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n'eiiii>*LlLa pas les duels ; ils prirent môme bientôt un nouveau dévtlo|ipiiiitnt. Ainsi, nouvelles défenses en 1609, 161 1, 1G13, qui constatent presque toutes dans leurs prdambules le résultat insignifiant et regrettable des dispositions antérieures. Kichelieu n’eut garde de laisser tomber des lois qui pouvaient si bien le servir dans le projet qu’il avait formé d’abaisser la noblesse ; et l’on vit successivement paraître l’editde (0 ?.3, les déclarations de 1624 et 1620, et le règlement de 1034. Parmi les nobles têtes que fit alors tomber pour duel la liaclie du bourreau, nous ne citerons que celle de François de Montmorency, comte de Bouteville. Sous Louis XIV la sévérité devint inouïe. Pendant la minorité de ce prince la noblesse avait perdu plus de quatre mille de ses membres ; il ne l’oublia pas quand il fut devenu le maître, et il dépassa les rigueurs de Ritliclicu même. On ne tint plus compte de l’issue du combat dans la condamnalion : la mort pour tous les coupables , leurs cliâleaux démolis, leurs futaies coupées, leur noblesse effacée, leur postérité stygmatisée rie roture et d’infamie et par-dessus tout, comme on l’a dit si bien, la disgrâce du grand roi, tel était le caractère cffrajant de cette législatiun dont l’exagération même prouve la colère et l’impuissance du législateur. Et cependant, ce nême souverain qui cliâliait les duellistes avec une telle rigueur ne savait i)as, au témoignage de son propre fils, se mettre lui-même au-dessus du préjugé commun, <> J’ai vu, a dit le comte de Toulouse, le feu roi bien sévère sur les duels ; mais en même temps si dans son régiment , qu’il approfondissait plus que les autres , un officier avait une querelle et ne s’en lirait pas . ;elon l’honneur mondain , il approuvait qu’on lui nt quitter le régiment. >■ Il y avait des compagnies de gendarmes où l’on ne recevait personne qui ne se lût battu au moins une fois, ou qui ne jurât de se battre dans l’anme. La fureur des duels se ralentit dans les dernières années du règne de Louis .XIV ; mais elle se ralluma presque aussi vive que jamais sous la régence, et Philippe d’Orléans avait bien aulre chose à faire qu’a s’en occuper. Louis XV, dès la première année de sa majorité , renouvela bs anciens édits par une déclaration en date du mois de février 1723. Mais celle iléclaration ne fut pas observée , et les duels ne diminuèrent pas. Les plus célèbres qui eurent lieu sous les dt^ux derniers règnes de l’ancienne monarchie furent ceux du marquis de Richelieu, du marqifis de Létorières, de Sainte-l’oix, du chevalier de Sai nt-Georges , du fameux chevalier d’Eon, et enfin celui du comte d’Artois (depuis Charles X) avec le duc de Bourbon-Condè (voyc ::, Tome V, p. 238). Avec la révolution commencèrent les duels politiques. Les plus célèbres depuis cette époque sont ceux de Charles de La met h et du duc de Castries , du baron Durand de Marcuil avec le comte Dolgorouki à Naples , du général Gourgaud et du comte P. de Ségur, à propos de yiiistoire de Russie de ce dernier, du colonel Pcpe avec M. de La inartinc,de Bugeaud et de Dulong, d’Armand Carrcl et de M. E. Girardin, de MM. Granier de Cassagiiac et Lacrosse, Dujarrier et Kosemond de Beauvalh>n , Clément Thomas et Arthur Bertrand , au sujet de la Légion d’Honneur, T hier s et Bixio, Proudhon et !•’. Pyat , etc.

Maigre le vœu énergiquement exprimé par un grand nombre de membres de l’ASfemblée constiluante , le pouvoir législatif ne se prononça pas pendant tout le cours de la révolution sur la question du duel. Lors de la rédaction du Code Pénal, le législateur, désespérant de changsr les mo’urs publiques, aflecta la même indifférence. « Quant au duel , dit Tieilhard , nous ne lui avons pas fait l’honneur de le nommer, u De cette absence complète de législation, il résulta que pendant près d’un demi-siècle le duel ne fui plus l’objet d’aucune poursuite. La cour de cassation décidait que la loi pénale éLiit muette sur le duel , et qu’elle ne pouvait être appliquée à l’homicide ou aux blessures qui eo étaient le résultai. De nombreux arrêts con-DUEL

