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PENTECÔTE


récolté en terre israélite. Sur le soir de la Pentecôte, ou, si le jour suivant était le sabbat, après la fin du sabbat, on achetait aux frais du trésor trois mesures de froment, on les passait à la meule et ensuite à travers douze cribles. On retirait deux dixièmes d'éphi de farine, on y ajoutait de l’eau chaude et du levain et l’on confectionnait les deux pains. Ils devaient avoir sept palmes de long, sept palmes de large et, aux extrémités, des cornes de quatre doigts. Le matin du jour suivant, à la suite des sacrifices publics, on offrait les deux pains à l’est du parvis intérieur, mais on ne les portait pas jusqu'à l’autel, à cause du levain qu’ils renfermaient. L’un des deux pains était ensuite donné au grand-prêtre, s’il le voulait ; l’autre se partageait entre les prêtres, qui le mangeaient dans le Temple. Ces deux pains constituaient des prémices. À partir de leur présentation, il était permis d’apporter au Temple des offrandes provenant des récoltes de l’année. Gf. Menachoth, xi, 9 ; Erachin, ii, 2. — Sur le cérémonial suivi pour présenter les prémices au Temple, voir Prémices. — 4. Après l’offrande des différents sacrifices prescrits, le peuple était invité à se réjouir dans des festins, auxquels on invitait les lévites et tous ceux qui vivaient dans l’entourage du chef de la famille. Deut., xvi, 11. — 5. La fête de la Pentecôte était célébrée partout par les Israélites, même hors de Jérusalem et de la Palestine. Tob., ii, 1 (texte grec). On omettait alors naturellement ce qui était spécial à la liturgie du Temple. Judas Machabée rentra à Jérusalem avec son armée victorieuse pour célébrer la fête des semaines ou Pentecôte. II Mach., xii, 30. La Pentecôte qui suivit la résurrection de Notre-Seigneur avait amené à Jérusalem « . des hommes pieux de toutes les nations qui sont sous le ciel », c’est-à-dire des divers pays ensuite énumérés. Act., ii, 5-11. Du temps de saint Paul, on fêtait encore la Pentecôte à Éphèse. I Cor., xvi, 8. — Cf. Reland, Antiquitates sacrai, Utrecht, 1741, p. 237-240 ; Iken, Antiquitates hebraicæ, Brème, 1741, p. 316-319.

4° La Pentecôte et la loi du Sinaï. — 1. Partis de l’Egypte le quinzième jour du premier mois, Exod., xii, 26-34, les Hébreux arrivèrent au Sinaï le premier jour du troisième mois, Exod., xix, 1, et trois jours après, Exod., xix, 16, Dieu commença à manifester sa présence sur le Sinaï, par des nuées, des éclairs et des tonnerres. Il s'écoula donc quarante-huit ou quaranteneuf jours entre la Pâque d’Egypte et la promulgation de la Loi au Sinaï. Malgré cette coïncidence entre la promulgation de la Loi et la fête de la Pentecôte, les textes qui prescrivent la célébration de la fête ne font jamais allusion aux événements du Sinaï, et même, dans le rituel mosaïque, rien n’est destiné à commémorer ces événements. Philon et Josèphe n'établissent nulle part aucune corrélation entre la fête et le don de la Loi. La promulgation de la Loi nouvelle à la fête de la Pentecôte donna probablement aux chrétiens l’idée de rattacher à la même fête le souvenir de la promulgation du Sinaï. Saint Jérôme, Ep., lxxviii, 12, ad Fabiol., t. xxii, col. 707, établit la coïncidence entre l'événement du Sinaï et la Pentecôte, qui en célèbre le souvenir. Saint Augustin, Cont. Faust., xxxii, 12, t. xlii, col. 503, affirme la même relation et voit dans la promulgation de la Loi au Sinaï la figure de la descente du Saint-Esprit à la Pentecôte. Saint Léon, De Pentecost., serm. l, t. liv, col. 400, pense comme les précédents. Les auteurs juifs postérieurs ne connaissent pas plus que leurs anciens la célébration d’une fête pour rappeler la manifestation du Sinaï. Ils admettent la coïncidence signalée par saint Jérôme. « La fête des semaines est le jour où la Loi "fut donnée. Ce qui constitue l’honneur de ce jour, c’est que sa date dépend de la fête solennelle précédente, la Pâque. » Maimonide, More nevochim, iii, 41.

