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soie qui passera dans un tour de l’asple des bobines sur la circonférence de l’asple sera grande, & moins elle sera torse. Mais il y a un inconvénient singulier à tous les asples, & qui rend le tors du fil & de la soie variable ; c’est qu’à mesure que l’échevau se forme sur l’asple, l’épaisseur de cet échevau s’ajoûte au diametre de l’asple ; & à mesure que cette épaisseur augmente, en même proportion il y a dans un tour de l’asple plus de soie devidée de dessus les bobines sur la circonférence de l’asple sur la fin, qu’au commencement de la formation de l’échevau : d’où il s’ensuit que la soie est moins torse à la fin qu’au commencement, & dans tout le tems de la formation de l’échevau. Les Piémontois, & en général tous les mouliniers en soie, ont bien senti cet inconvénient ; & ils n’ont jusqu’à présent rien imaginé de mieux, que de faire des écheveaux extrèmement légers.

En effet, ce qu’ils appellent un matteau de soie pese environ deux onces ; & le matteau contient huit échevaux. Il est constant que moins l’échevau pesera, moins il aura d’épaisseur sur l’asple, & plus le tors approchera de l’égalité : mais le tors ne sera pourtant jamais parfaitement égal ; car l’échevau aura toûjours quelqu’épaisseur.

C’est ce que M. de Vaucanson a bien senti, & ce que j’avois remarqué comme lui. Je ne sai point encore comment ce savant méchanicien a remédié à cet inconvénient : quant à moi, j’avois pensé plus d’un an avant qu’il lût son mémoire à l’Académie, qu’outre la précaution des Piémontois de faire des échevaux très-légers, il falloit encore donner un mouvement de va-&-vient horisontal à la tringle à travers laquelle passent les fils au sortir de dessus les bobines, & qui les conduit sur l’asple ; par ce moyen les fil, se trouvant répandus sur une plus grande lisiere ou zone de l’asple, l’épaisseur des échevaux seroit encore moindre, & le tors plus égal. Quant à l’autre défaut du moulin, qui naît de l’irrégularité du mouvement des fuseaux, j’avois pensé, il y a plus de quinze mois, à y remédier avec des pignons à dents, & une chaîne ; & M. Goussier en avoit dessiné la figure selon mes idées. J’ai montré cette figure depuis à quelques personnes qui ont entendu la lecture du mémoire de M. de Vaucanson, & à d’autres qui ont vû sa machine ; & les unes & les autres m’ont assûré que nous nous étions rencontrés exactement dans le même méchanisme ; avec cette différence que mes fuseaux sont ajustés de maniere qu’on peut les placer & les déplacer sur le champ sans aucun inconvénient, & avec toute la promptitude qu’on peut desirer : mais en revanche, je n’avois pas imaginé, ainsi que l’a fait M. de Vaucanson, de faire avertir par une sonnerie appliquée à chaque bobine celui qui est au moulin, que la bobine est finie, & qu’il en faut mettre une autre.

* ASPOREUS, montagne d’Asie proche de Pergame. Il y avoit un temple bâti à l’honneur de la mere des dieux, appellé du nom de la montagne Asporenum ; & la déesse en fut aussi nommée Asporena.

* ASPRA, (Géog. anc. & mod.) ville d’Italie dans l’état de l’Eglise, sur la riviere d’Aja, entre Tivoli & Terni. Elle étoit autrefois du territoire des Sabins, & s’appelloit Casperia, & Casperula.

ASPRE, s. f. (Commer.) petite monnoie de Turquie qui valoit autrefois huit deniers de notre monnoie. Lorsqu’elle étoit de bon argent, selon la taxe, il en falloit quatre-vingts pour un écu : mais dans les provinces éloignées les Bachas en font fabriquer une si grande quantité de fausses & de bas aloi, qu’à présent on en donne jusqu’à cent vingt pour une rixdale, ou un écu. L’aspre vaut aujourd’hui environ six deniers, ou deux liards monnoie de France. Guer. mœurs & usag. des Turcs, tome II. (G)

* ASPRES, petite ville de France au haut Dau-

phiné, dans le Gapençois, à sept lieues de Sisteron.

