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poussaient jusqu’à Préneste (Palcstrina) ’ ou Subla- queum (Subiaco) ^. Le territoire le plus fréquenté dans les monts Albains était celui de Tusculum (Frascati) ; on a identifié une vingtaine de ses villas, dont quatre ont appartenu à des empereurs^ ; mais tous les envi- rons des lacs d’Albano et de Nénii étaient couverts de constructions semblables, depuis Castrimoenium (Ma- rino) jusqu’à Aricia et à la chaîne du mont Algidus *.

Ceux qui préféraient la mer à la montagne couraient vers les plages et les anses qui bordent les côtes du Latium, surtout vers Antium (Anzio), Astura, Anxur (Terracine), Formiae, Caieta ((îaëte) = . Puis venait toute la série des stations campaniennes, délices du beau monde : Cumes, Baies, Misène, Pouzzoles, Pompéi, Sorrente et Salerne ^ Plus rares devaient être ceux qui allaient jusqu’à Velia (Vallo) en Lucanie, ou jusqu’à Tarente ; ceux-là étaient surtout des gens de santé déli- cate, à qui de longs loisirs permettaient de passer la sai- son froide dans des retraites très abritées ’. En Étrurie, la côte, en grande partie marécageuse comme aujour- d’hui, n’offrait de séjours agréables qu’à Alsium (Palo), près de Rome^, et tout à fait au Nord, à Luna’. Dans la Haute Italie, des villas sont mentionnées près de Raveune, dont une impériale, provenant de l’héritage de Domilia, tante de Néron ’". 11 va de soi qu’en dehors de ces centres principaux de villégiature des habitations de plaisance se sont élevées un peu partout, en Italie, autour des villes les plus importantes " ; mais on ne pouvait les compa- rer à celles où affluaient les Romains de la capitale. Catulle était propriétaire à Sirmio sur le lac de Garde ; mais Catulle était de Vérone’- ; Pline le Jeune, né à Côme, avait plusieurs villas sur les bords du lac : il les appelait ses délices ’^ et il y revenait de temps en temps, comme Cicéron revenait à Arpinum, pour surveiller ses intérêts ou entretenir ses relations avec les gens du pays ; mais le même Pline s’était fait construire deux autres villas magnifiques, l’une en Étrurie, près de Tifernum Tiberinum (Città di Caslello) ", la seconde à Laurente ; celle-ci avait à ses yeux un avantage inappré- ciable, celui d’être située « à 17 milles de Rome, de telle sorte qu’après avoir terminé ses affaires on pouvait y res- ter, le soir, en règle avec soi-même, sans avoir rien perdu de sa journée » ’ Ce point de vue était celui de toute la haute société dans la capitale ’^.

Loin de Rome, il en était autrement, surtout dans les provinces. Là l’aristocratie, grâce à la paix profonde assurée par l’Empire, s’habitua de plus en plus à vivre

p. loi ; Journal des Savants, 1914, p. 223 (L. Constans). — ’ Hor. Od. lU, 4, ii ; Plin. Episl. V, 6, 43. — 2 V. de .Néron, Tac. Ann. XIV, ii. — 3 Laii- ciani, Le ville Tuoculnne, Bull. d. commiss, arch. comun. di Roma, XII (1884), p. 172, avec carte el plans. — 4 Pïibby, Analisi, 1, p. 88, 121, 244 ; Dessau, Corp. inscr. lat. XIV, p. 2u3, 216 ; llûlsen, dans Pauly-Wissowa, Beal-Encyclop. I, p. 1307, 1476 ; 11, p. 823 ; Tomasselti, Op. l. Il, p. 362. — 3 Nibby, Op. l. 1, p. 181,266 ; IIHlsen, dans Pauly-Wissowa, Op. l. I, p. 2561, 2652 ; 11, p. 1862 ; III, p. 1323 ; Weiss, ibid. VI, p. 2857. — 6 Belocli, Campuitien, à lindei s. v. Villa : Ch. Dubois, Pou ::o/es(l907), p. ,361 ; Hûlsen, dans Pauly-Wissowa, Op. t.

II. p. 2774 : III, p. 1516. Sur la vie ([u’oii y menait v. surtout Friedlânder, .Sit- tengesch. Il, p. 106. L’ile de Capreae (Capri) était tout entière domaine impérial.

— 7 Hor. riptal. I, 15 ; Od. Il, C ; Sen. Tranqu. an. Il, 13. — 8 Nibby, Op. l.

III, p. 527 ; Iliilsen, dans Pauly-Vissu«a, I, p. 1039. — 9 Près de Carrare, entre la Speiia et Viareggio ; Pcrs. VI, 7 ; Stal. Silv. IV, 4, 23. — I" Cass. Dio, LXI. 17 ; Dig. XVII, I, 16. — n Villas autour de Pérouse ; Plia. Epist. i, 4,1. _ 12 Cal. 31. — 13 Plin. A’pisMI, 8 ; IV, 6 ; VI, 21 ; Vil, 11 ; IX,7. Villa dcson ami Caninius Hufus au même endroit : JOid. I, 3, 1. — ’• Dans l’Apennin, à l’est d’Arezto, auj. Santa Fiora, paroisse de Passcrina, Plin. Episl. IV, 1,4 ; V, 6. Sur l’identification des lieui t. Uamurrini dans la Strenn Hclbigimia (1900), p. 93.

