Page:Dictionnaire des Antiquités grecques et romaines - Daremberg - IV 1.djvu/468

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
PIC — 460 — PIC


dissimuler les trois quarts d’un personnage. Sous ce rapport, le Boutès de son Amazonomachie du Poecile était resté célèbre 1[1]. Quant à Panainos, en dehors de ses travaux en collaboration avec Micon, on citait de lui surtout sa décoration peinte du trône de Zeus à Olympie 2[2].

Pauson, qui vivait à peu près dans le même temps, marque peu dans l’histoire de la peinture 3[3]. Il n’en est pas de même d’Agatharque de Samos, le plus ancien peintre — en renom — de décors pour le théâtre, et qui semble, un des premiers, avoir tenté de rendre la perspective 4[4]. Mais celui qui, dans cette voie, fit faire à la peinture les plus grands progrès est Apollodore d’Athènes, à qui l’on doit l’invention du clair-obscur 5[5].

Fig. 5645 – Plaque d’argile peinte.

A la fin du Ve siècle, l’art de peindre est en possession de presque toutes ses ressources ; nous le devinons aux sujets que traitent Zeuxis et Parrhasios, et à la façon dont ils les traitent. Zeuxis d’Héraclée, qui, avant de s’établir pour de longues années à Éphèse, vit à Athènes, où il connaît Socrate, rajeunit les scènes mythiques en y introduisant plus d’humanité : son Hercule enfant, sa Famille de Centaures, sont d’une inspiration déjà alexandrine 6[6]. Obéissant à une loi du temps, il se complait dans la représentation de la femme : Pénélope, Hélène à sa toilette, peinte pour les Crotoniades, comptent parmi ses chefs-d’œuvre 7[7]. Il ne dédaigne pas le tableau de genre (la Vieille femme, l’Enfant aux raisins, l’Amour couronné de roses, etc.) 8[8]. Comme technicien, il perfectionne les procédés d’Apollodore et revient, en curieux, à une pratique ancienne, celle du monochrome, sans toutefois retomber dans la teinte plate : il exprime le modelé des corps à l’aide d’une seule couleur additionnée de blanc en quantité variable, suivent les besoins 9[9]. On a cru pouvoir assimiler ces peintures à des espèces de grisailles.

Parrhasios subit l’influence du théâtre ; plusieurs des sujets traités par lui le prouvent. Il cultive également le genre familier (le Prétre et l’enfant, le Navarque, les Deux Hoplites) 10[10] et l’allégorie ; à ce dernier genre


appartient son fameux portrait du Peuple athénien 11[11]. Il est surtout intéressant comme technicien. In liniis extremis palmam adeptus, dit Pline en parlant de lui, ce qui signifie qu’il porta beaucoup plus loin que ses prédécesseurs l’art de faire tourner les corps 12[12].

Un de ses contemporains, Timanthe, auteur du Sacrifice d’Iphigénie, si admiré de l’antiquité tout entière, parait avoir excellé dans l’expression des sentiments. Sa peinture était suggestive. « Il donnait à entendre, écrit Pline, plus qu’il n’avait peint, et quoique le plus grand art se manifestât dans ses ouvrages, on sentait que son génie allait encore au delà de son art 13[13]. »

L’école de Sicyone, qui fleurit dans la première moitié du IVe siècle, représente une curieuse étape de l’histoire de la peinture. Fondée par Eupompos, illustrée par Pamphile, Mélanthios, Pausias, elle personnifie la peinture savante, qui perfectionne le métier, excelle dans l’art de grouper les figures, s’ingénie, par des procédés nouveaux, à rendre les raccourcis, trouve le moyen de reproduire la transparence du verre 14[14]. Pausias, le premier qui cultiva avec succès l’encaustique. inaugure en même temps le petit tableau de chevalet et s’acquiert un renom mérité dans la représentation des enfants 15[15]. Ce qui distingue cette école, c’est l’étendue et la variété des connaissances, et l’application raisonnée de certaines régles tirées d’une observation précise de la réalité 16[16].

Vers la même époque, se forme en Béotie une école dont la durée exacte est difficile à déterminer : elle semble, après une période d’indépendance, s’être confondue avec la nouvelle école athénienne. Le peintre qui la représente avec le plus d’éclat est Aristide, instruit par son père Nicomachos et par un certain Eusénidas, contemporain de Parrhasios et de Timanthe 17[17]. Il se rendit célèbre par le caractère pathétique de ses compositions : Alexandre, ayant trouvé à Thèbes, en 334, son tableau de la Mère mourante, le fit transporter à Pella 18[18]. On citait d’un de ses élèves, Euphranor, un Combat de cavalerie qui décorait à Athènes le Portique Royal 19[19]. À ce groupe appartient encore Nicias, auteur d’une Nékya inspirée d’Homère 20[20].

  1. 1 Zenob. Prov. IV, 28.
  2. 2 Paus. V, II, 6 ; cf. H. Blümner, Die Gemaelde des Panainos am Throne des Olpmp. Zeus (Jahrb. 1900, p. 136 sq.).
  3. 3 Voir sur lui notamment Aelian. Var. hist. XIV, 15 ; Ps.-Lucian. Demosth. encom. 24.
  4. 4 Vitr. VII, Praef. 10.
  5. 5 Plin. Hist. nat. XXXV, 63 : Hic primus species exprimere instituit primusque gloriam penicillo jure contulit.
  6. 6 Plin. Hist. nat. XXXV, 63 ; Lucian. Zeuxis, 3.
  7. 7 Plin. Hist. nat. XXXV, 63 ; Cic. De invent. II, I, 1.
  8. 8 Fest. s. v. Pictor, p. 209, I, 10 ; Plin. Hist. nat. XXXV, 66 ; Aristoph. Acharn. 991 et le scoliaste.
  9. 9 Plin. Hist. nat. XXXV, 64 ; cf. Quintil. XI, 3, 46. Voir à ce sujet Milliet, Études sur les premières périodes de la céram. gr., Appendice, p. 163 ; cf. C. Robert, Votivgemaelde eines Apobaten ; Id. Knöchelspielerinnen d. Alexandros.
  10. 10 Plin. Hist. nat. XXXV, 69-71.
  11. 11 Id. Ibid. 69.
  12. 12 Id, Ibid. 67-68, texte très important pour l’Histoire des progrès de la perspective.
  13. 13 Id. Ibid. XXXV, 71.
  14. 14 Id. Ibid. XXXV, 80, 123-127 ; Vitr. VII, Praef. 14 ; Paus. II, 37, 3 ; Six, Jahrb. d. inst. 1905, p. 97 et 155.
  15. 15 Plin. Hist. nat. XXXV, 123-124.
  16. 16 Ratione Pamphilus ac Melanthium praestantissimus (Quintil. XII, 10, 6).
  17. 17 Plin. Hist. nat. XXXV, 74 et 110.
  18. 18 Id. Ibid. 98.
  19. 19 Id, Ibid. 129 ; cf. Paus, I, 3, 3.
  20. 20 Plut. Non posse suav. vivi sec. Epic. II, 2.