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semble-t-il, en définitive, que se serait faite la transfor- mation du feu élément en Héphaistos forgeron. Si les monnaies d’Asie Mineure présentent le plus souvent le dieu sous cette forme, ce peut être l’clTet dune régres- sion mythique vers le premier pays d’origine. Précisé- ment la poésie grecque épique parle volontiers d’Héphaislos le forgeron : Vlliade décrit les armes d’Achille ’ ; l’hymne à Héphaistos, créé dans la. région samo-naxienne, signale le trône magique d’IIéra - ; VOdyssée, le filet habilement tressé oi :i le mari trompé enferma les amants adultères’.

L’antiquité connaissait une longue liste des chefs- d’œuvre du forgeron chefs-d’œuvre dont l’armure d’Achille est le prototype [caelatura, p. 7S1, et fig. 955]. Dans la série des -fis/aïuTOTEuxTa % Homère compte encore le sceptre et l’égide de Zeus", les statues d’or vivantes déjeunes tilles’, les trépieds animés’, les chiens d’or et d’argent d’Alcinoos’, les demeures des Olympiens’". Hésiode signale les armes de Pelée, la cuirasse d’Héra- klès" ; Eschyle et Mimnerme, le gobelet d’Hélios ’^ Apollodore de Rhodes parle des taureaux de bronze, du char ailé d’Hélios, du palais deCypris’^ ; Nicandre, d’un cliien de bronze animé ’*. Virgile attribue à Vulcain les armes d’Ènée ’^ Ovide le décor du palais d’Hélios". 11 faudrait ajouter encore, d’après diverses traditions, le gobelet d’or donné par Zeus à Aphrodite’^ le vase offert en présent par Dionysos à Ariane", le diadème d’A- riane", la couronne d’Harmonia -" pour Aphrodite-’, des taureaux soufflant le feu, semblables à ceux d’Aié- tès", l’attirail de chasse d’vVdonis -’ ; selon d’autres sources, la maison d’Electre -’, un cratère pour Diony- sos", le bouclier de Dionysos, des armes ^°, etc. La tra- dition mythographique ne s’en tenait pas là : elle a cité encore l’hypogée d’Oenopion ^’, le collier composé pour Cadmos ^’, le géant de bronze Talos ^% présent ofTert à Minos de Crète, le vêtement d’Harmonia ^°, les flèches d’Apollon et d’Artémis", la âpjt-fi de Persée ^’^, la faucille de Déméter ", le gobelet de Dionysos-"*, le trépied des sept sages ^°. Certains particuliers ou cer- tains temples passaient pour avoir reçu des présents d’Héphaislos, dont, aux temps récents de l’antiquité, la critique rationaliste a contesté l’origine". 11 semble, en

d. nstlich. Asiens, II, p. 4’.1 ; t-’redrich, Alhen. Milt. 1906, p. 7â ; Frazer, The gold. fjough^ III, p. 251. Dans la légende de Birmanie, comme pour le ciilLe lemnien, la saintclé de la flamme, encore évidente à ce stade de la croyance, fait supposer un état plus ancien, où le feu lui-même était le si6ge de la puissance sacrée.

— ’ lliad. XVIII. 478 sq. ; la scène est représentée sur une « amphore de Nota », à Boston ; cf. Journ. hell. st. 1913, p. 109, n" 12, pi. xi ; pour les armes de Memnon, Gruppe, Myih. p. 1310, note 4.-2 IHad. XVIII, 389-394. — 3 Odyss. VIII, Î96-297. — * Diodpr. V, 74, 2 ; Gruppe, Griech. Mythol. II, p. 1309. Les textes relatifs à la forge et au forgeron sont recueillis par Malien, dans l’auly-Wissowa, Heph. p. 33» : //iarf. XVIII, 369 ; XV, 310 : Lucian. Desacr. 6, 8 ; Tliucyd. III, ;88, 3 ; Callimach. 111,46 ; IV, 141 sq. ; fragment 129 (édit. Schneider) ; Kuphorion, UeHiii. Klassikert. Vf, 58, 60 ; Apoll. Rliod. III, 46 sq. ; IV, 761 ; Virgil. Aeneid. VIII, 410, 4W ; Georg. I, 471 ; IV, 170 ; Ilias lat. «57 sq. (Brûning, Arch . Jahrb. IX, 1894, p. lU sq.i. Pour H. forgeron, Maltcn, ibid. ; Aeschyl. Prometh. 56 sq. ; Plat. Sympos. 197 B. - 5 Ou f,.«,»T<l5»,,., Ilesych. s. w. — 6 lliad. Il, 101 ; Hausanias, IX, 40 ; II, 51, 1 ; XV, 309 sq. — 7 /Uad. XVIII, 417.

