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est la patrie ; car quoique cette ville s’occupe principalement du commerce, elle a cependant produit au xvij. siecle des hommes célebres dans les sciences & les beaux-arts.

Le Chevalier d’Arvieux, mort en 1701, s’est illustré par ses voyages, par ses emplois, & par son érudition orientale.

Le P. Feuillée minime, s’est distingué par son journal d’observations astronomiques & botaniques, en 3 vol. in-4o., imprimés au Louvre.

Jules Mascaron, évêque de Tulles & puis d’Agen, où il finit sa carriere en 1703, à 69 ans, prononça des oraisons funèbres, qui balancerent d’abord celles de Bossuet ; mais il est vrai qu’aujourd’hui elles ne servent qu’à faire voir combien Bossuet étoit un grand homme.

Charles Plumier, un des habiles botanistes de l’Europe, fit trois voyages aux isles Antilles pour herboriser. Il alloit une quatrieme fois en Amérique dans la même vûe, lorsqu’il mourut près de Cadix, en 1706. On connoit ses beaux ouvrages sur les plantes d’Amérique, & son traité de l’art de tourner, qu’il avoit appris du P. Maignan, religieux minime comme lui.

Antoine de Ruffi, mort conseiller d’état en 1689, a par-devers lui trop de titres honorables pour que je supprime son nom. Auteur d’une bonne histoire de Marseille & des comtes de Provence, il joignit l’intégrité la plus délicate à sa vaste érudition. Etant membre de la sénéchaussée de sa patrie, & se reprochant de n’avoir pas assez approfondi la cause d’un plaideur dont il étoit rapporteur, il lui remit la somme de la perte de son procés.

Honoré d’Urfé, le cinquieme de six fils, & le frere de six sœurs, s’est rendu fameux par son roman de l’Astrée. Il épousa, dit M. de Voltaire, Diane de Châteaumorand, séparée de son frere, de laquelle il étoit amoureux, & qu’il a déguisée dans son roman sous le nom d’Astrée & de Diane, comme il s’y est caché lui-même, sous ceux de Céladon & de Sylvandre. Il mourut en 1625, à 58 ans.

Il faut réserver l’article du Puget, né à Marseille, au mot Sculpteur moderne, à cause de son mérite éminent dans ce bel art. (D. J.)

Il y a à Marseille une académie des Belles-lettres. Elle fut établie en 1726 par lettres-patentes du roi sous la protection de feu M. le maréchal duc de Villars, gouverneur de Provence, & adoptée en même tems par l’académie Françoise, à laquelle elle envoie pour tribut annuel un ouvrage de sa composition, en prose ou en vers. Les objets que se propose cette académie sont l’Eloquence, la Poésie, l’Histoire & la Critique. Toute matiere de controverse sur le fait de la religion y est interdite. Les académiciens sont au nombre de vingt & ont trois officiers, un directeur, un chancelier & un secrétaire. Le sort renouvelle tous les ans les deux premiers, mais le secrétaire est perpétuel. Le directeur est chef de la compagnie pendant son année d’exercice, il porte la parole & recueille les voix. Le chancelier tient le sceau de l’académie, & fait l’office de trésorier. Le secrétaire écrit les lettres au nom de l’académie, fait l’éloge historique des académiciens qui meurent, & supplée le directeur & le chancelier en leur absence. L’académie a vingt associés étrangers, dont chacun est obligé de lui envoyer tous les ans un ouvrage de sa composition, & qui ont droit de séance dans l’académie lorsqu’ils sont présens. Il leur est permis de travailler pour le prix fondé par M. le maréchal de Villars, à moins qu’ils ne viennent s’établir à Marseille. Ce prix étoit donné tous les ans par la libéralité du protecteur ; mais il le fonda en 1733 par un contrat de rente annuelle de 300 livres qui doivent être employées en une mé-

daille d’or qu’on donne tous les ans d’un ouvrage en

prose ou en vers alternativement, dent l’académie propose le sujet. Cette medaille qui portoit d’abord d’un côté le nom du protecteur, & au revers la devise de l’académie, porte maintenant d’un côté le buste, & au revers la devise du marechal de Villars. Le duc de Villars son fils lui a succede dans la place de protecteur.

L’académie de Marseille s’assemble tous les mercredis, depuis trois heures après midi jusqu’a cinq, dans la salle que le roi lui a accordée à l’arsenal ; ses vacances durent depuis la S. Louis jusqu’au premier mercredi après la S. Martin. Elle tient tous les ans le 25 Août une assemblée publique où elle adjuge le prix. Elle accorde la vetérance à ceux des académiciens qui vont se domicilier hors de Marseille, ou à qui leur âge & leurs infirmités ne permettent plus d’assister aux assemblées, & quoiqu’on les remplace par de nouveaux sujets, ils ont tou ours droit de séance & voix consultative aux assembles Il faut avoir les deux tiers des suffrages pour être élu académicien ou associé, & les électeurs doivent être au-moins au nombre de douze. En 1734 l’académie obtint du roi la permission de s’associer dix personnes versées dans les sciences, telles que la Physique, les Mathématiques, &c. La devise de l’académie est un phénix sur son bucher renaissant de sa cendre aux rayons d’un soleil naissant, avec ces mots pour ame, prunis renascor radus, par allusion à cette académie de Marseille, si fameuse dans l’antiquité, & qui est en quelque sorte ressuscitée au commencement du regne de Louis XV. dont le soleil est l’embleme. Morery.

MARSES, les, (Géog. anc.) en latin Marsi, anciens peuples d’Italie aux environs du lac Fucin, aujourd’hui le lac de Célano. On croit communément qu’ils avoient les Vestins au nord, les Pélignes & les Samnites à l’orient, le Latium au midi, & les Sabins à l’occident.

Les anciens leur donnoient une origine fabuleuse : les uns les faisoient venir d’Asie avec Marsyas le phrygien qu’Apollon vainquit à la lyre ; & d’autres les faisoient descendre d’un fils d’Ulysse & de Circé. On ajoutoit qu’ils ne craignoient point les morsures des serpens, & qu’ils savoient s’en garantir par certaines herbes & par les enchantemens.

Ce qu’il y a de plus vrai, c’est que les Marses étoient très-braves & dignes de jouir de la liberté ; dès qu’ils se virent accablés de contributions, & frustrés de l’espérance du droit de bourgeoisie romaine dont on les avoit flattés, ils résolurent de l’obtenir à la pointe de l’épée. Pour y parvenir ils se liguerent l’an de Rome 663, avec les Piscentins, les Pelignes, les Samnites, & les autres peuples d’Italie. On donna à cette guerre le nom d’italique, ou de guerre des Marses, & les Romains y perdirent deux consuls & deux batailles en deux années consécutives.

Les Marses devinrent ensuite la meilleure infanterie des Romains, & donnerent lieu au proverbe que rapporte Appien, que l’on ne peut triompher d’eux ni sans eux. Aujourd’hui le pays des anciens Marses fait partie de l’Abruzze septentrionale, autour du lac de Célano, dans le royaume de Naples. (D. J.)

MARSI, MARSACI, MASACI, MARSATII, (Géog. anc.) peuples de la Germanie, compris premierement sous le nom de peuples Istœvons, qui du tems de César habitoient au-delà du Rhin. Du tems de Drusus ils habitoient au bord du Rhin. On est fondé à leur assigner les terres qui se trouvent entre le premier bras du Rhin & l’Issel, jusques vers Batavodurum ; du-moins les pays que l’on donne aux Sicambres, aux Uusipiens, aux Frisons & aux