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PENTATEUQUE


dotal, » P 1 ou Ps, parce qu’il fait le fond du code ; p) un recueil particulier des lois, que Klostermann a nommé Heiligeitsge$elz, « loi de sainteté, » H, P 2 ou P*>, Lev, , xvii-xxvi, parce qu’il traite spécialement de la sainteté lévitique, code plus ancien (contemporain d'Ézéchiel, ou un peu postérieur, sinon même, selon quelques-uns, l'œuvre de ce prophète), incorporé postérieurement dans l'écrit fondamental sacerdotal ; yj des parties secondaires, P 3, P*, P », selon Jïuenen, P s ou P 1 selon d’autres critiques, retouches et additions qui proviendraient peut-être de couches superposées et seraient l'œuvre d’nne école plutôt que d’une seule main. Bertholet et Bæntsch ont distingué, en outre, deux recueils de lois : a) un rituel de sacrifices, Opferthora, P », Lev., i-vh ; p) des préceptes ; relatifs à la 'pureté légale, Reinheitsvorschriflen, V', Lev., xi-xv, qui auraient été insérés dans HPg réunis, avant que le travail de P s ait commencé.

Selon les partisans de la première hypothèse documentaire, le Grtmdschrift, qui correspond presque entièrement au code sacerdotal, passait pour la partie la plus ancienne du Pentateuque. C'était le livre du mosaïsme, le document qui reflétait le mieux l’esprit de Moïse, son auteur. Quelques critiques cependant, tels queC. Bruslon, Vhistoiresacerdotaleel le Deutéronome primitif, Paris, 1906, et A. Dillmann, Uebsr die Composition des Heocateuch, dans Die Bûcher Numeri, Deuteronomium und Josua, 2e édit., Leipzig, 1886, tiennent le code pour antérieur au Deutéronome et placent sa composition au moins au milieu du vin » siècle, à une époque où les deux royaumes de Juda et d’Israël étaient encore puissants. Le comte de Baudissin rabaisse sa date vers la moitié du vne siècle. Vie Geschichte der alttestamentlichen Priesterthums, 1889 ; Einleitung in die Bûcher des A. T., Leipzig, 1901. Mais la plupart des critiques font du code sacerdotal le document le plus récent qui soit entré dans la composition de l’Hexateuque. Ils prétendent qu’aucun des livres bibliques, rédigés avant ou pendant la captivité, n’a connu la législation si compliquée de ce code. Les institutions religieuses ou les pratiques rituelles, que signalent ces livres, prouvent bien l’existence d’un culte organisé ; mais elles n’ont point de rapport avec le rituel minutieux de P. Quelques-unes même, telles que l’offrande des sacrifices en tout lieu, et par d’autres personnes que pav des çrêVres, sont opposées aux prescriptions formelles du code et en particulier à la concentration du culte qu’il règle et sanctionne. Si le code existait, on le violait sans scrupule, et les historiens sacrés n’ont pas un mot de blâme pour ces violations de la loi. Ce silence s’explique par la non-existence du code, animé, d’ailleurs, d’un autre esprit que celui qui. se manifeste dans ces livres. Les premiers rapprochements de fond et de forme avec le code se remarquent dans Jérémie ; mais la ressemblance, lorsqu’elle existe, n’est pas complète, et il est plus vraisemblable que l’auteur du code a fait des emprunts au prophète. Il en est de même, dit-on, avec Ézéchiel. Pour ne parler que du nouveau culte organisé par ce prophète, xliv, 10-xlvi, 15, il tient, sous le l’apport du sacerdoce, des fêtes et des sacrifices, le milieu entre D et P, puisque ses descriptions sont plus détaillées que celles du Deutéronome et plus simples que celles du code. Il en résulte que le programme du prophète, rédigé en 573 ou 572, voir t. ii, col. 2152, est antérieur au code qui est plus complet et plus perfectionné. On a cherché à confirmer cette conclusion par l'étude de la langue de P, qui serait plus récente et contiendrait des aramaïsmes. Mais de bons juges, Driver, Journal of phïlology, t. xi, p. 201-236 ; Einleitung, p. 145-146, 168-170, ont reconnu qu’on n’en pouvait rien conclure .au sujet de l'âge du code. Quant à la date précise de sa rédaction, au moins pour Pa, l’accord n’est pas fait.

