la hauteur est suffisante pour inonder les terres, les Égyptiens ouvrent les digues et l’eau se répand partout. Les anciens Égyptiens mesuraient la hauteur du Nil par coudées de m 54 ; à 14 coudées la crue était considérée comme excellente. L’Egypte est alors une nappe, d’eau trouble divisée par les chaussées qui relient les villages. Le fleuve reste stationnaire environ huit jours, puis décroît peu à peu. G. Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 22-24 ; Elisée Reclus, Nouvelle Géographie, t. x, p. 111-118.

V. Le DIEU Nil. — Les Égyptiens adoraient le Nil comme une divinité bienfaisante, Hapi. Ils le représentaient sous la figure d’un homme vigoureux et bien portant. Ses seins étaient développés comme les seins d’une femme et pendants. Sur la tête, ii, portait un bonnet surmonté de plantes aquatiques. Sur les bas-reliefs on le représente tenant à la main des vases à libation, des croix ansées, des tables couvertes d’offrandes, des