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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome V.djvu/308

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PREMIER-NE


5° En conséquence de cette préservation, Dieu veut que tous les premiers-nés lui soient consacrés, comme lui appartenant. Exod., xiii, 2, 12 ; xxii, 29. Il indique lui-même la raison de cette consécration. Le père doit en effet dire à son fils : » Comme le pharaon s’obstinait à ne point nous laisser aller, Jéhovah fit mourir tous les premiers-nés dans le pays d’Egypte, depuis les premiers-nés des hommes jusqu’aux premiers-nés des animaux. Voilà pourquoi j’oflïe en sacrifice à Jéhovah tout mâle premier-né et je rachète tout premier-né de mes fils. » Exod., xiii, 15-16. Le texte sacré ajoute que l’Israélite ne devra jamais perdre de vue le sens de cette consécration et que ce souvenir sera pour lui comme un signe sur la main et un bandeau entre les yeux. — 6° En principe, les premiers-nés étaient ainsi réservés pour le service de Dieu. C’était en effet, dans les anciens temps, la prérogative du chef de famille et, après lui, de son premier-né, d’exercer le sacerdoce. Voir 1. 1, col. 318. Mais il plut à Dieu d’organiser le culte autrement chez le peuple qu’il se choisissait. Il formula ainsi sa volonté : « J’ai pris les lévites du milieu des enfants d’Israël, à la place de chaque premier-né qui ouvre le sein de sa mère parmi les enfants d’Israël, et les lévites sont à moi ; le jour où j’ai frappé tous les premiers-nés dans le pays d’Egypte, je me suis consacré tout premier-né en Israël. » Num., iii, 12, 13, 40-50 ; vin, 16. Les lévites sont donc désignés par Dieu pour remplir auprès de lui les fonctions cultuelles précédemment dévolues au père et à l’aîné de la famille. — 7° Comme les premiers-nés appartiennent à Dieu et que cependant Dieu n’a pas le dessein de les utiliser pour son service particulier, la liberté leur sera laissée moyennant rachat. Tout premier-né doit donc être racheté, et l’Israélite qui le reprend au Seigneur ne doit pas se présenter les mains vides. Exod., xxxiv, 20. Un mois après sa naissance, le premier-né tombe sous la loi du rachat fixé à cinq sicles d’argent. Num., iii, 47 ; xviii, 15-16. — 8° Pour qu’un premier-né fût soumis à la loi, il devait être à la fois un garçon et le premier enfant de sa mère. Un garçon né après une ou plusieurs sœurs n’était pas pétér réftém, « ouvrant le sein » de la mère. Exod., xiii, 2. Cette expression du texte sacré montre qu’il s’agit bien du premier fils de la mère, et non du premier fils du père. Ce premier-né pouvait n’avoir pas le droit d’aînesse, si le père avait eu déjà d’autres enfants d’une autre épouse. Réciproquement, un père pouvait avoir plusieurs premiers-nés d’épouses différentes. Voir t. i, col. 317. Il n’y avait pourtant pas de premier-né dans toutes les familles. Dans le recensement que Moïse fit au désert, on trouva 22273 premiers-nés d’un mois et au-dessus, sur 603550 Israélites de vingt-ans et au-dessus, Num., i, 45 ; iii, 43, soit un premier-né sur 27 hommes, et encore parmi ces derniers ne sont pas comptés ceux qui ont d’un mois à vingt ans. Il s’agissait alors de substituer les lévites aux premiers-nés. Comme il n’y avait que 20000 lévites, les 273 premiers-nés qui ne pouvaient être remplacés furent rachetés chacun au prix de cinq sicles. Num., iii, 40-50. Le rachat fut ensuite imposé à tous les premiersnés, sans qu’il fût tenu compte de leur remplacement par les lévites. Num., xviii, 15. Les prêtres et les lévites n’étaient pas assujettis à cette loi, puisque tous ils devaient consacrer leur vie au service du Seigneur.

