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lerre battue et nivelée, les viae ylnrea sti’atae^ dont la chaussée était recouverte de gravier pilé, les viae silice stralae, pavées de dalles de pierre’. Les Romains ont excellé dans l’édification des deux dernières. Il en subsiste en Italie et dans les provinces des vestiges importants, à l’aide desquels on peut se faire une idée des procédés employés pour les établir. Dans les textes littéraires et épigraphiques les mots viam lueri’- ou viam tnunire’ embrassent tous les travaux que pou- vait comporter la construction ou l’entretien d’une route ; viam sterne ?’e^, stmiere", instiluere ", innovare , c’est la construire ; viam glarea slernei^e^, l’empierrer ; viam silice^, lapide*" ou quadrato saxo stei’nere", la paver ; viam restiluere’^, refice ?’e^ ad pi’istinam formam reducere*^, la restaurer ; viam piii’gare ’" ou verrere ", la nettoyer ; viam deteriorem facere ’ altérer son état primitif, par exemple en la rétré- cissant. Stace a décrit en quelques mots les travaux de la via Domitiana de Campanie ’*. Nulle part Vitruve ne traite spécialement des routes, mais il parle en détail des ruderationes’^^ ,sdsemen.s d’édifices [pavi- mentum], qui étaient faites de plusieurs assises de maté- riaux diflerents, et l’on peut rapprocher ces indications de celles de Pline-" et d’un autre chapitre de Vitruve sur les ambulationes-’, passages empierrés servant de lieux de promenade. Nicolas Bergier, qui avait fait des fouilles auprès de Reims en trois endroits ’•^ sur l’emplacement d’anciennes voies romaines, y put constater l’existence de « plusieurs matières bien dis- tinguées et unies par certains lits les unes sur les autres... 11 y a, dit-il, tel rapport des pavez dos maisons antiques avec les matières des grands chemins des champs que l’ordre de celuy des maisons estant reconnu pièce ù pièce et nom pour nom peut suppléer à celuy des champs et restablir les noms propres de chacune couche qui m’estoient inconnus d’ailleurs "’". Far cette méthode il a tracé les règles théoriques de la construc- tion des routes romaines-’.

On commençait par délimiter entre deux petits fossés parallèles {su/ci) ’^ la largeur de l’espace que la voie devait occuper ; dans l’intervalle, toute la terre meuble était enlevée sur une assez grande profondeur-* et, autant que possible, jusqu’à ce que l’on rencontrât le roc ; on nivelait et pilonnait le fond de la fouille, que

1 Ulp. Ùigest. .L1II, 11, 1.2. — 2Cic. De le-j. lU, 3, 7 ; Corp. ùiscr. tat. I, a’ i06 (lable d’Héraclêe), 1. 20 sq. — 3 Cal. De re rust. i ; Cic. Pro Font. i-.Pro Mtl. 7, 17 ; Liï. IX. 29 ; Epit. XX : XXXIX, 2 ; Sicul. Flacc. p. 146 ; Corp. imcr. lai. III, n" 3198 el 3i01. ilimitio marum : Tac. Ann. I, 56, 1 ; Suet. Calig. 27, 3. C. Juliian, dans a. Revue de Paris, 1" février 1900, p. 563, fan observer que le môme mot dési^nail la construction d’un camp et celle d’une route.

— » Isid. loc. cit. : Corp. inacr. lat. IX, a- 438, 104«, 1156. Lci pression j<ernc>e et aperire apparail sur plusieurs des milliaircs d’Arabie réunis au Corp. imcr. lat. III. sous le n« 14149. Sternere. employé seul, est pris avec le sens de paver dans la table d Héraciée, I. 29. Aperire est donné par le Viijesle, XLIII. 11. I, I, comme synonyme de reficere. — s T. Liv. X, 23. —6 Curp. inscr. lat. VIII, n- 21992.

— ■ : Ibid. VIII, n» lOWl. — 8 Tibull. I, 7, 59 ; T. Liv. XLI, 27 ; Corp. inucr. lat. VI, n" 3824 6131603. - 9 Tibull. (oc. cit. 60 ; T. Liv. X, 4 ;; XXXVIII, 28 ; XLI. 27 ; Corp. inscr. lat. X,n" 6833. — 10 Corp. inscr. lai. X, n« 6854. — n T. Liv. X, 23.

— 12 Corp. mser.lat. III, n» 14202, 4 ; V, n«8102 : VIII, n" loic, 10374, 21920. etc. (eipression particulièrement fréquente en Afrique) ; X, n» 6S76 ; XI, a" 6619, 6664 ; XII. n" 107, 5605, etc. Jtestiluere el noris munilioniiua ditalare : ibid. VIII, n" 10333 el 22397. — 13 Diyett. XLIII, 19, 3, 15 ; Tait. Heracl. I. 29 ; Corp. inscr. lat. X, n"18o3, 6»12-68ri ; XII, n» 5603. — >t Vigest. loc. cit. —>"Digesl. XLIII. 11, I, 1 ; Tab. Ueracl l. 30.— 16 Suet. Vespas. 5. — i^ Diyest. XLIII, 8, 2, 32 ; 11. i, 2. — 18 Slat. S<tv. IV, 3. - 19 Vitruv. VII, 1.-20 [-lin. Aat. Iiist. XXXVI, 184-189.- 21 Vitruv. V. 9. 7. — 32 Uans l’enclos du monastère des Capu- cin», sur la route de Châlons, sur la roule de Mouzon | N. Bergier, Hist. des grands chemins de l’Empire romain. I, p. 180-184). — 23 Ibid. p. 151. — a Ibid. I, livre second, p. 121-31 1 (la plupart des auteurs qui ont repris la question après Bergier

