Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XIX.djvu/230

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ce bras montre le ciel de l’index. L’épouse est à côté d’elle, un bras appuyé sur la cuisse de la Religion, en disant de l’autre : Voyez, il me fait place ; il m’appelle. L’Amour Conjugal, placé de l’autre côté, l’invite à se reposer auprès de son époux ; mais la Religion interpose sa main, et lui dit : J’approuve votre douleur ; mais il faut attendre l’ordre d’en haut. Cependant la France, assise aux pieds de la couche, et le dos tourné à la scène, médite sur la perte qu’elle vient de faire. Elle tient le plus petit des enfants caché dans son giron. L’un des deux autres a la main posée sur l’épaule de son père. Il a la bouche ouverte ; il crie ; il l’appelle avec douleur et effroi. L’aîné, debout, attache ses regards sur la Religion ; il attend de sa bouche un mot qui lui conserve sa mère. J’ajoute que si l’on trouve le monument trop riche, on n’a qu’à supprimer la France et les trois enfants, et qu’il n’en sera que plus simple et plus beau. Je n’entre point dans le caractère, la position, les différents groupes, les vêtements, le mouvement ; l’action de ces figures. J’ai donné toutes ces choses de technique : je ne vous expose que l’idée.

Ce premier monument montre le moment du sommeil. J’ai voulu montrer, dans le second, celui du réveil, le moment du triomphe de la vertu à la venue du grand jour. Je place au pied de la couche funèbre un grand ange qui sonne le réveil des morts. L’épouse et l’époux se sont, réveillés. Ils se reconnaissent avec une joie mêlée de surprise. L’époux a un de ses bras jeté sur les épaules de sa moitié. Ils se disent : Ah ! c’est vous ! Je vous revois, je ne vous perdrai plus ! Ils se sont relevés de dessus leurs oreillers. Ils sont assis au chevet du lit funéraire ; du côté de l’épouse, c’est l’Amour Conjugal qui rallume ses flambeaux en les secouant l’un sur l’autre ; du côté de l’époux, c’est la Religion, une main posée sur l’épaule de l’Amour Conjugal, son visage tourné et son second bras étendu vers une autre figure assise de son côté sur les bords de sa couche. Cette autre figure, c’est la Justice éternelle, les reins ceints du serpent qui se mord la queue, les pieds posés sur les attributs de la grandeur humaine éclipsée, ayant sur les genoux les balances où elle pèse les actions des hommes, et présentant à la Religion deux couronnes d’étoiles. Ou je me trompe fort, ou vous trouverez mes images grandes.

Voici le troisième monument que je propose. Imaginez un