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arriere, & y font une espece d’arc : dans cet état, l’action de presque tous les visceres du bas ventre est gênée, interrompue ou beaucoup dérangée ; la respiration souffre beaucoup, & se fait très-difficilement ; la déglutition est totalement empêchée : cet état si violent est souvent accompagné de vives douleurs : il est bien évident qu’il est trop opposé à l’état naturel du corps pour pouvoir subsister long-tems ; il est plus ou moins dangereux suivant le degré, l’intensité & la durée de la convulsion. Le péril varie aussi suivant les causes qui l’ont produite : elles sont les mêmes que celles des autres especes de convulsions. Voyez-en le détail aux articles Convulsion, Spasme. Un paroxisme épileptique peut être déterminé de cette façon. Voyez Epilepsie. Alors le danger est moins pressant. L’opisthotonos peut aussi être l’effet de quelque poison pris intérieurement, d’une blessure, sur-tout faite avec des fleches ou autres armes empoisonnées ; & alors il est plus dangereux : il est mortel lorsqu’il survient à des malades foibles, épuisés par une longue maladie ou par des évacuations trop abondantes. Voyez Convulsion ; voyez aussi à cet article le traitement qu’il convient d’employer. En général, les anti-spasmodiques, anti-hystériques, les préparations de pavot doivent être données sur le champ. Les saignées peuvent convenir dans quelques cas particuliers & rares : elles seroient indifférentes ou nuisibles dans le cas de poison, & absolument pernicieuses, lorsque l’on a sujet d’accuser la foiblesse & l’épuisement ; des frictions, des embrocations, des especes de douches avec de l’huile bien chaude fournissent un remede dont Galien a constaté l’efficacité par l’heureuse expérience qu’il en a faite sur lui-même dans un cas semblable ; enfin le cautere actuel appliqué à la plante des piés, ne doit pas être oublié, quand les autres remedes ont été sans effet : souvent il emporte des maladies qui avoient résisté au fer & aux médicamens. Suivant ce précepte du grand Hippocrate qu’on a taxé de fausseté, parce qu’on n’a pas su en faire l’application. Quæ medicamenta non sanant, ea ferrum sanat ; quæ ferrum non sanat, ea ignis sanat ; quæ verò ignis non sanat, ea censere oportet insanabilia. sectione VIII. aphor. vj. Il seroit très-aisé de donner une théorie satisfaisante de l’action de ce remede dans la maladie dont il s’agit, mais non est hîc locus. Voyez Cautere, Feu. Il suffit de remarquer qu’on emploie à la Chine, dans les Indes & au Japon, la Moxe, qu’on applique aux piés, un anneau rouge ; qu’on fait des piquures avec des aiguilles, acupuncturæ ; & que ces remedes plus ou moins analogues au cautere actuel, y font des effets surprenans dans les maladies convulsives.

OPITERGINI, Montes. (Géog. anc.) Pline nomme ainsi les montagnes où la Livenza, Liquentia, a sa source. Ce sont les monts situés entre Ceneda, Belluno & les bourgs d’Ariano & Polcenigo. (D. J.)

OPITERGIUM, (Géog. anc.) ancienne ville d’Italie au pays du peuple Veneti, entre Ceneda & la mer Adriatique. Les habitans sont nommés Opitergini par Lucain, Pline & Florus. Le nom moderne est Oderzo. Ce fut apparemment après sa destruction par les Quades & les Marcomans, qu’Héraclius l’a rebâti, & qu’elle fut appellée Héraclée.

OPIUM, s. m. (Hist. nat. des drog.) C’est un suc concret, résineux & gommeux, pesant, compact, pliant, inflammable, d’un roux noir, d’une odeur narcotique, d’un goût acre & amer. Il nous vient en gâteaux arrondis, applatis, de la grosseur d’un pouce, qui pesent une demi livre ou une livre, & sont enveloppés dans des feuilles de pavots. On l’apporte de l’Anatolie, de l’Egypte & des Indes.

