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soient aussi réunis par la race ou par la géographie et qu’il faille placer Put à côté de Lûd. Cf. Knabenbauer, In lsaiàm, t. ii, p. 515, 517. En accordant même que ces deux peuples aient été voisins, rien ne nous garantit que Lûd ait eu son habitat en Lydie. Sans vouloir avec Ébers, Aegyplen und die Bûcher Mose’s, 1868, p. 91, en faire des Egyptiens, Lutu, ce qui est très

douteux comme lecture puisque le mot t=> "Se se lit

aujourd’hui plutôt romitou ; ce qui est exclu par le fait même que Lûd et Lûdim comptent ailleurs, .1er., xlyi, 9 ; Ezech., xxx, 5, parmi les auxiliaires des Égyptiens ; sans donc aller jusque-là, il est à propos de noter que si dans la Genèse, x, 22, Lûd est le quatrième fils ou la quatrième famille issue de Sem, Lûdim, x, 13, est la première famille issue de Misraïm. Il y eut donc à l’origine deux peuples de ce nom, l’un asiatique, les Lûd, l’autre africain, les Lûdim. Malheureusement, la (UstiafiXuyo. 4e. os. ?, Aenx. ççuçV&s xxe se conserve-ças chez les prophètes qui emploient indifféremment et l’un pour l’autre Lûd et Lûdim. Cf. les passages parallèles, , 1er., xl vi, 9, et Ezech., xxx, 5. On ne peut donc rien conclure contre l’origine africaine des Lûd tels qu’ils apparaissent dans le texte de Jtrémie, à plus forte raison des Pût que rien n’autorise à dédoubler et à sortir de l’Afrique où les met clairement Nahum. On pourrait objecter le texte des Septante dans Judith, ii, 23.’Mais nous ne possédons pas le texte original de ce livre. Les noms propres surtout, dans les manuscrits des différentes versions, sont profondément altérés et divers. Cf. Vigouroux, Manuel biblique, t. ii, 12e édit., 1906, p. 186-188. Si bien, qu’étant donnée la marche d’Holopherne, qui ravage la Cappadoce, puis entre dans la région des montagnes, c’est-à-dire la Pisidie, le plus probable est de déduire avec Robiou, Deux questions de chronologie et d’histoire éclaircies par les Annales d’Assurbanipal, 1875, p. 16, que « Phut » " est ici pour « Phust », par suite de la chute de la sifflante. « En effet, en suivant cette direction, les massifs de laPisidie se présentaient devant eux (les Assyriens, ). L’omission de la sifflante par les copistes suffit pour transformer en Phut le nom de cette contrée. » — 3° Jérémie, xlvi, 9, et Ézéchiel, xxx, 5, nous retiennent en Afrique avec Kus et Pût qui manient le bouclier, quoi qu’il en soit de Lûdim et Lûd. Ces derniers pourraient bien être des Lydiens à l’époque de Néchao et d’Amasis. Les Grecs et leurs voisins de l’Asie Mineure sont nombreux alors dans l’armée égyptienne, et, peu après la seconde campagne de Nabuchodonosov, Amasis resserra ses liens avec eux en s’alliant à Polycrate de Samos et à Crésus de Lydie, Hérodote, iii, 39, i, 77. — 4° Ézéchiel, xxvii, 10, ne nous parle plus de l’armée égyptienne, mais de l’armée qui défend Tyr, et cette armée comprend des Perses, des Lûd et des Pût. À première vue, un tel groupement dans un tel endroit peut surprendre, et on a voulu y voir une « simple paranomase ». Cf. Frd. Delitzsch, Wo lug das Paradies, 1881, p. 252. Mais si nous nous rappelons qu’à ce moment la mer Rouge est reliée au Nit et à la Méditerranée, que les colonies phéniciennes sont disséminées en Syrie, en Mésopotamie, au golfe Persique, en Egypte, sur les différents rivages de l’Alrique, dans la plupart des iles de la Méditerranée, sur la mer Noire et en Espagne, cf. Movers, Die Phônizier, 18411856, t. ii, 2, nous ne serons pas étonnés de voir Tyr recruter ses mercenaires jusque chez les nations les plus éloignées. D’ailleurs, à le bien regarder, le texte sacré ne nous force nullement à faire coudoyer dans Tyr même les gens de Pûtpar les Perses et les Lydiens. Ézéchiel ne borne pas sa vue à la ville de Tyr, mais il embrasse Tyr et tout l’ensemble de ses colonies et, pour ainsi dire, son rayonnement entier : « Les Perses et les Lydiens et Pût combattaient dans ton armée ; ils

