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SUR LE PARALLÈLE
DE LA CONDITION ET DES FACULTÉS DE L’HOMME
AVEC
LA CONDITION ET LES FACULTÉS DES AUTRES ANIMAUX


(Ouvrage traduit de l’anglais, par M. Robinet.)




Mais, monsieur Robinet, vous qui savez penser et qui nous avez montré par votre traité De la nature[1] que vous êtes en état de faire vous-même une bonne chose, pourquoi avez-vous perdu votre temps à nous en traduire une aussi pauvre[2] ?

Il n’y a ni vues nouvelles, ni sentiment, ni chaleur, ni style dans une matière qui en comportait tant. Si j’ai jamais été tenté de refaire un ouvrage, c’est celui-là. À mesure que j’en continuais la lecture, il se présentait à moi une foule d’idées, tantôt conformes, tantôt contraires aux idées de l’auteur. Si c’est une grande avance pour celui qui veut écrire que d’avoir sous ses yeux un livre médiocre, celui-ci aura parfaitement bien ce mérite. On renfermerait en cinq ou six pages tout ce qu’on voudrait en avoir fait. Le reste est une rabâcherie sur la nature de l’homme et l’énorme distance qui le sépare des animaux. Si l’auteur y avait bien regardé, il aurait vu que cet orgueilleux bipède était à peu près dans le règne animal, ce que le Titien est entre les peintres ; inférieur à chacun et même à plusieurs, si l’on considère ses facultés séparées ; supérieur à tous, si on les considère réunies. La raison, armée d’une pierre et d’un bâton, est seule plus forte que tous les instincts animaux.

Ce qu’il ajoute sur notre première éducation et sur l’avantage pour les mères d’allaiter elles-mêmes leurs enfants, est

  1. Voir ce que dit à ce sujet Diderot, t. II, p. 298, Réfutation de l’Homme.
  2. Ce préambule est tiré des mss. de l’Ermitage.