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ches de paille dont le cordon est composé.

NATTER les crins, (Maréchallerie.) c’est en faire des tresses.

NATTIER, s. m. (Corps d’artisans.) ouvrier qui fait des nattes. Le peu d’outils & d’instrumens qui suffisent aux Nattiers en paille, sont la pierre & le maillet pour battre leur paille après qu’elle a été mouillée, afin de la rendre plus pliante & moins cassante ; le traiteau avec ses clous pour tracer la natte, c’est-à-dire pour en faire les cordons ; les tringles aussi avec leurs clous pour bâtir & ourdir les cordons, & l’aiguille pour les coudre & les joindre.

NATURALISATION, s. f. (Jurisprudence.) est l’acte par lequel un étranger est naturalisé, c’est-à-dire qu’au moyen de cet acte, il est réputé & considéré de même que s’il étoit naturel du pays, & qu’il jouit de tous les mêmes privileges ; ce droit s’acquiert par des lettres de naturalité. Voyez ci-après Naturalité.

Naturalisation, (Hist. d’Anglet.) acte du parlement qui donne à un étranger, après un certain séjour en Angleterre, les privileges & les droits des naturels du pays.

Comme cet acte coûte une somme considérable que plusieurs étrangers ne seroient pas en état de payer, on agite depuis long-tems dans la Grande-Bretagne la question importante, s’il seroit avantageux ou desavantageux à la nation, de passer un acte en parlement qui naturalisât généralement tous les étrangers, c’est à-dire qui exemptât des formalités & de la dépense d’un bil particulier, ou de lettres-patentes de naturalisation, tout étranger qui viendroit s’établir dans le pays, & les protestans par préférence.

Les personnes qui sont pour la négative craignent que cette naturalisation générale n’attirât d’un côté en Angleterre un grand nombre d’étrangers, qui par leur commerce ou leur industrie, ôteroient les moyens de subsister aux propres citoyens, & de l’autre côté quantité de pauvres familles qui seroient à charge à l’état, au-lieu de lui être utiles.

Les personnes qui tiennent pour l’affirmative (& ce sont les gens les plus éclairés de la nation) répondent, 1°. que de nouveaux sujets industrieux acquis à l’Angleterre, loin de lui être à charge, augmenteroient ses richesses, en lui apportant le nouvelles connoissances, de manufacture ou de commerce, & en ajoûtant leur industrie à celle de la nation. 2°. Qu’il est vraissemblable que parmi les étrangers ceux-là principalement viendroient profiter du bienfait de la loi, qui auroient déjà dans leur fortune ou dans leur industrie des moyens de subsister. 3°. Que quand même dix ou vingt mille autres étrangers pauvres, qu’on naturaliseroit, ne retireroient de leur travail que la dépense de leur consommation sans aucun profit, l’état en seroit toujours plus fort de douze ou vingt mille hommes. 4°. Que le produit des taxes sur la consommation en augmenteroit, en diminution des autres charges de l’état, qui n’augmenteroient aucunement par ces nouveaux habitans. 5°. Que l’Angleterre peut aisément nourrir une moitié en sus de sa population actuelle, si l’on en juge par ses exportations de blé, & l’étendue de ses terres incultes ; que ce royaume est un des plus propres de l’Europe à une grande population par sa fertilité, & par la facilité des communications entre ses différentes provinces, au moyen des trajets de terre ou de mer assez courts qui les produisent. 6°. Que les avantages immenses de la population justifient la nécessité d’inviter les étrangers à venir l’augmenter.

Enfin, on cite aux Anglois jaloux, ou trop réservés sur la naturalisation des étrangers, ce beau pas-

sage de Tacite, liv. XII. de ses Annales :

« Nous repentons-nous d’avoir été chercher les familles des Balbes en Espagne, & d’autres non moins illustres dans la Gaule narbonnoise ? leur postérité fleurit encore parmi nous, & ne nous cede en rien dans leur amour pour la patrie. Qu’est-ce qui a causé la ruine de Sparte & d’Athenes qui étoient si florissantes, que d’avoir fermé l’entrée de leur république aux peuples qu’ils avoient vaincus ? Romulus notre fondateur fut bien plus sage, de faire de ses ennemis autant de citoyens dans un même jour ». Le chancelier Bacon ajoûteroit : « On ne doit pas tant exiger de nous, mais on peut nous dire : naturalisez vos amis, puisque les avantages en sont palpables ». (D. J.)

NATURALISTE, s. m. se dit d’une personne qui a étudié la nature, & qui est versée dans la connoissance des choses naturelles, particulierement de ce qui concerne les métaux, les minéraux, les pierres, les végétaux, & les animaux. Voyez Animal, Plante, Minéral, &c.

Aristote, Elien, Pline, Solin, & Théophraste, ont été les plus grands naturalistes de l’antiquité ; mais ils sont tombés dans beaucoup d’erreurs, que l’heureuse industrie des modernes a rectifiées. Aldrovandus est le plus ample & le plus complet des naturalistes modernes ; son ouvrage est en 13 volumes in-fol.

On donne encore le nom de naturalistes à ceux qui n’admettent point de Dieu, mais qui croyent qu’il n’y a qu’une substance matérielle, revétue de diverses qualités qui lui sont aussi essentielles que la longueur, la largeur, la profondeur, & en conséquence desquelles tout s’exécute nécessairement dans la nature comme nous le voyons ; naturaliste en ce sens est synonyme à athée, spinosiste, matérialiste, &c.

NATURALITÉ, s. f. (Jurisprudence.) est l’état de celui qui est naturel d’un pays ; les droits de naturalité ou de regnicolat sont la même chose. Les lettres de naturalité sont des lettres de chancellerie, par lesquelles le prince déclare que quelqu’un sera repute naturel du pays, & jouira des mêmes avantages que ses sujets naturels.

Ceux qui ne sont pas naturels d’un pays, ou qui n’y ont pas été naturalités, y sont étrangers ou aubains, quasi alibi nati.

La distinction des naturels du pays d’avec les étrangers, & l’usage de naturaliser ces derniers, ont été connus dans les anciennes républiques.

A Athènes, suivant la premiere institution, un étranger ne pouvoit être fait citoyen que par les suffrages de six mille personnes, & pour de grands & signalés services.

Ceux de Corinthe, après les grandes conquêtes d’Alexandre, lui envoyerent offrir le titre de citoyen de Corinthe qu’il méprisa d’abord ; mais les ambassadeurs lui ayant remontré qu’ils n’avoient jamais accordé cet honneur qu’à lui & à Hercule, il l’accepta.

On distinguoit aussi à Rome les citoyens ou ceux qui en avoient la qualité de ceux qui ne l’avoient pas.

Les vrais & parfaits citoyens, qui optimâ lege cives à Romanis dicebantur, étoient les Ingemes, habitans de Rome & du territoire circonvoisin ; ceux-ci participoient à tous les privileges indistinctement.

Il y avoit des citoyens de droit seulement, c’étoient ceux qui demeuroient hors le territoire particulier de la ville de Rome, & qui avoient néanmoins le nom & les droits des citoyens romains, soit que ce privilege leur eût été accordé à eux personnellement, ou qu’ils demeurassent dans une