du sentiment de l’honnête ? Le premier n’a-t-il pas ses caprices ? N’a-t-il pas eu un législateur ? Et ce législateur quel est-il ?
Le sentiment du beau est le résultat d’une longue suite d’observations ; et ces observations, quand les a-t-on faites ? En tout temps, à tout instant. Ce sont ces observations qui dispensent de l’analyse. Le goût a prononcé longtemps avant que de connaître le motif de son jugement ; il le cherche quelquefois sans le trouver, et cependant il persiste.
Je me souviens de m’être promené dans les jardins de Trianon. C’était au coucher du soleil ; l’air était embaumé du parfum des fleurs. Je me disais : Les Tuileries sont belles ; mais il est plus doux d’être ici.
La nature commune fut le premier modèle de l’art. Le succès de l’imitation d’une nature moins commune fit sentir l’avantage du choix ; et le choix le plus rigoureux conduisit à la nécessité d’embellir ou de rassembler dans un seul objet les beautés que la nature ne montrait éparses que dans un grand nombre. Mais comment établit-on l’unité entre tant de parties empruntées de différents modèles ? Ce fut l’ouvrage du temps.
Tous disent que le goût est antérieur à toutes les règles ; peu savent le pourquoi. Le goût, le bon goût est aussi vieux que le monde, l’homme et la vertu ; les siècles ne l’ont que perfectionné.
J’en demande pardon à Aristote ; mais c’est une critique vicieuse que de déduire des règles exclusives des ouvrages les plus parfaits, comme si les moyens de plaire n’étaient pas infinis. Il n’y a presque aucune de ces règles que le génie ne puisse enfreindre avec succès. Il est vrai que la troupe des esclaves, tout en admirant, crie au sacrilège.
Les règles ont fait de l’art une routine ; et je ne sais si elles