Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, II.djvu/238

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soin que de nos plantes et de nos animaux. Un enfant qui naît, occasionne la joie domestique et publique : c’est un accroissement de fortune pour la cabane, et de force pour la nation : ce sont des bras et des mains de plus dans Taïti ; nous voyons en lui un agriculteur, un pêcheur, un chasseur, un soldat, un époux, un père. En repassant de la cabane de son mari dans celle de ses parents, une femme emmène avec elle les enfants qu’elle avait apportés en dot : on partage ceux qui sont nés pendant la cohabitation commune ; et l’on compense, autant qu’il est possible, les mâles par les femelles, en sorte qu’il reste à chacun à peu près un nombre égal de filles et de garçons.

L’AUMÔNIER.

Mais les enfants sont longtemps à charge avant que de rendre service.

OROU.

Nous destinons à leur entretien et à la subsistance des vieillards, une sixième partie de tous les fruits du pays ; ce tribut les suit partout. Ainsi tu vois que plus la famille du Taïtien est nombreuse, plus il est riche.

L’AUMÔNIER.

Une sixième partie !

OROU.

Oui ; c’est un moyen sûr d’encourager la population, et d’intéresser au respect de la vieillesse et à la conservation des enfants.

L’AUMÔNIER.

Vos époux se reprennent-ils quelquefois ?

OROU.

Très-souvent ; cependant la durée la plus courte d’un mariage est d’une lune à l’autre.

L’AUMÔNIER.

À moins que la femme ne soit grosse ; alors la cohabitation est au moins de neuf mois ?

OROU.

Tu te trompes ; la paternité, comme le tribut, suit l’enfant partout.

L’AUMÔNIER.

Tu m’as parlé d’enfants qu’une femme apporte en dot à son mari.