Les disciples de Wellhausen la fixent après le retour de la captivité. Certains indices, tirés du contenu du livre, la comparaison du code avec la législation religieuse d'Ézéchiel et avec les prophètes qui ont suivi ce retour, tendent, à leur jugement, à reporter le code après le retour des Juifs à Jérusalem. Esdras en particulier aurait lu au peuple le code sacerdotal, II Esd., IX, 1-x, 39, qu’il avait apporté de Babylonie et dont il serait, sinon l’auteur unique, du moins le principal inspirateur. Cf. G. Wildeboer, De la formation du canon de l’A. T., trad. franc., p. 78-79. Donc Pa a été composé au plus tôt à la fin de la captivité à Babylone, sinon même en Palestine après le retour. Mais les critiques qui pensent avec raison qu’Esdras a lu au peuple le Peutateuque entier, voir col. 69, estiment que ! e code avait été rédigé antérieurement, après Ézéchiel, mais avant le retour des premiers captifs (536).

Si le code est de date si tardive, à quelles sources ont été puisés les matériaux mis en œuvre ? Tous les critiques reconnaissent que, pour ses récits historiques, l’auteur dépend de J et de E, probablement déjà combinés. Il en a extrait des tableaux généalogiques et son schème historique jusqu'à la sortie d’Egypte ; mais, selon les disciples de Wellhausen, il a manipulé les matériaux employés conformément à son but et à son plan. Holzinger, Einleitung in den Hexateuch, Fribeurgen-Brisgau, 1893, p. 358-376. Dillmann et Driver pensent toutefois que l’auteur a recouru à d’autres sources historiques que JE ; qu’il n’a pas inventé les faits qu’il est seul à rapporter et qu’il n’a pas non plus falsifié de parti-pris la tradition israélite. Quant à la législation spéciale de P, l'école de "Wellhausen la regarde comme la constitution a priori de la hiérocratie juive, tracée pour servir de règle à la restauration religieuse qui suivit le retour à Jérusalem, projetée dans le passé et attribuée à Moïse. Mais d’autres critiques pensent que les auteurs du code n’ont pas créé de toutes pièces leur système liturgique, qu’ils y ont introduit un grand nombre d'éléments empruntés au culte ancien et qu’ils ont ordonné systématiquement les usages préexistants en les développant et en les adaptant à une situation nouve^e. La tradition orale fut codifiée à l’aide sans doute de règlements écrits avant la captivité.

e) Les rédacteurs et la composition définitive. — Ces. quatre documents, qui sont entrés dans la trame de l’Hexateuque, n’ont pas été mêlés et combinés par une seule main ; plusieurs rédacteurs y ont travaillé et, à en croire les critiques, sauf Dillmann qui a un système spécial, la rédaction du texte actuel a passé par trois stades principaux : a) Un premier rédacteur jéhoviste, Rie ou Ri, a combiné J et E, en les remaniant pour les harmoniser et les adapter au point de vue prophétique, à l'époque deutéronomiste, avant ou plus ou moins longtemps après la rédaction du Deutéronome. — P) Quand le Deutéronome eut été complètement achevé, c’est-à-dire pendant la captivité (vie siècle), un rédacteur animé du même esprit que ce livre R d, incorpora D à JE, en faisant subir à ce dernier quelques modifications nécessaires pour accorder ses récits avec la loi deutéronomique. Probablement même, plusieurs écrivains de la même école travaillèrent à cette rédaction. — Y) Un dernier rédacteur, pénétré de l’esprit et de la lettre du code, Rp, combine JED avec P, en retouchant les deux écrits pour les raccorder. Le nombre et l'étendue des retouches, la nature des remaniements ne sont pas déterminés avec certitude. La table des peuples, Gen., xiv, quelle que soit sa date, aurait étéintroduite alors pour la première fois dans le Pentateuque. Selon Kuenen, la division en cinq livres aurait été faite par ce rédacteur, qui est le dernier et définitif rédacteur du Pentateuque. Ce travail, œuvre d’une école de scribes plutôt que d’un seul individu, serait,