Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, X.djvu/219

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le voir et le servir. Les enfants sont officieux. On voit ses petits doigts sur le haut du fauteuil.

Un autre plus âgé est à ses pieds et arrange sa couverture.

Devant lui, un tout à fait jeune s’est glissé entre lui et son gendre et lui présente un chardonneret. Comme il tient l’oiseau ! comme il l’offre ! Il croit que cela va guérir le grand-papa.

Plus loin, à droite du vieillard, est sa fille mariée. Elle écoute avec joie ce que son père dit à son mari. Elle est assise sur un tabouret, elle a la tête appuyée sur sa main ; elle a sur ses genoux l’Écriture sainte. Elle a suspendu la lecture qu’elle faisait au bonhomme.

À côté de la fille est sa mère et l’épouse du paralytique ; elle est aussi assise sur une chaise de paille. Elle recousait une chemise. Je suis sûr qu’elle a l’ouïe dure, elle a cessé son ouvrage, elle avance de côté sa tête pour entendre.

Du même côté, tout à fait à l’extrémité du tableau, une servante, qui était à ses fonctions, prête aussi l’oreille.

Tout est rapporté au principal personnage, et ce qu’on fait dans le moment présent et ce qu’on faisait dans le moment précédent.

Il n’y a pas jusqu’au fond qui ne rappelle les soins qu’on prend du vieillard. C’est un grand drap suspendu sur une corde et qui sèche ; ce drap est très-bien imaginé, et pour le sujet du tableau et pour l’effet de l’art. On se doute bien que le peintre n’a pas manqué de le peindre largement.

Chacun ici a précisément le degré d’intérêt qui convient à l’âge et au caractère. Le nombre des personnages rassemblés dans un assez petit espace est fort grand ; cependant ils y sont sans confusion, car ce maître excelle surtout à ordonner sa scène. La couleur des chairs est vraie ; les étoffes sont bien soignées ; point de gêne dans les mouvements ; chacun est à ce qu’il fait. Les enfants les plus jeunes sont gais, parce qu’ils ne sont pas encore dans l’âge où l’on sent. La commisération s’annonce fortement dans les plus grands. Le gendre paraît le plus touché, parce que c’est à lui que le malade adresse ses discours et ses regards. La fille mariée paraît écouter plutôt avec plaisir qu’avec douleur. L’intérêt est sinon éteint, du moins presque insensible dans la vieille mère, et cela est tout à fait dans la nature : Jam proximus ardet Ucalegon, elle ne peut plus se