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cessaires à la vigne. Otez les pampres & les sarmens sans fruit. Coupez les chênes & les aunes pour qu’ils pelent. Emondez & entez les oliviers. Soignez les mouches à miel, & plus encore les vers à soie. Tondez les brebis. Faites beurre & fromage. Remplissez vos vins. Châtrez vos veaux. Allez chercher dans les forêts du jeune feuillage pour vos bestiaux.

En Juin. Continuez les labours & les semailles des mois précédens. Ebourgeonnez & liez la vigne. Continuez de soigner les mouches, & de châtrer les veaux. Faites provision de beurre & de fromage. Si vous êtes en pays froid, tondez vos brebis. Donnez le deuxieme labour aux jacheres. Charriez les fumiers & la marne. Préparez & nettoyez l’aire de la grange. Châtrez les mouches à miel. Tenez leurs ruches nettes. Fauchez les prés, & autres verdages. Fanez le foin. Recueillez les légumes qui sont en maturité. Sciez sur la fin du mois vos orges quarrés. En Italie, vous commencerez à dépouiller vos fromens, partout vous vous disposerez à la moisson. Battez du blé pour la semaille. Dépouillez les cerisiers. Amassez des claies, & parquez les bestiaux.

En Juillet. Achevez de biner les jacheres. Continuez de porter les fumiers. Dépouillez les orges de primeur, les navettes, colsas, lins, vers à soie, récoltes, les légumes d’été. Serrez ceux d’hyver. Donnez le troisieme labour à la vigne. Otez le chiendent. Unissez la terre pour conserver les racines. Déchargez les pommiers & les poiriers des fruits gâtés & superflus. Ramassez ceux que les vents auront abattus, & faites-en du cidre de primeur. Faites couvrir vos vaches. Visitez vos troupeaux. Coupez les foins. Vuidez & nettoyez vos granges. Retenez des moissonneurs. En climat chaud, achetez à vos brebis des beliers, & rechaussez les arbres qui sont en plein vent.

En Août. Achevez la moisson. Arrachez le chanvre. Faites le verjus. En pays froid, effeuillez les seps tardifs ; en pays chaud, ombragez-les. Commencez à donner le troisieme labour aux jacheres. Battez le seigle pour la semaille prochaine. Continuez de fumer les terres. Cherchez des sources, s’il vous en faut, vous aurez de l’eau toute l’année, quand vous en trouverez en Août. Faites la chasse aux guêpes. Mettez le feu dans les pâtis pour en consumer les mauvaises herbes. Préparez vos pressoirs, vos cuves, vos tonneaux, & le reste de l’attirail de la vendange.

En Septembre. Achevez de dépouiller les grains & les chanvres, & de labourer les jacheres ; fumez les terres ; retournez le fumier ; fauchez la deuxieme coupe des prés ; cueillez le houblon, le senevé, les pommes, les poires, les noix, & autres fruits d’automne ; ramassez le chaume pour couvrir vos étables ; commencez à semer les seigles, le méteil & même le froment ; coupez les riz & les millets ; cueillez & préparez le pastel & la garence ; vendangez sur la fin du mois. En pays chaud, semez les pois, la vesce, le sénegré, la dragée, &c. cassez les terres pour le sainfoin ; faites de nouveaux prés ; raccommodez les vieux ; semez les lupins, & autres grains de la même nature, & faites amas de cochons maigres pour la glandée.

En Octobre. Achevez votre vendange & vos vins, & la semaille des blés ; recueillez le miel & la cire ; nettoyez les ruches ; achevez la récolte du safran ; serrez les orangers ; semez les lupins, l’orge quarré, les pois, les féverolles, l’hyvernache ; faites le cidre & le résiné ; plantez les oliviers ; déchaussez ceux qui sont en pié ; confisez les olives blanches ; commencez sur la fin de ce mois à provigner la vigne, à la rueller, si c’est l’usage ; veillez aux vins nouveaux ; commencez à abattre les bois, à tirer la marne & à planter. En pays chaud, depuis le 10 jusqu’au

23, vous semerez le froment ras & barbu, & même le lin, qu’on ne met ici en terre qu’au printems.