— «//iarf. XVIII, 373. — 9 Odyss. VII, 93. — 10 JUad. I, 607 ; XIV, 338 ; XX, li : XIV, 160 ; XVIII, 371 (cf. Ilclbig, fiomcr. Epos^, p. 100). Les représen- tations du coffre de Cypsélos dérivent de l’épopée homérique ; cf. Pausanias, V, 19, 8 ; Loeschckc, Dorp. Progr. 1880, .■ ; ; Athai. Mitt. XIX, p. 512, 2 ; Néréides remettant les armes forgées par Héphaistos. — il Hcsiod. fragment 37 ; Pin- <lar. Nem. IV, 58 ; Scliot. 88 ; Apollod. Il, 93 ; III, 10 ; Philostr. Imagin. 418 K : Diodor. IV, 14, 3. — 12 Aeschyl. éd. Nauck-, 69 ; Mimncrni. fr. 11,6. — 13 Apol- lod. I, 128 ; III, 230 ; III, 232 ; III, 37. — H Nicarid. np. Asin. PoIIiou. V, 39.

— 16 Aeneid. VIII, 372 cl sq. — I0.tfo/amor ;)/i. Il, 5. — n (Juint. Sniyrn. II, 138 sq.

— l !" Ibid. IV, 380. — 19 Epimenid. ap. Diols, Fragmente iler Vorsocrat. 2, 498, 25 ; Tertull. De corona, V ; Virgil. Georg. I, 122. — 20 Slat. Thebais, 271 sq. ; Connus, V, ISI. — 21 Apoll. Rhod. (Il, 230. — 22 Nonn. Oiomjs., XLII,

fait, que les anciens aient eu l’habitude d’attribuer au forgeron dieu les premiers produits, les plus surprenants, du travail des métaux et de l’industrie humaine.

La personnification d’Hépliaistos sous l’aspect du for- geron devait avoir une influence importante sur les rela- tions du dieu : il se trouva ainsi naturellement associé à Athéna, protectrice elle-même de l’industrie humaine ". Ce rapprochement se trouve réalisé au temps d’Hésiode, à propos de la fable de Pandora ; on le constate au Parthénon et au pseudo-Théseion. C’est en Attique qu’il devait devenir le plus étroit, au point de faire naître la légende d’un amour d’Héphaistos pour sa parèdre féminine".

C. Vliisloire d’Héphaislos. — Ce n’est pas sans d’expresses réserves qu’on peut encore aujourd’hui essayer de fixer l’histoire d’Héphaistos. De tous les do- cuments ci-dessus réunis résultent cependant quelques conclusions vraisemblables. Le domaine d’Héphaistos est déterminé ; ses centres principaux sont l’Olympos lycien, le Mosychlos lemnien, .thènes, les lies Lipari.

Dans sa patrie lycienne, Héphaistos est établi sur la côte Est, près de la ville d’Olympos- : à l’Ouest, dans la vallée du Xanthe, dominait la déesse Léto, divinisation de la mère, sous la protection de qui les Lyciens ont placé leur sanctuaire d’alliance et, en beaucoup d’en- droits, leurs tombeaux. L’Olympe grec, qui n’a jamais possédé d’unité nationale, a vraisemblablement adopté en Lycie Héphaistos comme Léto ; on voit d’abord le culte des deux divinités se répandre dans les régions voisines du centre d’origine, hors de Lycie et de Cari( ;, sur toute la côte anatolienne, comme àl’Est et au Nord. La déter- mination d’Héphaistos en tant que divinité d’origine lycienne peut d’ailleurs être précisée ; c’est à la race des Solymes indigènes, plutôt qu’aux ïramiles venus de Crète que serait due l’institution du culte du feu. Les Solymes occupaient presque seuls la région occidentale, le territoire d’Olympos et de Yarnartasch*".

