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que pour les arbres. Le rejetton est un moyen simple & prompt : mais il n’y a que de petits arbres, & les plus communs qui en produisent. Enfin la branche couchée, la marcotte, ou le provin, est un autre expédient que l’on employe pour la multiplication ; c’est celui qui convient le moins pour les grands arbres. Ceux qu’on multiplie de cette façon pechent ordinairement par les racines qui sont trop foibles, en petite quantité, & placées le plus souvent d’un seul côté. On ne parle pas ici de la multiplication par les racines & par les feuilles, qui est plus curieuse qu’utile. Tous les arbres cependant ne se prêtent pas à toutes ces façons de les multiplier ; il y en a qui ne réussissent que par un seul de ces moyens, & ce n’est pas toûjours celui de la graine ; beaucoup d’arbres n’en produisent point dans les climats qui leur sont étrangers.

Les arbres des forêts ne sont pas les mêmes partout, le chêne domine plus généralement dans les climats tempérés & dans les terreins plats ; on le trouve aussi dans les côteaux avec le hêtre si le terrein est cretacée ; avec le châtaignier, s’il est sablonneux & humide ; avec le charme, partout où la terre est ferme & le terrein pierreux ; partout où il y a des sources, le frêne vient bien. Les arbres aquatiques tels que le peuplier, l’aune, le saule, &c. se trouvent dans les terreins marécageux ; au contraire les arbres résineux, comme sont les pins, le sapin, le melese, &c. sont sur les plus hautes montagnes, &c.

On distingue en général les arbres fruitiers qui portent des fruits à noyau, de ceux dont les fruits n’ont que des pepins. On s’efforce continuellement de les multiplier les uns & les autres : mais c’est moins par la semence, qui donne cependant de nouvelles especes, que par la greffe qui perfectionne le fruit. C’est par le moyen de la taille, opération la plus difficile du jardinage, que l’on donne aux arbres fruitiers de la durée, de l’abondance, & de la propreté. Les arbres d’ornement servent à former des avenues & des allées auxquelles on emploie plus ordinairement l’orme, le tilleul, le châtaignier, le peuplier, l’épicéas, le platane qui est le plus beau & le plus convenable de tous les arbres pour cet objet. On employe d’autres arbres à faire des plantations, à garnir des bosquets, à former des portiques, des berceaux, des palissades, & à orner des plates-bandes, des amphithéatres, des terrasses, &c. Dans tous ces cas la variété du feuillage, des fleurs & des formes que l’on donne aux arbres, plaît aux yeux, & produit un beau spectacle, si tout y est disposé avec goût. Voyez Plante. (I)

* Le Jardinier s’occupe de l’arbre de cinq manieres principales : 1°. du choix des arbres : 2°. de la préparation qu’il est à propos de leur donner, avant que de les planter : 3°. de leur plantation : 4°. de leur multiplication : 5°. de leur entretien. Nous allons parcourir les regles générales que l’on doit observer dans la plûpart de ces occasions ; & nous finirons cet article par quelques observations plus curieuses qu’importantes, qu’on a faites sur les arbres.

1°. Du choix des arbres. Prenez plus de poiriers d’automne que d’été, & plus d’hyver que d’automne : appliquez la même regle aux pommiers & aux autres arbres, mutatis mutandis ; ceux qui donnent leur fruit tard, relativement aux autres de la même espece, sont préférables. Gardez-vous de prendre les poiriers qui auront été greffés sur de vieux amandiers, de quatre à cinq pouces : rejettez ceux qui auront plus d’un an de greffe. Les premiers, pour être bons, doivent avoir trois ou quatre pouces. Les arbres greffés sur coignassier, sont les meilleurs pour des arbres nains : prenez les jeunes arbres avant trois ans ; trop jeunes, ils seroient trop long-tems à se mettre en buisson ; trop vieux, on n’en obtiendroit que des productions chétives : rejettez les arbres moussus, noüeux, gom-

