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PENTATEUQUE


de départ de sa détermination esl le fait de la découverte de ce livre au Temple de Jérusalem, à la 18e année du règne de Josias. II Beg., xxii, 3-xxm, 23. Quelques critiques français ont dénié toute valeur historique au récit de ce fait et prétendu qu’il avait été fabriqué d’après le Deutéronome, dont ils rabaissaient la publication après le retour de la captivité, sinon même sous la domination perse. L. Havet, Le christianisme et ses origines, Paris, 1878, t. iii, p. 137-157 ; G. d’Eichthal, Éludes sur le Deutéronome, dans ses Mélanges de critique biblique, Va.rs, 1886, p. 85-108 ; Hoort, Études sur le Deutéronome, dans la Revue de l’histoire des religions, 1888, t. xyii, p. 11-22 ; t. xviii, p. 320-334 ; M. Vernes, Une nouvelle hypothèse sur la composition du Pentateuque. Examen des vues de M. G. d’Eichthal, Paris, 1887 ; Précis d’histoire juive, Paris, 1889, p. 795. Mais la vérité historique du récit est démontrée, cf. Piepenbring, La réforme et le code de Josias, dans la Revue de l’histoire des religions, t. xxix, et admise, pour le fond au moins, par tous les critiques. Ils en concluent que D 1 est antérieure 621, puisqu’il a été retrouvé cette année-là. Mais le désaccord le plus profond règne sur la date précise de sa composition. La plupart des critiques de l'école de Wellhausen ne la remontent guère avant 621. Selon eux, la trouvaille n’a été ni fortuite ni imprévue ; elle a été préméditée et faite en vue de réaliser une réforme religieuse. Le livre avait donc été rédigé dans ce dessein, caché et présenté comme l'œuvre de Moïse. Du reste, il apparaît comme un compromis entre le parti prophétique et le parti sacerdotal ou, au moins, comme le programme religieux et politique du parti prophétique du temps. Mais si le code avait été fabriqué en vue de la réforme, il ne devrait contenir que les lois propres à amener la réforme. Or il comprend beaucoup d’ordonnances qui n’ont aucun rapport à ce projet. Cf. P. Martin, De l’origine du Pentateuque (lithog.), Paris, 1887-1888, t. ir, p. 243-270. Aussi Cornill et Bertholet tiennent-ils le Deutéronome pour un produit et un résumé de l’enseignement des prophètes, comme un précipité et une cristallisation de leurs vues. Colenso et Renan en attribuaient la paternité au prophète Jérémie. Mais les critiques pensent plutôt que Jérémie a connu le Deutéronome, dont il a partiellement pris l’esprit et imité le style. Voir t. iii, col. 1278. Pour quelques-uns, le livre serait pourtant du temps de ce prophète. D’autres, rejetant l’hypothèse d’une fraude et de la fabrication intentionnelle du Deutéronome, pensent que ce code a été réellement perdu de vue à la fin du VIIIe siècle et qu’il aurait été rédigé au cours de ce siècle sous les règnes d'Ézéchias ou de Manassé. Pour exclure le temps d'Ézéchias, plusieurs constatent l’absence de points de contact et d’affinité entre le Deutéronome et le prophète Isaïe, contemporain et conseiller de ce roi. Le Deutéronome tend plutôt à réaliser les vues d’Osée et d’Isaïe. On y voit dès lors un programme de réforme religieuse élaboré sous le long règne de Manassé par réaction contre l’idolâtrie introduite par ce roi en Juda. Voir t. iv, col. 642. Quelques-uns néanmoins ont pensé à la réforme d'Ézéchias, II Reg., xviii, 4-6, quoique, en dehors de la suppression des hauts-lieux, elle ne présente aucun caractère deutéronomiste. Voir t. ii, col. 2142-2144. Klostermann a reconnu le Deutéronome dans le livre lu au peuple sous Josaphat. II Par., xvzi, 9. Mais ce pieux roi n’a pas détruit les hauts-lieux, I Reg., xxii, 44 ; aussi d’autres critiques pensent-ils que le livre de l’alliance fut 2a règle de sa réforme. Voir t. iii, col. 1648. Kleinert rapportait le Deutéronome à la fin de l'époque des Juges.

d) Le code sacerdotal, P. — C’est l’ancien élohiste ou premier élohiste ou encore le Grundschrift, nommé enfin par Wellhausen Priestercodex (d’où le sigle P) ou