* ASPRESLE, s. f. (Hist. nat. bot.) plante aquatique, d’un verd foncé, à feuille longue & mince, & à tiges rondes, divisées par nœuds, & si rudes, qu’on s’en sert pour polir le bois, & même le fer. Pour cet effet, on emmanche des fils de fer de 3 ou 4 pouces de long dans un morceau de bois ; on casse l’aspresle au-dessus des nœuds, & l’on insere un des fils de fer dans la cavité de la tige ; & ainsi des autres fils de fer. Ces fils de fer soûtiennent l’écorce dont ils sont revêtus, & l’appliquent fortement contre les pieces d’ouvrages à polir, sans qu’elle se brise.

* ASPROPITI, ou CHALEOS, petite ville de la Turquie en Europe. Elle est dans la Livadie, partie de la Grece, sur le golfe de Lepante.

* ASPROPOTAMO, riviere de la Grece dans la partie méridionale, & au Despotat. Elle a sa source au mont Mezzovo, coule vers le midi, & se jette dans la mer Ionienne vis-à-vis les îles Coursolaires.

* ASSA, s. f. (Mat. Med.) Il y a sous le nom d’assa deux especes de suc concret. L’assa dulcis, & c’est le benjoin. Voyez Benjoin. l’assa fœtida, ainsi appellée à cause de sa grande puanteur. Celle-ci est une espece de gomme compacte, molle comme la cire, composée de grumeaux brillans, en partie blanchâtres ou jaunâtres, en partie roussâtres, de couleur de chair ou de violette ; en gros morceaux, d’une odeur puante, & qui tient de celle de l’ail, mais qui est plus forte, amere, acre, & mordicante au goût. On en a dans les boutiques de l’impure, qui est brune & sale ; & de la pure, qui est rougeâtre, transparente, & parsemée de belles larmes blanches. Il faut la prendre récente, pénétrante, fœtide, pas trop grasse, & chargée de grumeaux brillans & nets. La vieille, grasse, noire, opaque, & mêlée de sable, d’écorce, & d’autres matieres étrangeres, est à laisser. Les anciens ont connu ce suc ; ils en faisoient usage dans leurs cuisines. Ils avoient le Cyrénaïque, & le Persan ou Mede. Le premier étoit de la Cyrénaïque, & le meilleur ; l’autre venoit de Médie ou de Perse.

Le Cyrénaïque répandoit une odeur forte de myrrhe, d’ail & de poireau, & on l’appelloit par cette raison scordolasarum. Il n’y en avoit déjà plus au tems de Pline. On ne trouva sous Néron, dans toute la province Cyrénaïque, qu’une seule plante de laserpitium, qu’on envoya à ce prince.

On a long-tems disputé pour savoir si l’assa fœtida étoit ou non le silphium, le laser, & le suc Cyrénaïque des anciens. Mais puisqu’on est d’accord que la Perse est le lieu natal du laser & de l’assa fœtida ; que l’usage que les anciens en font aujourd’hui est le même que celui que les anciens faisoient du laser ; qu’on estime également l’un & l’autre ; que l’assa fœtida se prépare exactement comme on préparoit jadis le suc du silphium Cyrénaïque, & qu’ils avoient à peu près la même puanteur ; il faut convenir de plus que le silphium, le laser, & l’assa fœtida des boutiques ne sont pas des sucs différens.

Le silphium des Grecs & le laserpitium des Latins avoit, selon Théophraste & Dioscoride, la racine grosse, la tige semblable à celle de la férule, la feuille comme l’ache, & la graine large & feuillée. Ceux qui ont écrit dans la suite sur cette plante n’ont rien éclairci, si l’on en excepte Kempfer.

Kempfer s’assûra dans son voyage de Perse que la plante s’appelle dans ce pays hingiseh, & la larme hüng. Cet auteur dit que la racine de la plante dure plusieurs années ; qu’elle est grande, pesante, nue, noire en-dehors, lisse, quand elle est dans une terre limoneuse, raboteuse & comme ridée, quand elle est dans le sable ; simple le plus souvent comme celle