1.

l’on recouvrait de sable et de mortier, et au besoin même on y enfonçait des pieux pour augmenter sa force de résistance - Sur ce fond s’élevaient ensuite quatre couches superposées de maçonnerie ^’, représentant une hauteur totale de 1 mètre à 1 m. 30^’ : 1» le statumen^" (de m. 30 à 0*m. 60), composé de plu- sieurs rangs de pierres plates reliées par du mortier ou de l’argile ; 2° le rudus ou la ruderùtio^^ (0 m. 25), mince couche d’un béton formé de petits cailloux, de

Kig. 7430. — Coupe d’une voie romaine avec ses subslruclions.

pierres cassées, de fragments de briques, et battu avec des pilons ferrés pour lui donner plus de solidité ; 3° le nucleus^’ (0 m. 30 à m. 30), béton plus fin en gravier ou en sable cylindre par couches ; 4° le summum dor- sum " (0 m. 20 à m. 30), fait dans les viae glarea stralae en cailloutis, dans les viae silice stralae en dalles plus ou moins larges ; de toute façon cette partie supérieure devait présenter une surface unie^* ; elle était légèrement bombée en son centre, de manière à permettre l’écoulement des eaux ^°. Deux trottoirs surélevés (margines^’^ oucrepidines^’), dallés ou empier- rés, encadraient la chaussée {aggei’Y*, dont les séparait parfois un petit rebord [umho)’^ ; on appelait gotnphi"’ des pierres taillées en forme de coin et faisant saillie, placées de dislance en distance le long des trottoirs pour les consolider. Enfin deux fossés latéraux recueillaient les eaux de pluie".

Bien entendu, dans la pratique, ainsi que les fouilles ont permis de le constater, l’épaisseur, la disposition respective et même le nombre des couches superposées variaient beaucoup (fig. 7 i3())^. Quelquefois le r ?<(/MS et le

n’ont l’ait que le résumer). Cf. J. Beclimanii, Geschickte der Erfinditngen. Leipzig, 1783-1803, II, p. 335-364 ; A. Léger, Les travaux publics au temps des Jtomains, Paris, 1875, p. 143-230, cl Atlas, pi. ni-iv ; C. Merkel, Die Ingenieiirtechnik im Allertum, Berlin, 1899, p. 226-263. — 25 Slal. toc. cit. 40. — 20 Vitruv. VII, 1, 1 (cf. V, 9, 7) el Slal. loc. cit. 41-42. — 27 Vitruv. loc. cil. Stace ne dislingue pas les trois premières et les réunit en bloc sous le nom général de greminm (loc. cit. 40). — 28 C. Jullian, loc. cit. : " la roule romaini ! était véritablement une muraille portant un cliemin ». Les procédés des Romains, qui allacliaient une telle importance à l’épaisseur des subslruclions, différaient complètement de ceux des inoderpes, qui réduisent au contraire l’infrastructure à très peu de clio.se. — 23 A. Léger, Op. cit. Allas, pi. m, 1. — 30 Vitruv. VII, 1, 1 el 3. — 31 Jbid. loc. cit. ; Plia. Op. cit. XXXVI, 186 et 188.- 32 Vitruv. VII, 3 ; Plin. XXXVI, 187. — 33 stat. loc. cit. 40. — 31 c. Jullian, (oc. cit. p. 566 : « le sol d’une chaussée empierrée était d’une agrégation si compacte (|u’il paraissait d’un seul Woc ; sur les routes pavées les joints des dalles s’adaptaient, à en être invisibles ». — 35 Isid. Orig. XV, 16. — 36 T. Liv. XLI. 27 ; Corp. inscr. lat. XIV, n« 4012. — 31 Pelron. Salir. 9 ; Juven. V, 8 ; Corp. inscr. lai. V, n»2ll6 ; VIII, n» 7046 ; XI, n«’ 1002 et 3003. — 38 Verg. Aen. V, 273 el Serv. ad loc ; Tacil. Hisl. Il, 24 et 42 ; III, il et 23 ; Isid. loc. cit. — 39 Slal. SUr. IV. 3, 47. — 40 Recoinmand.ilion faite à ce sujet par Vitruve. V, 9, 7, pour les ambulaliones.— »’ Stat. ibid. 48. — 42 Bergier le reconnaît lui-même, loc. cit. p. 151 : sur les trois cliemins qu’il a fouillés, .c au premier, dit-il, les couches esloient rangées par le mesme ordre qu’es pavez dômes- ti(|ues el en nombre tout pareil ; au second, je Irouvay l’ordre un peu changé ; cl au troisième le nombre des couches multiplié. » On verra dans C. Merkel, Op. cit. p. 243-235, d’après les recherches el fouilles récentes, l’indication des particularités

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