Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, X.djvu/159

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mesquine. Je suis fâché de ce défaut, qui gâte un très-beau dessin.


M. WILLE[1].


Le burin de M. Wille a conservé à ce Salon[2] la grande réputation dont il jouit.




M. CASANOVE[3].


PEINTRE ITALIEN OU ALLEMAND, NOUVELLEMENT REÇU.


Il me reste à vous dire un mot des morceaux de Casanove ; mais que vous dirai-je de son grand tableau de bataille ? Il faut le voir. Comment rendre le mouvement, la mêlée, le tumulte d’une foule d’hommes jetés confusément les uns à travers les autres ? Comment peindre cet homme renversé qui a la tête fracassée, et dont le sang s’échappe entre les doigts de la main qu’il porte à sa blessure ; et ce cavalier qui, monté sur un cheval blanc, foule les morts et les mourants ? Il perdra la vie avant de quitter son drapeau. Il le tient d’une main ; de l’autre il menace d’un revers de sabre celui qui lui appuie un coup de pistolet pendant qu’un autre lui saisit le bras. Comment sortira-t-il de danger ? Un cheval tient le sien mordu par le cou, un fantassin est prêt à lui enfoncer sa pique dans le poitrail. Le feu, la poussière et la fumée, éclairent d’un côté et couvrent de l’autre une multitude infinie d’actions qui remplissent un vaste champ de bataille. Quelle couleur ! quelle lumière ! quelle étendue de scène ! Les cuirasses rouges, vertes ou bleues, selon les objets qui s’y peignent, sont toujours d’acier ; c’est pour la machine une des plus fortes compositions qu’il y ait au Salon. On reproche à Casanove d’avoir donné un peu trop de fraîcheur à

  1. Jean-Georges Wille, né aux environs de Kœnigsberg en 1715, académicien, mort en 1808 à Paris.
  2. Il avait gravé le portrait de M. de Marigny, d’après Tocqué.
  3. François Casanova, né à Londres en 1730. Reçu à l’Académie en 1763, mort à Brühl (Autriche) en mars 1805. Il n’est point porté au livret de cette année 1761.