Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome V.djvu/175

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
341
342
PHURIM (FÊTE DES) — PHUTH


et en même temps une croix, en haine de la foi chrétienne. Théodose fut obligé de leur défendre ce sacrilège. Cod. Theod., XVI, viii, 18. — 5. Les festins qui accompagnaient la fête des Phurim étaient joyeux et copieux. D’après la Gem. Megilla, vii, 2, chacun devait boire, à la fête des Phurim, de manière à ne plus pouvoir distinguer entre « maudit Aman » et « béni Mardochée ». — 6. Un certain nombre d’auteurs ont pensé que la fête mentionnée par saint Jean, v, 1, éopTT„ « une fête, » ou d’après plusieurs manuscrits tj êoptr), « la fête, » n’était autre que celle des Phurim. Mais cette fête n’obligeait pas à se rendre à Jérusalem « t il serait étonnant que saint Jean se fût arrêté à signaler une solennité d’un caractère si profane. Il parle manifestement d’une fête qui attirait à Jérusalem un grand concours de peuple. À la suite de saint Irénée, Adv. hœr., ii, 22, 3, t. vii, col. 783, et conformément aux conclusions d’Eusèbe, Chronic., et Demonstr. evang-, t. xix, col. 536 ; t. xxii, col. 625, on croit assez généralement que cette fête était la Pàque. Cf. Fillion, Évang. selon S. Jean, Paris, 1887, p. 92, 93 ; Knabenbauer, Evang^ sec. Joan., Paris, 1898, p. 187. — 7. Enfin, on a cherché à ratlacher la fête juive des Phurim à certains usages en honneur chez les Perses. La fête ne serait qu’une adaptation, par les Juifs de Suse, d’une fête de printemps que les Perses célébraient annuellement. Selon d’autres, elle devrait son origine aux festins que les Perses faisaient en l’honneur des morts pendant dix jours, les cinq derniers jours du douzième mois d’abân et les cinq jours intercalaires qui suivaient. Ces solennités gastronomiques s’appelaient Fôrdigdn ou Pôrdigân, termes que reproduiraient approximativement les mots des textes grecs ^poupaî et <J>poupaïa, et les festins du 14 et du 15 adar n’en seraient que l’imitation. On a prétendu aussi que cette fête n’était qu’un prélude de la fête de la Pâque, qui tombe juste un mois plus tard. Cf. Riehm, HandwôHerbuch des biblisch. AUertums, Leipzig, 1894, t. ii, p. 1264. Toutes ces allégations se heurtent au récit du livre d’Esther qui ne fait pas la moindre allusion, à propos de la fête des Phurim, ni à une solennité printanière, ni au souvenir des morts, ni à une préparation anticipée à la Pâque. Les festins sont de tous les temps et de tous les pays et il était naturel d’y recourir pour célébrer une délivrance. Ils étaient déjà prescrits aux Israélites dans leurs autres fêtes. Deut., xvi, 11, 14. En somme, l’historique de la fête des Phurim est aussi incontestable que celle des autres fêtes instituées après la captivité, celle de la Dédicace, II Mach., x, 1-8, et celle du 13 adar en souvenir de la mort de Nicanor. II Mach., xv, 36-37. — Cf. Reland, Antiquitates sacrse, Utrecht, 1741, p. 268-269 ; lken, Antiquitates hebraicx, Brème, 1741, p. 141-142, 336-338 ; W. Schickard, Purim sive Bacchanalia Judseorum, dans les Critici sacri, t. iii, col. 1184 ; B. L. Eskuche, De festo Judseorum

Purim, Marbourg, 1734.

H. Lesêtre.
    1. PHUTH##

PHUTH (hébreu : Pût ; Septante : *oû8, Afêus « ; Vulgate : Phuth, Phut, Libyes, Libya, Africa), pays.

