Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VII.djvu/223

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Cécile.

Peut-être ne me trouveriez-vous pas plus raisonnable que lui.

Le Père de famille.

Je ne crains pas ce chagrin de Cécile. Sa prudence m’est connue ; et je n’attends que l’aveu de son choix pour le confirmer. (Cécile se tait. Le Père de famille attend un moment ; puis il continue d’un ton sérieux, et même un peu chagrin.) Il m’eût été doux d’apprendre vos sentiments de vous-même ; mais de quelque manière que vous m’en instruisiez, je serai satisfait. Que ce soit par la bouche de votre oncle, de votre frère, ou de Germeuil, il n’importe… Germeuil est notre ami commun… c’est un homme sage et discret… il a ma confiance… Il ne me paraît pas indigne de la vôtre.

Cécile.

C’est ainsi que j’en pense.

Le Père de famille.

Je lui dois beaucoup. Il est temps que je m’acquitte avec lui.

Cécile.

Vos enfants ne mettront jamais de bornes ni à votre autorité, ni à votre reconnaissance… Jusqu’à présent il vous a honoré comme un père et vous l’avez traité comme un de vos enfants.

Le Père de famille.

Ne sauriez-vous point ce que je pourrais faire pour lui ?

Cécile.

Je crois qu’il faut le consulter lui-même… Peut-être a-t-il des idées… Peut-être… Quel conseil pourrais-je vous donner ?

Le Père de famille.

Le Commandeur m’a dit un mot.

Cécile, avec vivacité.

J’ignore ce que c’est ; mais vous connaissez mon oncle. Ah mon père, n’en croyez rien.

Le Père de famille.

Il faudra donc que je quitte la vie, sans avoir vu le bonheur d’aucun de mes enfants… Cécile… Cruels enfants, que vous ai-je fait pour me désoler ?… J’ai perdu la confiance de ma fille. Mon fils s’est précipité dans des liens que je ne puis approuver, et qu’il faut que je rompe…