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V. Le pays de Punt. — Il est avant tout « les Échelles de l’encens », khetiou nou dntiou, ®~ ^ ^ i *

S^^, |, , Naville, loc. cit., pi. lxxxiv, lig. 13, la terre des parfums par excellence, ceux que les dieux préfèrent et qu'à respirer les hommes éprouvent une joie céleste. « Je t’ai donné, dit Amon à Hatchepsou, tout le pays de Punt, y compris les terres des dieux de la Terre divine… Les Échelles de l’encens, c’est en vérité le lieu de mes délices. Je l’ai créé pour (y trouver) le bien de mon cœur, dans la compagnie de Moût, d’Hathor, d’Ourrit, dame de Punt. » Naville, loc. cit., lig. 10-13. Nous voyons par ce texte que Puni s’appelait

aussi la Terre divine H ~y^~, ta neter. Punt et Taneter

sont d’ordinaire synonymes. Toutefois le second semble avoir un sens plus vague et plus étendu que le premier et l’on comprend dés lors que parfois on le place au nord relativement à Punt. Cf. Maspero, De quelques navigations des Égyptiens, 1878, p. 6. Par delà Punt et la Terre divine s'étendaient les régions fabuleuses, l’Ile des Doubles, la Terre des Esprits. — De ce qui a été dit, il ressort déjà que le Punt connu des Égyptiens . était en Afrique et l’on a pu soupçonner qu’il se trouvait à l’est du Nil. Les documents hiéroglyphiques vont nous permettre de préciser davantage. « Je suis venu, dit Amon à Thoutmès III, et je t’accorde d'écraser la terre d’Orient, de fouler aux pieds les habitants des contrées divines. » Mariette, Karriak, 1875, pi. xi, lig. 15. De même à Ramsès III : « Je tourne ma face vers l’Orient… : je te l’assujettis en son entier… ; je réunis pour toi les produits de Punt, gommes odorantes, encens, cinnamome…, l’odeur agréable en est devant toi. » Champollion, Monuments de l’Egypte et de la Nubie, Notices descriptives, t. i, p. 727. Tous les matins le soleil arrivait de Punt chez les Mazaiou, c’est-à-dire d’Orient en Occident. Mariette, Papyrus de Boulaq, t. n. pi. xr, p. 2, lig, 4 ; cf. p. 1, lig. 4-5. C’est donc bien à l’Orient de l’Egypte que se trouvait le pays de Punt. On pouvait s’y rendre par les routes de terre et de mer. C’est par les routes de terre que Hirkhouf, prince d'Éléphantine, y parvint sous la VIe dynastie et en ramena un pygmée, comme avait fait quatre-vingts ans plus tôt un autre fonctionnaire de la Ve dynastie. Maspero, Histoire de l’Orient classique, t. i, 1895, p. 396-397. 432-433, pense que c’est par les vallées qui s’ouvrent vers la mer Rouge un peu avant la seconde cataracte que Hirkhouf toucha au pays de Punt. E. Schiaparelli, Ùna tomba egiziana ineditadélia VJ 1 dinastia, dans Atti délia R. Ace. dei Lincei, séria 4 a, t. x, 1893, part. 1*, Memorie, p. 22, estime que ce fut plus au sud encore que remonta Hirkhouf pour aller prendre contact avec la Terre divine, p. 48-53. Dans la suite, on préféra la route de Coptos par l’Ouadi Hammamat, jusqu'à Qoçéyr sur. la mer Rouge. De là, des chalands ayant été construits sur place, on filait en course le long des côtes vers le sud, on percevait les tributs des terres divines, surtout l’encens dont on avait besoin pour le culte des dieux. Ainsi fit Hounou, l’ami unique de Sankhara Mentouhotep, le dernier roi de la XIe dynastie. Lepsius, Denkmàler, Abth.n, pi. 150a ; Maspero, loc. cit., p. 494495. Ainsi fit un certain Khentkhétouer, en l’an XX VIII d’Aménemhat II et, il consigna son heureuse croisière sur une stèle de l’Ouadi Gasous. Erman, Slelen aus Vddi Gasûs bei Qosêr, dans Zeitschrift fur àgyptische Sprache, t. xx ; 1882, p. 203-205. Ainsi feront tous les rois aux époques prospères. On n’oubliera plus le chemin de Punt que plus tard rendra plus abordable le canal du Nil à la mer Rouge. Cf. Maspero, De quelques navigations, p. 27-32 ; Naville, The Store-City’of Pithom, 4e édit., 1903, p. 21, 33. — Jusqu'à la XII » dynastie, il semble que les Égyptiens n’aient connu de ce pays que la partie située à la hauteur de Souakim et

