Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/901

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tres futurs, que ceux qu’il emprunte du passif de ce verbe, doit aussi être conjugué : on peut mettre ensuite la conjugaison active & passive de fero, qui servira de paradigme à tous ses composés, dont il est bon de détailler les tems primitifs, à cause des métamorphoses de la particule composante : puis, le verbe edo, qui sera le paradigme de comedo & exedo : enfin, viendront les trois verbes volo, malo & nolo. Le verbe eo, étant de la quatrieme conjugaison, ne peut être placé qu’ici ; & il sera suivi immédiatement de la conjugaison du défectif memini, qui sera le paradigme de novi, cæpi, odi.

Je n’ajouterai plus qu’un mot qui est général. C’est 1°. qu’au-dessous de chaque paradigme il est bon de donner une liste alphabétique de plusieurs mots soumis à la même analogie, afin de fournir aux commençans de quoi s’exercer sur le paradigme, & en même tems pour leur apprendre autant de mots latins, noms, adjectifs, ou verbes. 2°. Il me semble que la regle particuliere sera placée plus convenablement après le paradigme qu’avant ; elle ne peut être bien entendue qu’en ce lieu, & c’est d’ailleurs l’ordre naturel, les regles analogiques n’étant que les résultats de l’usage. S’il y a donc des regles communes à toutes les déclinaisons des noms ou des adjectifs, ou à toutes les conjugaisons des verbes, il en faut réserver l’exposition pour la fin : ce sont comme les corrollaires de tout le détail qui précede.

Il est aisé d’appliquer aux paradigmes de quelque langue que ce soit, ce que je viens de dire de ceux de la langue latine, en observant ce que le génie propre de chaque langue exige de particulier, soit en plus, soit en moins. (M. B. R. M.)

PARADIGRAMMATIQUE, la, (Arts.) c’est l’art de faire toutes sortes de figures en plâtre ; les Artistes l’ont très-bien nommée en latin gypsochi ; nous disons en françois sculpteurs en plâtre, terme qui ne vaut pas le mot latin. (D. J.)

PARADIS, s. m. dans les livres du nouveau Testament & parmi les Chrétiens signifie un lieu de délices, où les ames des justes voient Dieu, & jouissent d’un bonheur éternel.

C’est ainsi que Jesus-Christ dit au bon larron, Luc xxiij. 43 : Vous serez aujourd’hui avec moi dans le paradis ; & que saint Paul, II. Cor. xij. 4. parlant de lui-même en troisieme personne, dit qu’il connoît un homme qui a été ravi en esprit jusque dans le paradis, où il a entendu des paroles qu’il n’est pas permis à l’homme de publier.

Le système de Copernic & de Descartes a non-seulement renversé l’ancienne hypothèse de Ptolomée sur l’ordre & sur la structure de ce monde ; mais il a encore mis dans la nécessité de proposer ailleurs un endroit propre à placer le séjour des bienheureux, qu’on nomme vulgairement paradis. L’on dispute donc raisonnablement dans les écoles sur la situation du paradis céleste où nous devons aller, comme on fait sur celle du terrestre d’où Adam fut chassé. Car enfin depuis que les cieux sont fluides, que la terre & les planetes roulent dans les airs autour du soleil, & que les étoiles que nous voyons sont autant de soleils qui sont chacune le centre d’un tourbillon ; il a fallu que l’empyrée disparût, ou du moins qu’il s’en allât bien loin d’où il étoit. Quoi qu’il en soit, si l’on place le paradis dans un lieu qui environne tous ces espaces immenses, il me paroît ou que les reprouvés seront bien resserrés au centre de la terre, ou que les élus seront fort au large tout-autour de ce grand monde.

Quelques Théologiens croiront peut-être faire une heureuse & juste application de ces paroles des Pseaumes in sole posuit tabernaculum suum, en disant

que c’est dans le soleil où les élus habiteront, & où Dieu manifestera sa gloire. Ils ne font point attention que l’ame de Jesus-Christ jouissoit de la gloire céleste sur la terre, & qu’il étoit, selon leur opinion & leurs termes, voyageur & compréhenseur tout-à-la-fois ; qu’ainsi ce n’est pas le lieu qui fait le paradis, mais le bonheur dont on jouit par la vûe de Dieu, qui étant par-tout, peut aussi se montrer & faire par-tout des bienheureux : d’ailleurs puisque ils donnent aux corps glorieux, après la résurrection, l’agilité & la pénétration ; ils ne doivent pas les resserrer dans un endroit particulier. Ils n’auront apparemment ces qualités que pour en faire usage, se transporter librement par-tout, & contribuer à une partie de leur bonheur par la vûe & par la connoissance successive des ouvrages & des opérations du Créateur dans ces espaces immenses.

Quand on veut parler là-dessus, peut-on mieux faire qu’en disant que le paradis n’est pas un lieu, mais un changement d’état. Que s’il est dans le ciel, le ciel n’est autre chose que toute la matiere fluide & immense, dans laquelle roulent une infinité de corps & lumineux & opaques ; de sorte que les cieux, l’univers & tous les ouvrages de Dieu font le paradis & le séjour des bienheureux. C’est pourquoi notre Seigneur dit dans l’Evangile, que les saints auront le royaume des cieux en partage, & qu’ils posséderont la terre, c’est-à-dire que tout l’univers leur appartiendra, ou qu’au moins ils en auront la jouissance entiere & parfaite.

Les Juifs appellent ordinairement le paradis le jardin d’Eden, & ils se figurent qu’après la venue du Messie ils y jouiront d’une félicité naturelle au milieu de toutes sortes de délices : & en attendant la résurrection & la venue du Messie, ils croient que les ames y demeurent dans un état de repos.

Les Mahométans admettent aussi un paradis, dont toute la félicité ne consiste que dans les voluptés corporelles. Voyez ce qu’ils en racontent sous les mots Alcoran, Mahométisme.

Paradis terrestre, jardin des délices dans lequel Dieu plaça Adam & Eve après leur création. Ils y demeurerent pendant leur état d’innocence, & en furent chassés dès qu’ils eurent désobéi à Dieu en mangeant du fruit défendu. Ce mot vient de l’hébreu ou plutôt du chaldéen pardes, que les Grecs ont traduits par celui de παράδεισος, qui signifie à la lettre un verger, un lieu planté d’arbres fruitiers, & quelquefois un bois de haute futaie. Les Perses nommoient ainsi leurs jardins à fruits, & les parcs où ils nourrissoient toutes sortes d’animaux sauvages, comme il paroît par Xénophon, cyroped.

Moïse l’appelle le jardin d’Eden, c’est-à-dire le jardin des délices, mot dont quelques-uns cherchent l’étymologie dans le grec ἡδονὴ, voluptas : mais dans l’hébreu, Eden est le nom d’un pays & d’une province où étoit situé le paradis terrestre.

On forme plusieurs difficultés sur sa situation ; quelques-uns, comme Origenes, Philon, les Seleuciens & Harmianiens anciens hérétiques, Paul Venitien dans le dernier siecle, ont cru que le paradis terrestre n’avoit jamais existé, & qu’on doit expliquer allégoriquement tout ce qu’en dit l’Ecriture : d’autres l’ont placé hors du monde, quelques-uns dans le troisieme ciel, dans le ciel de la lune, dans la lune même ; d’autres dans la moyenne région de l’air, au-dessus de la terre, quelques autres sous la terre dans un lieu caché & éloigné de la connoissance des hommes, dans le lieu qu’occupe aujourd’hui la mer Caspienne.

Les sentimens de ceux qui l’ont placé sur la terre