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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XX.djvu/74

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édition de l’ouvrage, de l’abbé Raynal ; et voici la réponse de M"* Biberon à la proposition que je lui ai faite de passer en Russie. Je vous supplie de communiquer cette réponse à Sa Majesté Impériale.

Mlle Biheron sera très-flattée de contribuer, pour sa petite part, à la perfection des établissements ordonnés par une souveraine qui honore le trône et son sexe, et qui n’a pas dédaigné de jeter les yeux sur elle. Ce sont les mots mêmes de Mlle Biheron. Elle fera partir tous ses ouvrages par la mer. Pour elle, il lui est impossible d’aller autrement que par terre ; elle a cinquante-cinq ans ; elle commence à devenir vieillotte ; sa santé a beaucoup souffert de la continuité de ses travaux. Elle a fait deux fois le voyage d’Angleterre, et chaque traversée a pensé lui coûter la vie. Ce n’est ni pusillanimité ni délicatesse ; elle ne balancerait pas à s’embarquer à Rouen, sans les expériences fâcheuses qu’elle a par devers elle.

Elle s’engage : 1° À démontrer l’anatomie à vos jeunes demoiselles, sur ses pièces ;

2° À dresser des maîtresses qui puissent, quand elle n’y sera plus, en former d’autres et continuer les démonstrations anatomiques dans la maison aussi parfaitement qu’elle, et cela tant qu’il y aura des élèves ;

3° S’il se trouve un sujet de quelque sexe qu’il soit, avec le talent et le goût nécessaires pour la copier, l’égaler, la surpasser même, à le former, à l’instruire, à ne lui rien celer de sa manière d’opérer ; ce qui ajouterait une nouvelle occupation très-singulière et très-intéressante à la multiplicité de celles que vous présentez à l’inclination naturelle de vos demoiselles ;

4° Elle ne met aucun prix à ses pièces anatomiques, qui sont en très-grand nombre ; ce qu’elle en exécutera à Pétersbourg d’année en année fera suite avec sa collection. Le tout restera dans la maison, et elle n’a pas le moindre souci sur le sort qu’il plaira à Sa Majesté Impériale de lui faire ;

5° Elle n’est pas plus inquiète de l’honoraire qu’il plaira à Sa Majesté Impériale d’attacher soit aux leçons qu’elle donnera aux jeunes demoiselles, soit à la peine qu’elle prendra pour former des maîtresses et pour instruire un sujet aux procédés de son art ;