Les Arabes & les Droguistes recommandent l’opium de Thèbes ou celui que l’on recueilloit en Egypte auprès de Thèbes, mais on ne fait plus à présent cette distinction. De quelqu’endroit que vienne l’opium, on estime celui qui est naturel, un peu mou, qui obéit sous les doigts, qui est inflammable, d’une couleur brune ou noirâtre, d’une odeur forte, puante, & assoupissante. On rejette celui qui est sec, friable, brûlé, mêlé de terre, de sable ou d’autres ordures.

Les anciens distinguoient deux sortes de suc de pavot ; l’un étoit une larme qui découloit de l’incision que l’on faisoit à la tête des pavots : elle s’appelloit μήκωνος ὀπὸς, & chez les médecins ὄπιον par autonomasie. L’autre s’appelloit μηκώνειον ou μηκώνιον ; c’étoit le suc épaissi que l’on retiroit de toute la plante. Ils disoient que le méconium étoit bien moins actif que l’opium.

Présentement on ne nous en fournit que d’une sorte sous le nom d’opium : savoir, un suc qui découle de l’incision des têtes de pavots blancs ; on n’en trouve aucune autre espece parmi les Turcs & à Constantinople, que celui que l’on apporte en gâteaux. Cependant, chez les Perses on distingue les larmes qui découlent des têtes auxquelles on fait des incisions, & ils recueillent avec grand soin celles qui coulent les premieres, qu’ils estiment beaucoup comme ayant plus de vertu.

La plante dont on retire le suc, s’appelle papaver hortense, se nine albo, sativum, Dioscorid. album, Plinii, Cés. Bauhin, p. 170. Sa racine est environ de la grosseur du doigt, rempli comme le reste de la plante d’un lait amer. Sa tige a deux coudées ; elle est branchue, ordinairement lisse, quelquefois un peu velue. Sur cette tige naissent des feuilles semblables à celles de la laitue, oblongues, découpées, crêpues, de couleur de verd de mer. Ses fleurs sont en rose, plus souvent à quatre pétales blancs, placés en rond, & qui tombent bientôt. Le calice est composé de deux feuillets ; il en sort un pistil ou une petite tête, entourée d’un grand nombre d’étamines. Cette tête se change en une coque, de la figure d’un œuf, qui n’a qu’une seule loge, garnie d’un chapiteau : elle est ridée, étoilée, munie intérieurement de plusieurs lames minces qui tiennent à ses parois ; à ces lames adherent, comme à des placenta, grand nombre de graines très-petites, arrondies, blanches, d’un goût doux & huileux.

Dans plusieurs provinces de l’Asie mineure, on seme les champs de pavots blancs, comme nous semons le froment ; aussi-tôt que les têtes paroissent, on y fait une legere incision ; & il en decoule quelques gouttes de liqueur laiteuse, qu’on laisse figer, & que l’on recueille ensuite. M. Tournefort rapporte que la plus grande quantité d’opium se tire par la contusion & l’expression de ces mêmes têtes : mais Belon n’en dit rien, non plus que Kœmpfer qui a fait une dissertation sur l’opium persique. Ces deux derniers auteurs distinguent trois sortes d’opium, mais tirés seulement par incision.

Dans la Perse on recueille l’opium au commencement de l’été. On fait des plaies en sautoir à la superficie des têtes qui sont prêtes d’être mûres. Le couteau qui sert à cette opération a cinq pointes ; & d’un seul coup il fait cinq ouvertures longues & paralleles. Le lendemain on ramasse avec des spatules le suc qui découle de ces petites plaies, & on le renferme dans un petit vase attaché à la ceinture.

Ensuite on fait l’opération de l’autre côté des têtes, pour en tirer le suc de la même maniere. La larme que l’on recueille la premiere, s’appelle gobaar ; elle passe pour la meilleure ; sa couleur est