— 9° Le prix du^ rachat était uniformément de cinq sicles, pour les riches comme pour les pauvres. Cf. Philon, De prœmiis sacerdotum, 1, édit. Mangey, t. ii, p. 233. Ce prix appartenait au prêtre, Num, , xviii, 15, sans doute en tant que remplaçant du premier-né. La loi n’obligeait nullement à présenter le premier-né au Temple. Cependant, après la captivité, on paraît avoir pris l’habitude de cette démarche. II Esd., x, 36. On profitait pour cela de la visite que la mère avait à y faire après la naissance d’un enfant, Lev.,

xii, 2-8 ; mais rien de particulier n’était prescrit au sujet de ce dernier. La Sainte Vierge se conforma à l’usage des pieux Israélites en ce qui concernait la présentation du divin Enfant. Le trentième jour après la naissance, elle avait remis ou fait remettre au prêtre les cinq sicles d’argent (environ 17 fr. 50, voir t. iv, col. 1254) imposés par la Loi. Num., xviii, 16. Quand elle vint au Temple, après les quarante jours de réclusion qui lui étaient prescrits, Lev., xii, 2-4, elle et Joseph eurent l’intention de présenter l’Enfant au Seigneur. Luc, ii, 22. Les deux oiseaux offerts à cette occasion étaient destinés au sacrifice de purification pour la mère, et non au rachat de l’Enfant, comme on le dit quelquefois à tort. Cf. Bossuet, Serm. pour la Purification, 1658, 2e part. ; Elév. sur les myst., xviiie serm., iv, Bar-le-Duc, 1870, t. vii, p. 233 ; t. viii, p. 508. Bossuet peut s’appuyer sur la liturgie de la fête de la Purification, qui répète plusieurs fois : obtulerunt pro eo par turlurum. Cette allégation liturgique est conforme à l’interprétation du texte du Lévitique, xii, 6, par saint Augustin, In Heptat., iii, 40, t. xxxiv, col. 695-696. Mais le saint Docteur n’explique ainsi le texte que par suite d’une ponctuation défectueuse. — 10° Les juifs restèrent fidèles à l’accomplissement de cette loi, même après la destruction du Temple. Le trente-et-unième jour après la naissance du premierné, ils invitaient le prêtre à un festin et lui versaient les cinq sicles. Ce festin se célébrait même un jour de jeûne, mais se remettait au lendemain si le trente-etunième jour coïncidait avec le sabbat. Si le père mourait avant cette date, la mère n’était pas obligée de racheter l’enfant. Elle lui mettait au cou une petite plaque portant les mots : bekôr sélô’nipdàh, « premierné non racheté », et lui-même se rachetait une fois adulte. Les filles de prêtres et de lévites, mariées à de simples Israélites, étaient, comme leurs pères, exemptes de l’obligation du rachat. Cf. Iken, Antiquitateshebraicm, Brème, 1741, p. 516. — 11° Jésus est appelé le « premier-né » de Marie. Matth., i, 25 ; Luc, ii, 17 ; Heb., i, 6. L’enfant premier-né était en effet bekôr tout en restant fils unique. Zacharie, xii, 10, met en parallèle le yâlyid, « fils unique », et le bekôr. — La Sagesse est « première-née avant toute créature, » d’après une addition de la Vulgate, Eccli., xxiv, 5, et le Verbe incarné est « né avant toute créature, » Col., i, 15, le premierné d’un grand nombre de frères, Rom., viii, 29, enfants par adoption d’un Père dont il est fils par nature, et, par sa résurrection glorieuse, « premier-né d’entre les morts. » Apoc, i, 5.

II. Les premiers-nés des animaux. — l°Dès l’origine, les premiers-nés des animaux ont été considérés comme ayant une valeur plus grande. Deut., xxxiii, 17. Déjà Abel offrait au Seigneur les premiers-nés de son troupeau. Gen., iv, 4. — 2° À la dixième plaie d’Egypte, les premiers-nés du bétail furent frappés comme ceux des hommes. Exod., xi, 5 ; xii, 29. Aussi, en retour, Dieu voulut-il que les premiers-nés des animaux lui fussent réservés. Exod., xiii, 2 ; Num., iii, 13. — 3° Les mâles premiers-nés des animaux devaient être immolés, comme appartenant à Jéhovah. Le premier-né de l’âne pouvait cependant être racheté pour un agneau et à défaut de rachat, on devait lui briser la nuque. Exod., xiii, 13 ; xxxiv, 20. L’âne était l’objet de cette exception à cause de sa grande utilité pour les Israélites. Voir Ane, t. i, col. 566. On rachetait également les premiers-nés des animaux impurs et le prix en revenait aux prêtres ; mais on immolait les premiers nés du bœuf, de la brebis et de la chèvre. Num., xviii, 15-18. Ces derniers devaient être amenés au sanctuaire, Deut., xii, 6, et c’est là seulement que les prêtres et les lévites pouvaient manger la part qui leur en revenait. Deut., xii, 17, 18 ; xiv, 23. Il était défendu de faire travailler le premier-né du bœuf et de tondre le premier-né de la brebis. Si le pre-