  • code sacerdotal », parce qu’il contenait la législation

sacerdotale et rituelle des livres du milieu. Cette dénomination ne convient qu'à la partie principale du document, qui est à la fois un livre historique et un code ; elle a été néanmoins adoptée. Ce document, qui a fourni au dernier rédacteur le cadre de l’Hexateuque, a été conservé en entier, sauf de rares lacunes ; aussi, reconstitué à part, forme-t-il un tout suivi et coordonné. On attribue à son auteur la division de la Genèse en tôldôt, ou tableaux généalogiques. Voici la part qui lui revient dans la Genèse : i, 1-n, 4a ; v, 1-28, 30-32 ; vi, 9-22 ; vii, 6, 11, 13-16 a, 18-21, 24 ; viii, l-2a, 3b-5, 13a, 14-19 ; ix, 1-17, 28, 29 ; x, 1-7, 20, 22, 23, 31, 32 ; xi, 10-27, 31, 32 ; xii, 46, 5 ; xiii, 6, U6-12a ; xvi, la, 3, 15, 16 ; xvii ; xix, 29 ; xxi, 16, 26-5 ; xxm ; xxv, 7-lla, 12-17, 19, 20, 266 ; xxvi, 34, 35 ; xxvii, 46xxvih, 9 ; xxix, 24, 29 ; xxxi, 18 6 ; xxxiii, 18a ; xxxiv, 1, 2a, 4, 6, 8-10, 13-18, 20-21, 27-29 ; xxxv, 9-13, 15, 226xxxvii, 2a ; xlvi, 5b-27 ; xlvii, 7-11, 27 6, 28 ; XLvni, 3-7 ; xlîx, la, 286-33 ; L, 12, 13. Dans la suite, Exod.. i, 1-5, 7, 13, 14 ; ii, 236-25 ; vi, 2-vn, 13, 19, 20a, 216, 22 ; viii, 1-3, 116-15 ; ]x, 8-12 ; xi, 9-xii, 20, 28, 37a, 40-xm, 2 ; xiv, 1-4, 8, 9, 15-18, 21a, 21c-23, 26, 27a, 28, 29 ; xvi, 1-3, ô-xvii, la ; xix, l, 2a ; xxiv, 1, 2, 15618a ; xxv, l-xxxi, 18a ; xxxiv, 29. — Num., x, 28(y compris le Lévitique) ; xiii, 1-17 a, 21, 25, 26a, 32a ; xiv, 1, 2, 5-7, 10, 26-30, 34-38 ; xv, 1-xvi, la, 26-11, 16-24, 27a, 326, 35-xx, la, 2, 36, 4, 6-13, 22-29 ; xxi, 4a, 10, 11 ; xxii, 1 ; xxv, 6-xxxi, 54 ; xxxii, 18, 19, 28-33 ; xxxiii, 1-xxxvi, 13 ; Deut., iv, 4143 ; xxxii, 48-52 ; xxiv, la. Le récit de P se poursuivait dans le livre de Josué. S’il fournissait peu de détails sur la conquête, il était plus étendu sur le partage du pays de Chanaan.

Dans ce document, la législation est plus développée que l’histoire ; celle-ci, d’ailleurs, n’est que le cadre historique des institutions religieuses d’Israël. Elle remonte jusqu’aux origines et présente les premiers temps de l’humanité comme les débuts du peuple théocratique, dont l’institution commence à la sortie d’Egypte. Elle n’est pas très détaillée : les événements principaux sont longuement racontés ; mais pour les faits intermédiaires, l’auteur procède par tableaux généalogiques ou se borne à indiquer les stations d’Israël au désert. La préparation de l’histoire de Moïse comprend trois alliances de Dieu avec Adam, Noé et Abraham. Si on y joint l’histoire de Moïse, qui rapporte l’alliance du Sinaï, le code se divise en quatre périodes, , qui lui ont fait donner par Wellhausen le nom de Vierbundesbuch, « le livre des quatrealliances. » La quatrième alliance embrasse toute la législation mosaïque. Celle-ci est essentiellement sacerdotale et rituelle, et elle a pour but d'établir le peuple saint par excellence (hiérocratie) et la société religieuse en Israël. Voir t. iv, col. 330-332. Bien que le code sacerdotal règle principalement les manifestations extérieures du culte, il n’exclut pas les lois morales, dont il suppose l’observation exacte. Sa terminologie est très nettement caractérisée, et elle comprend naturellement de nombreuses expressions techniques qui désignent les choses du culte. L’auteur répète souvent les mêmes formules dans ses récits aussi bien que dans ses recueils de lois. Quelques-unes sont stéréotypées. Il a le souci de l’exactitude et de la précision, mais il tombe dans la prolixité. Son style est peu imagé, et sa langue est abstraite.

Le code sacerdotal était lui-même une compilation. L’enchaînement des matériaux paraît brisé par de longues additions intercalées ; certaines lois sont répétées ; quelques dispositions sont divergentes. Tous les morceaux cependant ont le même esprit, le même caractère général et le même style ; s’ils viennent de la même école, ils ne sont pas de la même main. Aussi les critiques ont-ils distingué dans le code trois couches différentes : a) un écrit historique et législatif, appelé priesterliche Grundschrift, « l'écrit fondamental sacer-