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composent : ce sont les plus jeunes à qui on enseigne à lire & à écrire, à bien parler les langues, qui sont la turque pour ce monde, l’arabe pour le paradis, & la persane pour l’enfer, à cause, disent les Turcs, de l’hérésie de la nation qui la parle.

La seconde s’appelle la petite oda, où depuis l’âge de 14 ou 15 ans, jusqu’à 20 ou environ, ils sont exercés aux armes, à piquer des chevaux, à l’étude des sciences dont les Turcs ont quelque teinture, comme est l’Arithmétique, la Géométrie & l’Astrologie. Dans chacune de ces chambres il y a un page de la chambre privée, qui leur commande.

La troisieme chambre nommée kilan-oda, comprend bien deux cens pages, qui outre leurs exercices ordinaires, sont commandés par le kilerdgi-bachi, pour le service de la sommèlerie & de la fruiterie.

La quatrieme n’en a que vingt-quatre, qui sous le khazinéda-bachi, ont soin du trésor qui est dans l’appartement du grand-seigneur, où ils n’entrent jamais avec des habits qui aient des poches.

La cinquieme chambre appellée kas-oda, c’est-à-dire classe privée, est composée de quarante pages qui servent à la chambre du prince.

Toutes les nuits un nombre fixe de pages de ces chambres sont de garde, quand leur prince est couché ; ils sont posés en divers endroits, les uns plus près de lui que les autres, selon le degré de leur chambre ; & ceux qui sont de la chambre privée les commandent. Ils prennent garde aussi que la lumiere, qu’ils tiennent toujours dans sa chambre, ne lui donne point dans les yeux, craignant qu’il ne s’éveille ; & s’ils le voient travaillé de quelque songe qui l’inquiette & qui le tourmente, ils en avertissent l’aga pour qu’il le réveille. (D. J.)

ODABACHI ou ODDOBASSI, s. m. (Hist. mod.) est un officier de l’armée des Turcs, qui répond à-peu-près à ce que nous appellons parmi nous un sergent, ou un caporal.

Les simples soldats & les janissaires, appellés oldachis, lorsqu’ils ont servi un certain nombre d’années, sont avancés, & deviennent biquelars : de biquelars ils sont faits odabachis, c’est-à-dire, caporaux de compagnie, ou chefs de certaines divisions dont le nombre n’est pas fixé, étant quelquefois de dix hommes, quelquefois de vingt.

Leur paye est de six doubles par mois, & ils portent pour marque distinctive un grand feutre, large d’un pié, & encore plus long que large, qui pend par derriere, & orne par devant de deux grandes plumes d’autruches.

L’odabachi est proprement un chef de chambrée des janissaires, comme le porte son nom composé de deux mots turcs savoir, oda, chambre, & bachi, chef. Lorsque les janissaires entrent pour la premiere fois dans cette chambre, l’odabachi les frappe sur le cou, & leur fait baisser la tête pour preuve de l’obéissance à laquelle ils sont engagés. Ils ne peuvent s’absenter sans sa permission, & lorsqu’ils négligent de la lui demander, il leur fait donner par le cuisinier de la chambrée des coups de baguette sur les fesses & non sur les piés, afin de ne pas les mettre hors d’état de marcher où le bien du service le requiert. S’ils commettent quelque crime grave, il les fait étrangler mais secretement, & jetter leurs corps dans la mer. Que s’il est forcé de rendre leur punition publique, il doit auparavant les dégrader de leur qualité de janissaire, ce qui se fait en mettant en pieces le collet de leur habit. Guer, mœurs des Turcs, tome II.

On donne encore en Turquie le nom d’odabachi au directeur de chaque chambre des ichoglans ou pages du grand-seigneur. Il veille à leur conduite, à leurs exercices, & les fait châtier lorsqu’il leur échape quelque faute.

ODAGLANDARI, s. m. (Hist. mod. terme de relation.) on écrit aussi odeglandari, odoglandari, oddoglandari. Ce sont les pages de la cinquieme chambre ou oda ; voyez Oda.

Ces pages sont au nombre de quarante qui servent à la garderobe du grand-seigneur. Ils ont dix aspres par jour, bouche à cour, & deux habits de velours, satin ou damas, tous les ans. Vigenere, illustrat. sur chalcondyle, p. 359. (D. J.)

ODALIQUES ou ODALISQUES, s. f. (Hist. mod.) c’est ainsi qu’on nomme en Turquie les simples favorites du grand-seigneur, renfermées dans le serrail pour servir à ses plaisirs. Elles y sont gardées par des eunuques, & occupent chacune un appartement où elles sont servies par des femmes. Les odaliques qui n’ont eu que des filles, ont la liberté de sortir & de se marier à qui il leur plaît ; mais celles qui ont donné des fils au grand seigneur, & sont arrivées par-là au titre d’asekis, sont renvoyées dans le vieux serrail quand le sultan se dégoûte d’elles, & n’en sortent jamais à-moins que leur fils ne monte sur le trone, & pour-lors on les nomme valide ou sultane-mere. Ce mot odalique vient d’oda, qui en turc signifie une chambre, parce que toutes ces femmes sont logées séparément. C’est entre elles à qui employera le plus de manege pour plaire au sultan, & d’intrigues pour supplanter ses rivales.

ODAXISME, (Medecine.) mot grec dérivé de δάκνω, je mords, & employé par différens auteurs pour désigner une sensation desagréable, plus forte que la démangeaison, & fort analogue à celle qui est l’effet d’une morsure. C’est dans ce sens général que Vanhelmont l’emploie ; Dioscoride l’applique aussi à une affection des reins où le malade ressentoit cette espece de douleur, il dit qu’alors les reins étoient ὀδαξουμενοι, comme mordus. Hippocrate, suivi en cela par le plus grand nombre de médecins, restreint le nom d’odaxisme à cette démangeaison vive & quelquefois douloureuse que les enfans éprouvent aux gencives, lorsqu’elles sont un peu percées & déchirées par les dents qui font effort pour sortir : pendant la dentition, dit-il, non seulement il y a odaxisme, mais encore il survient des convulsions, &c. aphorism. 25. lib. III. d’où il paroît que ce mot seul signifie une affection des gencives, que presque tous les auteurs ont rendu par démangeaison.

ODE, s. f. (Poésie lyriq.) Dans la poésie greque & latine, l’ode est une piece de vers qui se chantoit, & dont la lyre accompagnoit la voix. Le mot ode signifie chant, chanson, hymne, cantique.

Dans la poésie françoise, l’ode est un poëme lyrique, composé d’un nombre égal de rimes plates ou croisées, & qui se distingue par strophes qui doivent être égales entr’elles, & dont la premiere fixe la mesure des autres.

L’ode avec plus d’éclat, & non moins d’énergie,
Elevant jusqu’au ciel son vol ambitieux,
Entretient dans ses vers commerce avec les dieux ;
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Chante un vainqueur poudreux au bout de la carrier ;
Mene Achille sanglant au bord du Simoïs,
Ou fait fléchir l’Escaut sous le joug de Louis ;

Son style impétueux souvent marche au hasard,
Chez elle un beau desordre est un effet de l’art.

C’est M. Boileau qui parle, & qui dans ses beaux vers si dignes de la sublime matiere qu’il traite, donne sur cette espece de poésie des préceptes excellens qu’il a essayé de pratiquer lui-même avec assez peu de succès.

Comme l’ode est une poésie faite pour exprimer les sentimens les plus passionnés, elle admet l’enthou-