de Massaouah, et pour cette époque seulement valent les conclusions documentées de Krall, Studien zur Geschichte des aiten Aegyptens, iv, ûas Land Punt, dans les Sitzungsberichte de l’Académie impériale de Vienne, t. cxxi, 1890, . p. 1-87 ; voir en particulier, p. 21-22. En effet, Maspero, Notes sur quelques points degrammaire et d’histoire, dans Recueil des travaux, t. xvii, 1895, p. 76-78, a montré qu'à la XIIe dynastie l’on croyait que le Nil débouchait par là dans la mer Rouge, vers l'île du roi des Serpents, qui répondrait à l'île des Topazes des Anciens, dans la région moyenne du golfe Arabique. Mais sous la XVIIIe dynastie, la flottille de la reine Hatchepsou paraît avoir dépassé ces limites. Ce n’est pas sur la côte même, mais dans l’estuaire d’un fleuve que les Égyptiens débarquent, comme cela résulte de l’examen des représentations de Deir elBahari. Partant de ce fait, Maspero, De quelques navigations, p. 20-22, a cherché le point d’arrivée de la flottille dans l’une des rades accessibles, que signale le Périple de la mer Erythrée, § 8-11, dans Mùller, Geographi Grseci minores, t. i, édit. Didot, p. 265-266, et il a songé à la rivière de l’Eléphant dont l’Ouadi, « situé entre le Ras el-Fil (cap Elephas) et le cap Guardafui, paraît avoir été assez considérable pour que des navires d’un faible tirant d’eau pussent y pénétrer et même y évoluer à leur aise. C'était là, et là seulement, qu'à l'époque romaine on recueillait la meilleure qualité d’encens ; c’est là probablement que les Égyptiens d’Hatchopsitou atterrirent. Ils remontèrent le fleuve jusqu'à l’endroit où le flux et le reflux ne se faisaient plus sentir, et ils mouillèrent en face d’un village épars sur la rive, au milieu des sycomores et des palmiers. » Histoire de l’Orient classique, t. ii, 1897, p. 245-248 et notes. Ils auraient donc été en pleine côte des Somalis, dans la région des Aromates des Anciens. Cf. Geograph. Grseci minores, Tabulée, pars prima, tab. xii. Naville ne pense pas autrement que Maspero. Cf. The tomb of Hatchopsîtû, Londres, 1906, p. 26, 27, 30, 31. Le même auteur, p. 25, fait une remarque qui vaut d'être notée : « J’estime une erreur, dit-il, de considérer le nom de Punt comme s’appliquant à un territoire aux limites définies, soit à un État ou royaume, soit à un groupe d'États. C'était une vague appellation géographique embrassant un pays d’une vaste étendue, le ressort de plusieurs nations de races diverses, sans aucun lien entre elles. » Il juge même, loc. cit., p. 26, que l’appellation s'étendait à la côte Arabique de la mer Rouge. Aux gens de Punt vivaient plus ou moins mêlées les tribus chamitiques du désert, celles principalement qu’on appela plus tard les Troglodytes et les Ichtyophages (les Ababdéhs et les Bicharis de nos jours), les Bedjas qu’on dit les descendants des Blemyes, les Sahos et les Afars de la côte Abyssine, les Somalis et les Gallas. Plus avancés dans les terres, touchant même au Nil et occupant les vallées de l’est à la hauteur de la deuxième cataracte, disséminés vraisemblablement jusqu'à l’Atbara, étaient contigus au pays de Punt les Mazaiou qui fournirent de tout temps à l’Egypte de solides et nombreux contingents et dont le nom finit par devenir synonyme de soldats. Cf. le copte AA&.TOI. Le nom de Punt couvrit vaguement toutes ces régions. C’est pourquoi, sous le nom de Pût-Punt, les Prophètes purent désigner les mercenaires que plusieurs de ces contrées envoyaient à l’Egypte. — D’autre part, les Égyptiens ne connaissaient de Punt que quelques points, surtout les stations côtières qui étaient des entrepôts pour les produits de l’intérieur. Sur cet intérieur, ils n’avaient que de vagues idées, et l’on s’explique que d’après leurs données obscures les savants aient d’abord divergé beaucoup dans la maniéré de situer la Terre divine, qu’ils l’aient même étendue à la côte asiatique de la mer Rouge, à l’Yémen et à l’Hadramaut. Pour la bibliographie des opinions diverses ou succès-