I. Les textes. — Isaïe, lxvi, 19, sous le règne et vers la tin de la vie d’Ézéchias, vers 698 avant J.-C, parle du royaume messianique et des Juifs incrédules. Toutefois, parmi ces derniers, quelques-uns resteront fidèles et Dieu les enverra prêcher sa gloire aux Gentils, aux « Pûl » entre autres et aux « Lûd qui tirent de l’arc », ce que la Vulgate rend par in Africain et Lydiam tendentes sagittam. Pûl est un mot qui ne se rencontre nulle part ailleurs et qui semble une corruption pour Pût. Ainsi l’ont compris les Septante qui le traduisent par $oj6. Leur lecture a été généralement acceptée/ à commencer par saint Jérôme, comme l’insinue le mot Africa. — Nahnm, iii, 9, nous montre Pût et Lûbim parmi les auxiliaires de l’ar mée égyptienne, tandis que KûS et’Misraîm sont la force de Thèbes : Mthiopia fortiludo ejus et JEgy$>tus. .. ; Africa (Pût) et Libyes (Lûbim) fuerunt in auxilio tuo. Rien n’est plus exact, puisque, avant le sac de Thèbes (664) par Assurbanipal, l’Ethiopie dominait l’Egypte et ne faisait qu’un avec elle. Les Ethiopiens ne pouvaient donc alors être considérés comme les auxiliaires de l’Egypte. Cf. No-Amon, t. iv, col. 1647. — Jérémie, xlvi, 9, nous apprend que dans l’armée que Néchao II conduit au désastre de Carchamis, 606 avant J.-C, se trouvent des Éthiopiens (Kûs) et des Libyens (Pût) armés du bouclier, et des Lydiens (Lûdîm) saisissant et lançant des flèches. Ici les Éthiopiens ne sont plus que les auxiliaires de l’Egypte et sur le même pied que Pût et Lûdim. En effet les Éthiopiens, à cette date, se sont retirés à Napata, et l’Egypte possède un gouvernement indépendant. — Ézéchiel, xxvii, 10, place, avec les Perses Lûd et Pût, des Lydiens et des Libyens, parmi les auxiliaires de Tyr qui doit tomber, ou du moins se soumettre, après treize ans de siège, à Nabuchodonosor, 574 avant J.-C. Cf. Maspero, Histoire de l’Orient classique, t. iii, 1899, p. 549. Chez le même prophète, xxx, 5, Kûs, Pût et Lûd, l’Ethiopie, la Libye et les Lydiens, servent dans l’armée de Pharaon que Nabuchodonosor heurtera en 568, dans sa deuxième campagne contre l’Egypte. Cf. No-Amon, t. iv, col. 1652, 3°. — Enfin, chez Ézéchiel, xxxviii, 5, nous trouvons dans l’armée de Gog, roi de Magog, avec d’autres peuples Kûs et Pût, les Éthiopiens et les Libyens. — Dans un passage de Judith, Septante, ii, 23, Holopherne vient d’arriver au nord de la Cilicie ; il s’engage alors dans les montagnes et ravage Pût et Lûd.

II. Phuth, peuple africain. — 1° Pour Nahum, iii, 9, il n’y a pas de doute, Phuth est en Afrique. À Thèbes, dont l’Ethiopie et l’Egypte sont la force, puisqu’à ce moment l’éthiopien Tanoutamen a succédé à son père, l’éthiopien Tharaca, dans le gouvernement de l’empire éthiopico-égyptien, Phuth fournit des auxiliaires au même titre que la Libye. Les gens de Phuth sont donc comme les Lûdim des voisins de l’empire éthiopico-égyptien. — 2° Isaïe, lxvi, 19, unit les Pût aux Lûd, si vraiment, après les Septante, nous devons lire Pût au lieu de Pûl. Mais comme Lûd représente ici, nous dit-on, les Lydiens de l’Asie Mineure, il en résulte que Pût paraît être aussi un peuple delà même région. « Isaïe… comprend dans une énumération Tarsis, Phoul (Phut), Loud, Thubal, Javan, leur appliquant la désignation commune A’iles, sous laquelle l’usage biblique entend l’Asie Mineure, les îles de la Méditerranée, la Grèce et les îles plus éloignées à l’ouest. Le texte d’Isaïe nous ramène donc à l’Asie Mineure pour Loud en particulier et probablement aussi pour Phout. » A. Delattre, Le peuple et l’empire des Mèdes, Bruxelles, 1883, p. 159, note 1. A cela on peut répondre : le texte en question, le mot îles en particulier, ont-ils bien ce sens restreint ? « Et je ferai un prodige au milieu d’eux, dit le texte hébreu, et j’enverrai de leurs réchappes vers les nations, àTharsis (Tartessus, port phénicien d’Espagne), à Pûl (Pût) et à Lûd qui tirent de l’arc, à Thubal (Tibaréniens du Pont-Euxin) et à Iavan (Ioniens, Grecs) vers les îles lointaines, qui n’ont jamais entendu parler de moi, et ils publieront ma gloire parmi les nations. » De ceux qui auront échappé au jugement de Dieu, il en est donc qui iront annoncer la bonne nouvelle jusque chez les peuples reculés et peu connus, chez toutes les nations, dont quelques-unes sont nommées. Aucune limite ne leursera assignée que les limites des îles « les plus lointaines », c’est-à-dire de l’univers. L’énumération d’Isaïe est si peu restrictive qu’elle a pour but principal de montrer que le royaume de Dieu sera prêché à tous. D’où il ne suit pas nécessairement que les peuples réunis par l’énumération