Page:Dictionnaire raisonné de bibliologie Tome 1.djvu/23

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ajoutons un mot sur deux Bibles célèbres dent on parle dans le sixième volume des Notices et Extraits des manuscrits de la bibliothèque nationale, qui vient de paraître. Le citoyen Camus donne la descriplion de ces deux Bibles manuscrites très-curieuses par leur magnificence : elles sont ornées de dessins et de miniatures extrêmement précieuses à tous égards : l’une renferme 5 152 tableaux avec deux versets pour chaque tableau, l’un latin, l’autre français, tous deux décorés d’une capitale alternativement en or et en azur, et d’une finale toujours en or et azur, « Je suppose, dit le citoyen Camus, que l’on put aujourd’hui faire exécuter chaque tableau avec les deux versets pour 12 francs, ce livre entier coûterait 61 824 francs ; ce que l’on peut bien porter, avec la dépense du vélin, à 62 000 francs. Le second manuscrit n’a qu’un peu plus de la moitié du nombre des tableaux ; mais ce ne sont pas de simples lavis, ce sont des peintures parmi lesquelles il s’en trouve de très-belles : qu’on ne l’estime si l’on veut qu’à la somme de 40 000 francs ; où trouvera-t-on aujourd’hui des exemples d’un pareil luxe pour les livres ? » À cette observation sur la dépense que l’on faisait alors pour se procurer de beaux livres, le citoyen Camus en ajoute une seconde sur les sujets de ces tableaux et la manière dont ils sont représentés. Ces sujets sont presque tous en contradiction avec les idées saines de la religion, de la raison, de la morale : ce sont des Diables luttant contre la puissance de Dieu ; l’ame sortant du corps de l’homme, y est représentée sous la figure d’une petite personne. On y expose les actions les plus impures ; et souvent les acteurs, dans ces sortes de scènes, sont des prélats et des moines. Quel siècle que celui où, après s’être rempli l’esprit des idées que ces tableaux impurs et pleins de fables faisaient naître, on ne recevait dans les temples d’autre instruction publique que celle des Maillard, des Barlette, des Menot, etc. !