— 15 Plin. Epist. II, 17, I. Sur se» autres propriétés k liénévrnt. i Tusculum, à Tibur, à l’r.’ii...l.>. !■><■ /•,>.«(. V. i ;. i., : IX, 7 ; Friediiiu.lir, .S,ltvii,,esc),. i. p, ■. ! .(l :

sur ses terres, en sorte que la cilla urbana, centre d’une exploitation agricole, avait toujours une villa ruslica auprès d’elle et souvent plusieurs [latifvndia, p. 96"2] ; mais comme le maître était généralement cultivé, épris des arts et plein d’admiration pour les mœurs de Rome, qu’il s’efTorçait d’imiter en tout, sa demeure ne différait guère des élégantes maisons de plaisance construites dans le Latium ou la Campanie. C’est ce que nous voyons particulièrement en Gaule. La plupart de nos vil- lages se sont fondés et développés autour d’une villa antique et leur nom même perpétue à travers les âges le nom plus ou moins altéré d’un propriétaire qui les habita pendant l’ère gallo-romaine ; le mot fumlus étant sous- entendu, on aforméunadjectifavecsonnometun suffixe qui varie suivant les régions : acus [lulius, Iuliacus, Juillac), ou anus [Licinius, Licinianus, Lusignan) ; ou, plus tard, avec addition du mot villa (T/teodonis villa, Thionville) ; ailleurs le nom géographique rappelle une culture spéciale (villae lîosariae, Rosières) ou la villa eUe-mème {Palatiotum, Palaiseaul, etc.. ".Nos villages furent donc, à l’origine, des villae rusticae groupées auprès d’une villa urbana sur un fundus qui en dépen- dait". Si l’on veut savoir quel degré de splendeur peut atteindre la demeure du maître au milieu de ces agglo- mérations rustiques, il faut lire, par exemple, la lettre où Sidoine .pollinaire (vers l’an 472 ap. J.-C.) a décrit son Avitacum (praedium, à Aydat, Puy-de-Dôme) : thermes, piscine, portiques, salles à manger d’hiver et d’été, bel- védère., jeu de paume, etc.. rien ne manque à cette habitation, appelée par son propriétaire une cabane". Dans ces villas magnifiques de la Gaule on menait, comme dans celles de l’Italie elle-même, une large exis- tence, embellie par tous les plaisirs alors en usage dans la société polie ■". Mais, quand les invasions eurent commencé, il fallut les enfermer dans des tra- vaux de défense, et ainsi la villa urbana redevint par le malheur des temps ce qu’elle avait été au début, un château fort, où tous les habitants du domaine pouvaient, en cas de nécessité, trouver un refuge-’ ; les châteaux de nos villages n’ont fait, bien souvent, que remplacer la demeure seigneuriale de l’époque romaine^-.

En Afrique, les grands propriétaires ont pris soin eux- mêmes de laisser àla postérité l’image de leurs demeures ; les mosaïques de cette région, où ils les ont fait représenter ^voir nos fig. 7483,7486, 7487), comptent parmi les docu- ments les plus curieux que nous possédions sur l’architec- ture, la distribution et la décoration des villas antiques ;

Henzen, Annal, d. Isl. arch. di Borna, IS44, p. 03. — I6 V. les plaintes de Colum. B. r. I. praef. — ^’ D’Arbois de Jnbaiuville, Becherches sur l’origine de la propriété /’onciëre (1890), p. 90 sq. Résumé par G. Bloch dhasVOisl. de France de Lavisse, 1. 1, p. 438. — 18 Point de fundus sans villa ; d’Arbois de Jubaiuville, t. c, A partir du v* siècle de notre ère, villa en vint même à signifier village : Longnon, Géogr. de la Gaule au vi" siècle (1S7S), p. 19. — 19 Sid. Apoll. Epist. 11,2. Cf. d’Arbois de Jubaiuville, p. 145, 170. Sid. Apoll. Epist. 1,0, 7 ; 11.9 ; V,t3 ; VIII, 4 et II : Carm. XI, I ; XXII, 487 ; XXIV. 54-74 ; Auson. Epist. 22, 23, 24, 115 ; Idyll. III, 283 ; Paulin. Eucharist. 203-211, 433-437. — M V. le tableau de Sam. Dill, Boman Society in the last eentury of the VCestern Empire (1898), liv. Il, cliap. 4, p. 147 ; G. Bloch, p. 449. — 2’ Sid. Apollin. Carm. 22, 118-125 ; G. Blocli, ’. c. p. 450. Cf. LATIFUNDIA, p. 902, note 24. — 22 || est impossible de donner ici une nomenclature des villae {urbanae et rusticae) découvertes en Gaule. V. de Caumont, Cours d’antiqu. monumentales (1831), t. III, le- ; tables du Bull. monum. depuis 1S37, du Huit, du Comité arch. des Irav. hisl. depuis I8S3. Le plus bel exemple est la villa de Chiragan, près Martres-Tolosanes tliaute-Garonno) : Joulin, Mcm. présentés par divers savants û l’.^cad. des inscr. et b.-l. XI 1901), p. 219, avec 25 pi. et ci-dess. p. 888. Beaucoup de mosaïques, trouvées eu dehors des villes antitpies, proviennent des villas : Lafaye et Blanchel, Invent, des mos. de la Gaule (1909). Ex. la villa de Mennig, bibliogr. dans Blanchel, Dp. l. n. 129."i.