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Henri III. en créa mille par édit du mois de Juin 1576, par des déclarations des 20 Janvier & 10 Septembre 1577.

Il y eut une autre création de nobles par édit de Juin 1588, vérifiée au parlement de Rouen.

On en créa vingt par édit du 20 Octobre 1592, & vingt autres par édit du 23 Novembre suivant pour des personnes tant taillables que non taillables ; dix par édit d’Octobre 1594, & encore en Mars 1610.

En 1643 on en créa deux en chaque généralité pour l’avénément de Louis XIV. à la couronne.

Le 4 Décembre 1645, il fut créé cinquante nobles en Normandie, avec permission de trafiquer leur vie durant, à condition que leurs enfans demeureroient dans des villes franches, & serviroient le roi au premier arriere ban.

En 1660 Louis XIV. créa deux nobles dans chaque généralité.

En 1696 il créa cinq cent nobles dans le royaume. On obtenoit des lettres de noblesse pour deux mille écus. Il créa encore deux cent nobles par édit du mois de Mai 1702, & cent autres par édit de Décembre 1711.

On a souvent donné des lettres de noblesse pour récompense de services ; mais à moins qu’ils ne soient spécifiés, on y a peu d’égard, vû qu’il y a eu de ces lettres où cette énonciation étoit devenue de style ; on laissoit même le nom de la personne en blanc, de sorte que c’étoit une noblesse au porteur.

Les divers besoins de l’état ont ainsi réduit les ministres à chercher des ressources dans l’avidité que les hommes ont pour les honneurs.

Il y a même eu des édits qui ont obligé des gens riches & aisés de prendre des lettres de noblesse, moyennant finance ; de ce nombre fut Richard Graindorge, fameux marchand de bœufs, du pays d’Auge en Normandie, qui fut obligé en 1577 d’accepter des lettres de noblesse, pour lesquelles on lui fit payer trente-mille livres. La Roque en son traité de la Noblesse, ch. xxj. dit en avoir vu les contraintes entre les mains de Charles Graindorge sieur du Rocher, son petit-fils.

Ce n’est pas seulement en France que la noblesse est ainsi devenue vénale. Au mois d’Octobre 1750, on publia à Milan, par ordre de la cour de Vienne, une espece de tarif qui fixe le prix auquel on pourra se procurer les titres de prince, duc, marquis, comte, & les simples lettres de noblesse ou de naturalisation. Voyez le Mercure de France, Décembre 1750, pag. 184.

Les annoblissemens accordés à prix d’argent, ont été sujets à plusieurs révolutions. Les annoblis ont été obligés en divers tems de prendre des lettres de confirmation, moyennant une finance.

On voit aussi dès 1588 des lettres de rétablissement de noblesse ensuite d’une révocation qui avoit été faite.

Henri IV. par l’édit du mois de Janvier 1598, révoqua tous les annoblissemens qui avoient été faits à prix d’argent.

Il les rétablit ensuite par édit du mois de Mars 1606.

Louis XIII. par édit du mois de Novembre 1640, révoqua tous ceux qui avoient été faits depuis trente ans.

Les lettres de noblesse accordées depuis 1630, furent aussi révoquées par édit du mois d’Août 1664.

Enfin par édit du mois d’Août 1715, Louis XIV. supprima tous les annoblissemens par lettres & privileges de noblesse attribués depuis le premier Janvier 1689, aux offices, soit militaires, de justice ou finance.

Pour jouir pleinement des privileges de noblesse, il faut faire enregistrer ses lettres au parlement, en

la chambre des comptes & en la cour des aides.

Voyez la Roque, ch. xxj. Brillon. au mot Annoblissement, & ce qui a été dit ci-devant en parlant de la noblesse en général.

Noblesse Littéraire ou Spirituelle, est une qualification que l’on donne à la noblesse, accordée aux gens de lettres pour récompense de leurs talens. Voyez la préf. de la Roque.

On peut aussi entendre par là une certaine noblesse honoraire, qui est attachée à la profession des gens de lettres, mais qui ne consiste en France que dans une certaine considération que donnent le mérite & la vertu. A la Chine on ne reconnoît pour vrais nobles que les gens de lettres ; mais cette noblesse n’y est point héréditaire : le fils du premier officier de l’état reste dans la foule, s’il n’a lui-même un mérite personnel qui le soutienne.

Quelques auteurs par noblesse littéraire, entendent aussi la noblesse de robe, comme Nicolas Upton anglois, qui n’en distingue que deux sortes ; l’une militaire, l’autre littéraire, qui vient des sciences & de la robe, togata sive litteraria.

Noblesse locale, est celle qui s’acquiert par la naissance dans un lieu privilégié, telle que celle des habitans de Biscaye. Voyez la Roque, chap. lxxvij.

On pourroit aussi entendre par noblesse locale, celle qui n’est reconnue que dans un certain lieu, telle qu’étoit celle des villes romaines dont les nobles étoient appellés domi nobiles.

Les auteurs qui ont traité des patrices d’Allemagne, disent que la plûpart des communautés qui sont dans les limites de l’Empire, sont gouvernées par certaines familles qui usent de toutes les marques extérieures de noblesse, qui n’est pourtant reconnue que dans leur ville ; aucun des nobles de cette espece n’étant reçu dans les chapitres nobles : en sorte qu’il y a en Allemagne comme deux sortes de noblesse, une parfaite & une autre locale qui est imparfaite ; & ces mêmes auteurs disent que la plûpart de ces familles ne tenant point du prince le commencement de leur noblesse, & ne portant point les armes, ils se sont contentés de l’état de bourgeoisie & des charges de leur communauté, en vivant noblement. Voyez la Roque, chap. xxxix.

Il est de même des nobles de Chiary en Piémont, & des nobles de certains lieux dans l’état de Venise. La Roque, ch. clxvij.

Noblesse civile, politique ou accidentelle, est celle qui provient de l’exercice de quelque office ou emploi qui annoblit celui qui en est revêtu : elle est opposée à la noblesse d’origine. Voyez la Roque & Thomas Miles, in tract. de nobilitate.

On peut aussi entendre par noblesse civile, toute noblesse soit de race ou d’office, ou par lettres, reconnue par les lois du pays, à la différence de la noblesse honoraire qui n’est qu’un titre d’honneur attaché à certains états honorables, lesquels ne jouissent pas pour cela de tous les privileges de la noblesse. Voyez ci-après Noblesse honoraire.

Noblesse cléricale, ou attachée à la cléricature, consiste en ce que les clercs vivant cléricalement, participent à quelques privileges des nobles, tels que l’exemption des tailles ; mais cela ne produit pas en eux une noblesse proprement dite : ils sont seulement considerés comme gens vivant noblement.

Les ecclésiastiques des dioceses d’Autun & de Langres ont prétendu avoir par état la noblesse, mais tout leur droit se borne comme ailleurs, à l’exemption des tailles & corvées personnelles. Voyez la Roque, ch. xlix. (A)

Noblesse de cloche, ou de la cloche, est celle qui provient de la mairie & autres charges municipales auxquelles la noblesse est attribuée. On l’appel-