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ORGIASTES, s. m. pl. (Hist. anc.) nom qu’on donnoit aux prêtresses de Bacchus, ou aux bacchantes qui présidoient aux orgies. Voyez Orgies.

ORGIES, s. f. pl. (Ant. grecq. & rom.) orgia ; nom des fêtes de Bacchus, autrement appellées bacchanales & dionysiaques. Mais le nom d’orgies étoit commun à plusieurs autres fêtes, comme à celle des Muses, à celle de Cérès & à celle de Cybelle. Servius dit qu’au commencement on nommoit en grec orgies, toutes sortes de sacrifices, & que ce terme répondoit à celui de cérémonies chez les Romains.

Les orgies, comme fêtes en l’honneur de Bacchus, sont appellées orgia triterica, dans Virgile, parce qu’on les célebroit une fois en trois ans. Le mot triterica le dit, de τρὶς, trois, & ἔτος, année.

Elles prirent naissance en Egypte, où Osiris fut le premier modele du Bacchus grec. Delà elles passerent en Grece, en Italie, chez les Gaulois, & dans presque tout le monde payen. Elles étoient d’abord simples & très-honnêtes ; mais elles furent chargées insensiblement de cérémonies ridicules, & finalement les Historiens nous assurent qu’elles furent portées pendant la nuit à de si grands excès & à des débauches si honteuses, que l’an de Rome 564, le sénat se vit obligé de les abolir dans toute l’étendue de l’empire.

Nous pouvons dire aujourd’hui sans crainte, que ces fêtes de Bacchus, outre leur licence inexcusable, étoient chargées de folies & d’extravagances : mais il en coûta cher à Panthée, pour avoir autrefois tenu ce propos sur les lieux ; car ses tantes mêmes, éprises d’une fureur bacchique, le méconnurent, & le mirent en pieces sur le mont Citheron.

Il y a dans le jardin Justiniani à Rome, un vase de marbre bien précieux, sur lequel on voit une représentation de ces orgies de Bacchus. On pense que ce vase est de la main de Saurus, non seulement par la beauté du travail, mais à cause de la lésardine qui s’y trouve, & qui n’a aucun rapport avec le reste. (D. J.)

ORGIOPHANTES, s. m. pl. (Hist. anc.) nom des principaux ministres ou sacrificateurs dans les orgies. Ils étoient subordonnés aux orgiastes ; car parmi les Grecs, c’étoit aux femmes qu’il appartenoit de présider dans les mysteres de Bacchus.

ORGUES DE MER, tuyaux d’orgues, (Conchiliologie.) Pl. XX. fig. 8. On a donné ce nom à une sorte de vermisseaux de mer à tuyaux ; qui vivent en société ; parce que ces vermisseaux grouppent ensemble leurs tuyaux, à-peu-près comme ceux de l’instrument de Musique que nous appellons orgue. Chaque vermisseau a son tuyau séparément : ces tuyaux sont d’un beau rouge pourpré. Voyez Coquille.

ORGUE, s. m. (Instrument à vent.) c’est le plus grand & le plus harmonieux des instrumens de cette espece ; c’est pourquoi on lui a donné le nom d’orgue, οργανον, qui signifie l’instrument par excellence.

L’invention des orgues est aussi ancienne, que leur méchanique est ingénieuse.

L’usage de l’orgue n’a commencé dans nos églises qu’après S. Thomas d’Aquin, en l’année 1250.

Le premier que l’on a eu en France fut donné en présent au roi Pepin par Constantin Copronyme en 1267.

On peut distinguer dans cet instrument deux sortes de parties, les intégrantes & les ministrantes. On traitera des unes & des autres dans la description suivante.

