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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, IX.djvu/391

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ÉLÉMENTS DE PHYSIOLOGIE.

La femme de Vossius mâchait pour son mari et lui déposait dans la bouche les aliments humectés et triturés.

Le suc digestif agit sur l’estomac vide et sur les aliments de l’estomac plein, appelle la faim ou prépare la nutrition.

Dans la faim l’estomac se tourmente comme un animal, il se contracte, il se plisse, il ne pense qu’à lui, ses plis se frôlent, des nerfs nus agissent contre des nerfs nus, et bientôt la douleur naît.

La faim appauvrit. Alors les serpents mordent sans danger. Les humeurs deviennent acres. On boit son urine, on ne le peut le lendemain, elle est trop acre. On a vécu jusqu’à vingt-huit jours sans nourriture[1].

L’huître n’a point de bouche.

Il y a des animaux qui ne boivent point. Peut-être l’homme n’éprouverait pas la soif s’il vivait de végétaux.

Le vrai appétit est fait pour l’homme laborieux.

Beaucoup d’animaux, insectes, qui souffrent la faim pendant longtemps.

Le long jeûne de l’homme, mais surtout de la femme.

Les caloyers ne mangent que six fois dans tout le carême.

La bière trouvée en Égypte par les mauvaises eaux.

La faim s’accroît à mesure qu’on s’approche du pôle, et le froid y refuse la nourriture végétale. Là on vit de la chair de l’animal et l’on s’habille de sa peau.

La faim est un sentiment douloureux qui naît de l’estomac.

La soif est un sentiment douloureux qui naît de la langue, du gosier, de l’œsophage et de l’estomac même.

La soif est une suite de la sécheresse, la faim de la faiblesse.

L’homme a l’estomac des animaux carnassiers, il en a les dents, il en a le cœcum court.

Les aliments font tout leur chemin en vingt-quatre heures,

  1. Diderot fait probablement allusion au fait si curieux rapporté par le baron de Gleichen (Denkwurdigkeiten, Leipzig, 1847, in-8°, p. 165), et qui a pour héros un certain alchimiste nommé Duchanteau. Celui-ci devait, au bout de quarante jours de jeûne, n’ayant pour toute nourriture que son urine, produire par cette « cohobation du supérieur et de l’inférieur » la pierre philosophale. Il soutint ce régime pendant vingt-six jours, et n’en mourut pas. Sa dernière urine, « d’une odeur balsamique et excellente, » fut conservée par la loge des Amis réunis, jusqu’à la Révolution, époque à laquelle on la sacrifia, quoique ce fût peut-être, ajoute un peu ironiquement le baron, « une médecine admirable. »