Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VII.djvu/488

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MADAME BEVERLEY.

Et vous vous chargez aussi de mon ressentiment ? Monsieur, les offenses qu’on me fait sont les miennes, et je n’admets personne ou pour les partager ou pour les venger.

STUKELY.

Permettez, madame, que je vous dise que vous allez un peu vite. Si vous vous fussiez donné la peine de m’entendre, vous eussiez vu que mon dessein est de me défendre moi-même, et non d’accuser un autre. Vous m’avez cru dans l’indigence, et ce fut par un sentiment de commisération pour moi que vous abandonnâtes vos diamants.

MADAME BEVERLEY.

Je les abandonnai à mon époux.

STUKELY.

Qui les a reçus et donnés. Mais à qui donne-t-on les diamants de sa femme ? à une maîtresse.

MADAME BEVERLEY.

Cela n’est pas ; il irait de ma vie, monsieur, que je dirais : Cela n’est pas.

STUKELY.

Comme il vous plaira, madame ; mais on est vrai dans la fureur ; et c’est un secret que j’ai surpris à travers les imprécations dont il chargeait sa misérable amie, et les éloges qu’il faisait de son épouse généreuse.

MADAME BEVERLEY.

Impostures ! impostures que je ne croirai jamais. Non, mon époux n’a point de maîtresse… non… Mais, monsieur, s’il en a une, pourquoi m’en instruire ?

STUKELY.

Pour vous prévenir sur les pièges qu’on peut vous tendre encore… Dans l’incertitude où il était comment vous recevriez sa demande, il a supposé que j’étais ruiné, et il s’est écrit à lui-même. Le tour a réussi ; et ce qu’on arrachait à une femme honnête et tendre était porté, destiné à…

MADAME BEVERLEY.

Ah, Dieu ! je me meurs… C’est pour cette fois que j’ai tout perdu, que je suis ruinée… Ah, Dieu ! ce coup est au-dessus