Description de l’orgue. L’orgue est composé d’un buffet de menuiserie plus ou moins enrichi de sculpture, qu’on appelle fût, voyez Fut ; de deux sommiers sur lesquels sont arrangés les tuyaux ; soit d’étain, de plomb ou de bois, d’un ou de plusieurs claviers. On donne le vent aux tuyaux par plu-

sieurs grands soufflets ; il est conduit aux sommiers

par des tuyaux de bois qu’on appelle porte-vents.

Il paroît par ce que nous venons de dire, que les matieres qui composent un orgue sont le bois, l’étain & le plomb, auxquelles on peut ajouter le cuivre pour la fabrique des anches, & le fer qui sert à deux usages, comme dans toutes sortes de machines.

L’ordre de sinthese demande qu’avant de décrire l’orgue, & d’en expliquer la facture, nous expliquions l’apprêt des différentes matieres qui le composent : nous commencerons par le bois.

Le bois dont on se sert dans la fabrique des orgues, est de deux sortes, par rapport aux différens emplois qu’on en fait. Celui qui est destiné pour faire les tuyaux de bois, les sommiers, les claviers, les abregés, doit être du chêne, connu sous le nom de bois d’Hollande, parce que c’est les Hollandois qui en font commerce. Le plus parfait ne sauroit être trop bon, principalement pour la fabrique des tuyaux & des sommiers. L’autre sorte de bois dont on se sert dans la fabrique des orgues, est connu sous le nom de bois de vauge ; c’est aussi du bois de chêne, mais moins parfait que celui d’Hollande. On s’en sert pour faire le buffet, & quelques parties de l’orgue qui ne demandent point du bois si parfait, comme par exemple, les tables des soufflets, &c.

L’étain dont on se sert dans la fabrique des orgues, est l’étain fin d’Angleterre : on peut cependant, à son défaut, en employer d’autre.

Le plomb est le plomb ordinaire. On réduit ces deux métaux en lames ou feuilles minces, longues & larges autant qu’il est besoin : ce qui se fait de la maniere suivante.

Maniere de couler les tables d’étain ou de plomb qui servent à faire les tuyaux d’orgue. On prépare une table (fig. 49. Pl. X. d’orgue) de bois de chêne aussi longue & aussi large qu’il est besoin ; on fait en sorte, au moyen de plusieurs barres clouées à la partie inférieure de la table, qu’elle soit inflexible : sur cette table, qui doit être parfaitement plane, on étend une piece de coutil que l’on attache sur les côtés avec des clous d’épingle, en sorte qu’elle soit bien tendue ; sur cette piece de coutil on en met une autre moins parfaite, ou même que l’usage a à-demi-usée, & la table est préparée.

On prépare ensuite le table représenté, fig. 60. Le rable est une caisse sans fond ABCDEF. Le côté AB du rable ne doit point porter sur la table, comme on le voit à la fig. 59. qui représente le rable en situation sur la table ; & le côté EDCF doit être plus élevé, afin de compenser l’inclinaison de cette table, que l’on incline plus ou moins, ainsi que l’on voit dans la figure, en la soutenant à une de ses extrémités par un tréteau G, & dans différens points de sa longueur, par des calles ou chantiers HHI ; & pour empêcher la table de couler sur ses appuis, on la retient par la partie supérieure, au moyen d’une corde K qui y est attachée, & qui est liée à un crampon scellé à la muraille de l’attelier.

La table ainsi préparée, & le rable placé dessus à la partie supérieure, on enduit les joints qu’il fait avec la table, d’une ou de plusieurs couches de blanc-d’Espagne détrempé dans de l’eau, afin de fermer parfaitement toutes les ouvertures que les petites inégalités du coutil pourroient laisser entr’elles & les parties du rable qui s’y appliquent.

Pendant toutes ces préparations, le métal que l’on se propose de couler en table, est en fusion dans une chaudiere de fer, semblable en tout à celle des plombiers. Lorsque c’est de l’étain que l’on veut couler, on jette dans la chaudiere un peu de poix-résine & de suif, tant pour purifier le métal, que pour revivifier les parties que l’ardeur du feu auroit