Ce fait concorde avec ce qu’on croit connaître de l’absence d’Héphaistos en Crète. Bien que la question soit encore à l’étude, il ne semble pas qu’on doive admettre en Crète l’existence d’un culte qui serait prouvé jusqu’ici par trop peu d’indices*’. Aucun témoignage

321. — 2 ! Ibid. III, 139. — 24 Ibid. XlX, 12t. — 25 Ibid. XXV, 384.

— 26 Ibid. XLIII, 400 sq. ; V, 680 ; XXV, 336, etc. — 27 Apull. Iliblioth. I, 27. — 28 Ibid. III, 25. — 20 Ibid. I, 140 ; Schol. ad Apollon. Khod. Il, 1056. — 30 Hygin. Fab. 140 : vestis scelcribus tincta (le présent est offert à la fois par II. et Athéna). — 31 Eratosth. Catast. 22. — 32 .Sc/io(. ad Apoll. Rhod. IV, 983. — 33 Scliol. ad lliad. XXIII, 92. — 34 Stesichor. ( ?) ; cf. Wilamowilz, Heph. 235, 42. — 35 Vorsocrat.’^, 5 ; sur H. cuisinier aux noces d’Éros et Psyché, cf. Apul. Metam. VI, 24. — 36 Sur le cratère donné par Ménélas à Télémaque, Strab. p. 41 C ; Pausanias, l.X, 41, 1 (cratère consacré par Télèphe dans le temple d’Apollon à Patara) ; Aâfva ; d’Eurypylos, à Patras. Id. X,5, 12 ; cf. Prnclos, dans Plat. Tim. III, 163 F (= ; Abcl, Orphica,iK].

— 3’ Cf. les monnaies d’Asie .Mineure, ci-dessus, p. 989, fig. 7573 ; dans VOdyss. VIII, 233, les dieux sont associés ; de même dans l’hymne homérique pour 11. 20 ; et dans Solon, 12, 49. — 38 Theogon. 573 ; Opéra et diea, 63, 72.

— 39 Pour les monuments, cf. ci-dessus, p. 982 et note 1 ; cf. aussi Plat. Protngor. 331 C ; Polilic. 274 ; Leg. 930 1) ; Crit. 109 C. — «0 Malien, Arch. Jahrb. t. l. p. 264 ; Hcrodot. 1, 173 ; VII. 92 ; Kalinka, Neue Jahrb. III, lS9ii, p. 682 sf ;. ; Tiluli Asiac minor. I, Inscr. I.yciae^ p. 10 ; Wilamowilz, Hermès^ XXXVIII, 1903, p. 383 ; K. iMeyer, Gesch. d. Alterl. 2, |, 2, p. 624, 627,703. En général, sur les races lycicnnes, Treubcr, Gesch. d. Lykier, p. 19. I,e te» te le plus probant pour un cidte d’Héphaistos en Crète est le passage de Dioilore de Sicile, V, 74, (|ui parle du culte d’il, en Crète comme d’un culte primordial (non cité par Malien). — *i Dans le passage de Pausanias, VIII, 53, 5, qui donne, d’après Kinaithon, une suite généalogique : Krès, Talos, Héphaistos, Khadaman- tllys, l^ortys, comme on l’a remarqué, Héphaistos reste isolé, et il suffit d’une légère correction ’I'wUtq^ pour faire reparaître le nom, moins iuaticndu, de i’éponymc’ d’une des ville» principales ; cf. Plat. Cratyl. 407 ; Maltcn, Arch. Jahrb. l. I. n. 264, note 7.