Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, II.djvu/427

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CHAPITRE VII.


Page 97. — Je dirai à l’occasion d’un peuple gouverné par des représentants et par un monarque, tel que l’Angleterre, l’idée qui me vient, peut-être vraie, peut-être fausse. On imaginait que la loi qui défendrait de corrompre les peuples, le serment de s’être conformé strictement à cette loi, et par conséquent toute liberté conservée dans la nomination des représentants, rendraient la nation anglaise la mieux gouvernée et la plus redoutable qu’il y eût au monde. Là-dessus je pensai que la représentation ne coûtant plus rien à celui qui représentait, la représentation en serait à d’autant meilleur marché pour la cour. On répondit qu’alors il n’y aurait plus que les gens de bien qui pussent arriver à la représentation ; à quoi je répliquai que Walpole avait le tarif de toutes les probités du royaume, et que le seul effet de la loi projetée, ce serait de faire baisser ce tarif[1].


CHAPITRE IX.


Page 102. — Mais il est une autre source de l’inégalité des industries et de la parcimonie des pères qui doivent transmettre à leurs enfants quelquefois des richesses immenses. Ces fortunes sont légitimes, et je ne vois pas comment, avec justice et en respectant la loi sacrée de la propriété, on peut obvier à cette cause de luxe.

Réponse. C’est qu’il n’y faut point obvier ; c’est que les fortunes seront légitimement réparties lorsque la répartition sera proportionnée à l’industrie et aux travaux de chacun ; c’est que cette inégalité n’aura point de suite fâcheuse ; c’est qu’au contraire elle sera la base de la félicité publique si l’on trouve un moyen je ne dis pas d’avilir, mais de diminuer l’importance de l’or ; et ce moyen, le seul que je connaisse, c’est d’abandonner toutes les dignités, toutes les places de l’État au concours.

Alors un père opulent dira à son fils : Mon fils, si tu ne veux que des châteaux, des chiens, des femmes, des chevaux, des

  1. Ceci ne répond pas directement à l’observation d’Helvétius. Il ne cite l’Angleterre que pour remarquer que l’obligation pour les représentants de s’assembler dans la capitale est la cause qui leur fait séparer leur intérêt de celui des représentés.