En Novembre. Continuez les cidres ; abattez les bois ; plantez, provignez & déchaussez la vigne ; amassez les olives quand elles commencent à changer de couleur, tirez-en les premieres huiles ; plantez les oliviers, taillez les autres ; semez de nouveaux piés ; récoltez les marons & chataignes, la garence & les osiers ; serrez les fruits d’automne & d’hyver ; amassez du gland pour le cochon ; serrez les raves ; ramassez & faites sécher des herbes pour les bestiaux ; charriez les fumiers & la marne ; liez les vignes ; rapportez & serrez les échalas ; coupez les branches de saules ; tillez-les ou fendez ; faites l’huile de noix ; commencez à tailler la vigne ; émondez les arbres ; coupez les bois à bâtir & à chauffer ; nettoyez les ruches, & visitez vos serres & vos fruiteries. On a dans un climat chaud des moutons dès ce mois ; on lâche le bouc aux chevres ; on seme le blé ras & barbu, les orges, les féves & le lin. En pays froid & tempéré, cette semaille ne se fait qu’en Mars.

En Décembre. Défrichez les bois, coupez-en pour bâtir & chauffer ; fumez & marnez vos terres ; battez votre blé ; faites des échalas, des paniers de jonc & d’osier, des rateaux, des manches ; préparez vos outils ; raccommodez vos harnois & vos ustensiles ; tuez & salez le cochon ; couvrez de fumier les piés des arbres & les légumes que vous voulez garder jusqu’au printems ; visitez vos terres ; étêtez vos peupliers & vos autres arbres, si vous voulez qu’ils poussent fortement au printems ; tendez des rets & des piéges, & recommencez votre année. Voyez le détail de chacune de ces opération à leurs articles.

Voilà l’année, le travail & la maniere de travailler de nos laboureurs. Mais un Auteur Anglois a proposé un nouveau système d’agriculture que nous allons expliquer, d’après la traduction que M. Duhamel nous a donnée de l’ouvrage Anglois, enrichi de ses propres découvertes.

M. Tull distingue les racines, en pivotantes qui s’enfoncent verticalement dans la terre, & qui soûtiennent les grandes plantes, comme les chênes & les noyers ; & en rampantes, qui s’étendent parallelement à la surface de la terre. Il prétend que celles-ci sont beaucoup plus propres à recueillir les sucs nourriciers que celles-là. Il démontre ensuite que les feuilles sont des organes très-nécessaires à la santé des plantes, & nous rapporterons à l’article Feuille les preuves qu’il en donne : d’où il conclut que c’est faire un tort considerable aux lusernes & aux sainfoins, que de les faire paître trop souvent par le bétail, & qu’il pourroit bien n’être pas aussi avantageux qu’on se l’imagine de mettre les troupeaux dans les blés quand ils sont trop forts.

Après avoir examiné les organes de la vie des plantes, la racine & la feuille, M. Tull passe à leur nourriture : il pense que ce n’est autre chose qu’une poudre très-fine, ce qui n’est pas sans vraissemblance, ni sans difficulté ; car il paroît que les substances intégrantes de la terre doivent être dissolubles dans l’eau, & les molécules de terre ne semblent pas avoir cette propriété : c’est l’observation de M. Duhamel. M. Tull se fait ensuite une question très-embarrassante ; il se demande si toutes les plantes se nourrissent d’un même suc ; il le pense : mais plusieurs Auteurs ne sont pas de son avis ; & ils remarquent très bien que telle terre est épuisée pour une plante, qui ne l’est pas pour une autre plante ; que des arbres plantés dans une terre où il y en a eu beaucoup & long-tems de la même espece, n’y viennent pas si bien que d’autres arbres ; que les sucs dont l’orge se nourrit, étant plus analogues à ceux qui nourrissent le blé, la terre en est plus épuisée qu’elle ne l’eût été par l’avoine ; & par conséquent que tout étant égal