Mais ils ajoutent : « La Loi divine n’a pas besoin d’un jour saint dans lequel on rappelle avec honneur son souvenir. Le motif de la fête des semaines est le commencement de la moisson du froment… Il est indiscutable que la Loi a été donnée le jour de la fête des semaines, mais il n’a pas été institué de fête pour la rappeler. » Abarbanel, In Leg., ꝟ. 262. Cependant, les auteurs juifs plus modernes n’hésitent pas à attribuer à la Pentecôte un sens historique et à célébrer ce jour-là la promulgation de la Loi. Cf. Munk, Palestine, Paris, 1881, p. 188. Pour beaucoup même, cette idée devient d’autant plus prééminente que l’objet primitif de la fête a moins de raison d'être dans les pays où ils vivent dispersés. Dans l’enseignement populaire, on s’exprime ainsi : « La Pentecôte ou fête des semaines est célébrée le cinquantième jour à compter du second jour de la Pâque, le six du mois de sivan (troisième mois). C’est l’anniversaire de la promulgation de la loi sur le mont Sinaï. Cette fête dure deux jours. » Wogue, Catéchisme, Paris, 1872, p. 59.

5° Symbolisme de la fête. — 1. La Pentecôte consacre solennellement la fin de la moisson, qui avait été inaugurée le lendemain de la Pâque. Elle est ainsi comme une suite de la solennité précédente, de laquelle elle dépend par sa date. Elle rappelait à l’Israélite que le Dieu qui l’avait tiré de la servitude d’igypte avait promis de le conduire « dans une terre fertile et spacieuse, dans une terre où coulent le lait et le miel », Exod., iii, 8, que ce Dieu avait tenu sa promesse, et que chaque année il donnait à son peuple l’abondance des moissons et des bénédictions terrestres. C'était donc une fête d’actions de grâces. — 2. La caractéristique de la fête consistait dans l’offrande de deux pains levés. À la Pâque, on avait offert les prémices d’une moisson qui commençait, mais qu’on ne pouvait guère encore utiliser pour l’alimentation de l’homme. À la Pentecôte, la moisson se terminait et l’on pouvait en présenter à Dieu le résultat définitif^ tel que l’industrie humaine le traitait pour l’approprier à la nourriture. On apportait au sanctuaire deux pains levés, mais par respect pour la loi qui ne permettait pas l’introduction du levain dans le culte du Seigneur, voiv Levmn, col. 198, ou ne es offrait pas sur l’autel. — 3. Les pains, au nombre de deux, n'étaient sans doute pas sans rapport avec les deux jours de fête dont l’un commençait et l’autre terminait le temps de la moisson ; les deux jeunes taureaux ou les deux béliers représentent la même idée, tandis que les sept agneaux se rapportaient aux sept semaines du temps de la moisson. Le jeune taureau ou le bélier, seul de son espèce, pouvait rappeler l’idée du Dieu unique auquel était offert l’holocauste. Cf. Bàhr, Symbolik des mosaischen Cultus, Heidelberg, 1839, t. ii, p. 645-652.

6° La Pentecôte du Nouveau Testament. — 1. C’est le jour même de la Pentecôte juive, à la troisième heure, c’est-à-dire vers neuf heures du matin, que le Saint-Esprit descendit sur les Apôtres et les disciples rassemblés au nombre de cent vingt. Act., Il, 15. Desphénomènes extérieurs analogues à ceux du Sinaï signalèrent sa venue et furent remarqués par la multitude qui se trouvait dans la ville. Act., ii, 6. Le Saint-Esprit apparut sous forme de langues de feu. Voir Langue, t. iv, col. 74. Il communiqua aux Apôtres le don des langues. Voir Langues (Don des), t. iv, col. 74-81. — 2. L’ancienne Pentecôte était la fête de la moisson ; avec la nouvelle commence la moisson évangélique, et dès le jour même saint Pierre fait une récolte d’environ trois mille âmes. Act., ii, 41. La Loi nouvelle est promulguée ce jour-là, cinquante jour* après la rédemption, comme l’avait été jadis la loi du Sinaï, cinquante jours après la délivrance de la servitude d’Egypte. C’est ce qui fait dire à saint Jérôme, Epist. lxxviii, 12, ad Fabiol., t. xxil, col. 707, qu' « on.