Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, IV.djvu/397

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le second émir.

Il n’y eut jamais de jambes aussi fines, ni de pieds aussi mignons.

la chatouilleuse.

Votre oiseau en exceptera, s’il lui plaît, ceux que je chatouille.

le second émir.

Lively portait des jupons courts ; et l’oiseau blanc pouvait aisément apercevoir les beautés dont il faisait l’éloge du haut du turban sur lequel il était perché.

la sultane.

Je gage qu’il eut à peine achevé ce monologue, qu’il abandonna le lieu d’où il faisait ses judicieuses observations, pour se placer sur le sein de la princesse.

le second émir.

Sultane, il est vrai.

la sultane.

Est-ce que vous ne pourriez pas éviter ces lieux communs ?

le second émir.

— Non, sultane ; c’est le moyen le plus sûr de vous endormir.

la sultane.

Vous avez raison.

le second émir.

Cette familiarité de l’oiseau déplut à un eunuque noir, qui s’avisa de dire qu’il fallait couper le cou à l’oiseau, et l’apprêter pour le dîner de la princesse.

la sultane.

Elle eût fait un mauvais repas : après sa fatigue chez les vierges et sur la route, il devait être maigre.

le second émir.

Lively tira sa mule, et en donna un coup sur le nez de l’eunuque, qui en demeura aplati.

la sultane.

Et voilà l’origine des nez plats ; ils descendent de la mule de Lively et de son sot eunuque.

le second émir.

Lively se fit apporter un panier, y renferma l’oiseau, et l’envoya coucher. Il en avait besoin, car il se mourait de lassitude et d’amour. Il dormit, mais d’un sommeil troublé : il rêva