sacrèrent alors cette doctrine , et décidèrent qu’il en serait référé au roi pour l’interprétation de la loi. De la de nombreux projets successivement présentés soit aux chambres les 14 février 1S29 et 11 mars 1830, sjit au conseil d’État en 1832, projets qui n’eurent point de résultats. Dès ce moment pourtant la cour de cassation reconnaissait que dans le cas de perfidie ou de déloyauté le duel retombait sous le coup de la pénalité établie pour l’homicide et les blessures volontaires. Mais en 1837, à la suite de plusieurs réquisitoires de M. Dupin atné , la cour abandonna tout à coup son ancienne doctrine, et depuis lors elle a décidé invariablement ijue l’homicide ou les blessures résultant du duel devaient être poursuivies et punies conformément aux dispositions générales du Code Pénal.

Or, qu’arrivc-t-il .’ Si l’un des adversaires a succombé dans la rencontre, l’accusé est traduit devant la cour d’assises pour meurtre commis avec prémédilation ou assassinat ; et comme il est sous le coup d’une condamnation capitale, le jury l’acquitte infailliblement ; si au contraire il n’y a eu que de simples blessures , ces blessures , au lieu d’être considérées comme des tentatives d’assassinat, sont prises pour ce qu’elles sont matériellement et considérées comme délit principal. L’accusé est traduit devant les tribunaux correctionnels, et ces tribunaux, placés sous le contrôle de la cour de cassation, condamnent invariablement. Si bien que l’intérêt du duelliste est d’augmenter autant que possible les charges qui s’élèvent contre lui : son acquittement est à ce prix. Assurément une législation qui amène de pareils rc’sultats est une législation vicieuse. A l’exemple de toutes les nations policées, qui ont une loi spéciale sur le duel, l’.^ngleterre, les États-Unis (oii cependant les rencontres sont si fréquentes), la Belgique, l’Autriche, la Prusse, l’Espagne, la Suède, le Portugal, la Russie, divers modes de répre.ssion ont été proposés en ces derniers temps contre le duel, et l’on serait en droit d’attendre de bons résultats de quelques-uns d’entre eux. L’.ssemblée législative, dans les derniers temps de son existence , avait même été saisie à ce sujet d’une proposition spéciale ; les événements du 2 décembre ont empêché qu’il y fût donné suite. W.-A. Dicrett. La question du duel a toujours occupé une grande place dans les esprits, elle en a même occupé dans la législation ; et si les lois ont toujours été impuissantes à le réprimer, c’est peut-être parce qu’on a cherché la répression dans la chose <|ue les dueUistes redoutent le moins, la peine de mort. En effet, le duelliste fait le sacrifice de sa vie , il croit devoir s’en honorer, et lepu^ugélui fait croire qu’il perdrait son honneur s’îl ne risquait pas sa vie. Il s’expose à être tué ou à tuer. Par conséquent, lui dire d’avance : « Si tu te bats, si tu risques ta vie, ou celle d’autrui, tu mérites la mort, 1 c’est le menacer de ce dont il n’a pas peur. Si, au contraire, la loi avait cherché des répressions morales, qui missent en péril, non pas la vie, mais l’honneur et la considération, on aurait obtenu un meilleur résultat La loi eût dû faire courir des risques réels à la considération et aux droits civils et politiques des duellistes. Alors, placé entre ce qui ertt été le préjugé d’une part et le résultat réel de la législation de l’autre, on eût peut-être obtenu la répression du duel. Ainsi, tel homme refusera de se battre s’il ne craint que la peine de mort ; on lui dira r ■• Tu es un lâche. » Mais s’il avait a re<louter d’être exclu de toute fonction civile publique , du droit d’êlre témoin en justice, du droit de tester, en un mot d’être privé de tous les avantages sociaux, l’homme le plus décidé à affronter ia mort, et qui la craint le moins, trouverait dans son intérêt, dans .sa considération d’homme , dans son avenir et dans celui de sa famille, des motifs bonorablesde préférer au duel le respect à la loi. Le duel n’est qu’un acte de barbarie ; c’est quand les lois étaient insuffisantes, quand il n’y avait pas de tribunaux assez puis,sants, que l’homme en appelait au combat singulier. On se donnait un démenti, et dans un siècle de che-