més, rabougris & chancreux. Que ceux que vous

préfererez ayent les racines saines & belles ; que la greffe en ait bien recouvert le jet ; qu’ils soient bien fournis de branches par le bas ; qu’ils soient de belle venue. Les pêchers & les abricotiers doivent avoir été greffés d’un an seulement. Il suffira que les pommiers greffés sur paradis, ayent un pouce d’épaisseur. Pour les arbres de tige, ils n’en seront que meilleurs, s’ils ont quatre à cinq pouces d’épaisseur, sur sept à huit piés de haut. Prenez, si vous êtes dans le cas de les choisir sur pié, ceux qui auront poussé vigoureusement dans l’année, qui vous paroîtront sains, tant à la feuille qu’à l’extrémité du jet, & qui auront l’écorce unie & luisante. Les pêchers qui ont plus d’un an de greffe, & qui n’ont point été recépés en bas, sont mauvais. Il en est de même de ceux qui par bas ont plus de trois pouces, ou moins de deux de grosseur, & de ceux qui sont greffés sur des arbres de quatre à cinq pouces. Que les nains ou arbres d’espaliers soient droits, d’un seul brin & d’une seule greffe ; qu’ils soient sans aucune branche par bas ; qu’on y apperçoive seulement de bons yeux. Que si l’on ne choisit pas les arbres sur pié, mais arrachés ; outre toutes les observations précédentes, il faut encore veiller à ce qu’ils n’aient point été arrachés depuis trop long-tems, ce qui se reconnoîtra à la secheresse du bois, & aux rides de l’ecorce : s’ils ont l’écorce bien écorchée, l’endroit de la greffe étranglé de filasse ; la greffe trop basse, laissez-les, si surtout ce sont des pêchers. Examinez particulierement les racines ; que le nombre & la grosseur en soient proportionnes à l’âge & à la force de l’arbre ; qu’il y en ait une au moins, à peu près de la grosseur de la tige ; les racines foibles & chevelues marquent un arbre foible ; qu’elles ne soient ni seches, ni dures, ni pourries, ni écorchées, ni éclatées, ni rongées : distinguez bien les jeunes racines des vieilles ; & exigez scrupuleusement que les jeunes aient les conditions requises pour être bonnes ; les jeunes racines sont les plus voisines de la surface de la terre, & rougeâtres & unies aux poiriers, pruniers, sauvageons, &c. blanchâtres aux amandiers, jaunâtres aux mûriers, & rougeâtres aux cerisiers.

2°. De la préparation des arbres à planter. Il y a deux choses à préparer, la tête & le pié. Pour la tête, que l’arbre soit de tige, qu’il soit nain ; comme on l’a fort affoibli en l’arrachant, il faut 1° lui ôter de sa tête à proportion des forces qu’il a perdues. Il y en a qui different jusqu’au mois de Mars à décharger un arbre de sa tête ; d’autres font cette opération dès l’automne, & tout en plantant l’arbre, observant de mastiquer le bout des branches coupées, afin qu’elles ne souffrent pas des rigueurs du froid. 2° Il faut lui ôter de sa tête, selon l’usage auquel on le destine. Si l’on veut que l’arbre fasse son effet par-bas, comme on le requiert des buissons & des espaliers, il faut les couper courts ; au contraire, si l’on veut qu’ils gagnent en hauteur. Voyez à l’article Taille, toutes les modifications que doit comporter cette opération. Mais on ne travaille guere à la tête des arbres, qu’on n’ait opéré sur les racines & au pié.

Quant aux racines, séparez-en tout le chevelu le plus près que vous pourrez, à moins que vous ne plantiez votre arbre immédiatement après qu’il a été arraché. L’action de l’air flétrit très-promptement ces filets blancs qu’il importe de conserver sains, mais qu’il n’importe pas moins d’enlever & de détacher pour peu qu’ils soient malades. La soustraction de ce chevelu met les racines à découvert & expose les bonnes & les mauvaises. Voyez sur le caractere des racines ce que nous avons dit à la fin de l’article précédent ; séparez les mauvaises, & donnez aux bonnes leur juste longueur. La plus longue racine d’un arbre nain n’aura pas plus de huit à neuf pouces ; celle d’un arbre de tige n’aura pas plus d’un pié. Laissez, si vous