suspendaient chez toi le casque et le bouclier et te donnaient de la splendeur. » Il peut très bien n’être question que de mercenaires soudoyés sur place pourla défense des colonies phéniciennes où Tyr, métropoledes nations, était encore chez elle, et alors rien de plus naturel que les gens de Pût lui aient servi de milice dans ses postes africains de la mer Rouge^ pendant que les Perses et les Lydiens jouaient ailleurs le même rôle, tous contribuant à la gloire et à la force de Tyr » Cf. Knabenbauer, In Ezechielem, p. 270-271. — 5° Ézéchieî, xxxviii, 5 : Que Gog, roi de Magog, soit un personnage historique ou non, il est ici une figure. Il incarne la lutte générale, et peut-être la grande et suprême lutte contre le royame de Dieu. Tel sera son prestige qu’il recrutera ses partisans dans le monde entier. Afin de rendre sa description plus saisissante, le prophète ne se contente pas de parler en général, il s’accommode à l’esprit de ses contemporains et il leur cite des peuples aux noms et aux caractères connus, pour leur montrer que ces adversaires seront implacables autant qu’innombrables. Il nous faut donc garder le symbole, mais en en distinguant la chose signifiée, et nous comprendrons sans peine pourquoi les nations africaines de Kûs et de Pût sont contenues dans cette énumération des contingents de l’armée de Gog, géographie vivante au moment où l’auteur parle, bien qu’elle ne doive plus l’être probablement quand se produiront les événements. Cf. Knabenbauer, loc. cil., p. 388-391. — En résumé, de l’examen de nos textes, if ressort qu’il n’y a qu’un peuple de Pût et qu’il est africain. C’est ainsi d’ailleurs que l’avaient compris les Septante et la "Vulgate puisqu’ils rendent toujours ce nom chez les Prophètes par Libyens.

III. Pût et Pont. — Où les Septante se sont trompés, et, après eux, la Vulgate, c’est en identifiant Pût avec les Libyens. Ils ne faisaient, du reste, que suivre une tradition. Cf. Josèphe, Ant. jud. I, vi, 2. Cf. Pline, H. N., v, 13 et Ptolémce, IV, i, 3. Jusqu’à notre époque les interprèles de l’Écriture s’en sont tenus à la tradition mentionnée dans Josèphe et plusieurs s’y tiennent encore. Cf. Riehm, Ilandivôrterbûch des bibl. Allertums, 2e édit., t. ii, p. 1268. Mais elle ne mérite aucune attention, car les anciens Égyptiens ne connurent jamais la Mauritanie marocaine. De plus, elle ne lient aucun compte de ce fait que l’Écriture dislingue à plusieurs reprises les Pût des Libyens : Lehabim et Lubim. Gen., x, 13 ; Nahum, iii, 9 ; Ezech., xxx, 5. — Pour justifier la traduction de Pût par Libyes, quelques commentaleurs, cf. Dillmann, Genesis, 4e édit., 1882, p. 169, ont fait appel au mot cJ>i.ii.T, désignant la Libye et surtout la partie occidenlale du Délia. Mais on ne connaît pas encore en égyptien le correspondant de ce mot et l’on ne voit pas d’après quelles règles de linguistique il serait représentatif d’un terme égyptien équivalent à Pût et qui aurait influencé les traducteurs.

D’autre part, des égyptologues ont comparé PûtàTy^ qu’ils lisent peti, pâte, « guerriers étrangers, mercenaires ». Cette expression vient de ^, , padit, pedet, », en copte nrre au masculin, fb^rr au féminin ; « arc

écrile

III « > llll’l'e "e désigne les « neuf arcs » que les statues royales foulent aux pieds et qui représentent les ennemis de l’Égyple. Étant donnée la lecture peti, pâte, elle ne serait pas sans analogie avec Pût que la Bible accole de l’épithète « maniant l’arc ». Par suite, Pût désignerait en général tous les contingents étrangers, tant africains qu’asiatiques, à la solde de l’Egypte et même d’autres nations. Nous les trouvons, en effet, dans les forteresses du Delta oriental, Papyrus Anasiasi, m, 6, lig. 4 ; 7, lig. 6 ; gardant les puits de la Palestine orientale, ib., v, 11, lig. 7 ; à Héliopolis, ib., i, 10, lig. 1 ; en Ethiopie, Papyrus judiciaire de Turin,