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te. Voyez Tangente & son Perpendiculaire. Chambers. (E).

Perpendiculaire, la, c’est dans les systèmes de Mrs de Pagan & de Vauban, la partie du rayon droit comprise entre le côté extérieur & l’angle flanquant, laquelle partie sert à mener les lignes de défense.

Ainsi ID (Pl. II. de Fortific. fig. 7.), est la perpendiculaire : elle est dans les systèmes ou constructions de M. de Vauban, la huitieme partie du côté du polygone dans le quarré, la septieme dans le pentagone, & la sixieme dans l’exagone & dans les polygones au-dessus. Voyez Fortification. (Q)

PERPENDICULARITÉ DES PLANTES, est un phénomene curieux d’Histoire naturelle, que M. Dodart a le premier observé & publié dans un essai sur la perpendicularité que paroissent affecter & observer les tiges ou troncs des plantes, les racines de plusieurs d’entr’elles, & même leurs branches, autant qu’il est possible. Voyez Plante.

Voici le fait qu’il s’agit d’expliquer. Presque toutes les plantes, quand elles se levent, sont un peu recourbées, cependant leurs tiges croissent perpendiculairement, & leurs racines s’abaissent & s’enfoncent aussi perpendiculairement ; lors même qu’elles sont forcées de s’incliner, soit par la déclivité du sol, soit par quelque autre cause, elles se redressent d’elles-mêmes, & se remettent ainsi dans la situation perpendiculaire, en faisant un second pli ou coude qui redresse le premier. Ce phénomene, que le vulgaire voit sans en être surpris, est un sujet d’étonnement pour ceux qui connoissent les plantes & la maniere dont elles se forment.

En effet chaque graine contient une petite plante déjà formée, & qui n’a besoin que de développement : cette petite plante a la petite racine ; & la pulpe, qui est ordinairement séparée en deux lobes, est l’endroit d’où la plante tire sa premiere nourriture par le moyen de sa racine, lorsqu’elle commence à germer. Voyez Graine, Radicule, &c.

Or si une graine est placée en terre de telle sorte que la racine de la petite plante soit directement en bas, & la tige en haut, il est aisé de concevoir que la plante venant à croître & à se développer, la tige se levera perpendiculairement, & que sa racine descendra aussi perpendiculairement. Mais une graine qu’on jette en terre au hasard, ou qui vient s’y jetter elle-même, ne doit presque jamais prendre une situation telle que la petite plante qu’elle renferme ait sa tige & sa racine placées perpendiculairement, l’une en haut, l’autre en bas. Voyez Sémination.

Par conséquent si la plante prend toute autre situation, il faut que la tige & la racine se redressent d’elles-mêmes : mais quelle est la force qui produit ce changement ? est-ce que le tige étant moins chargée dans le sens perpendiculaire, doit naturellement se lever dans le sens où elle trouve le moins d’obstacles ? Mais la racine devroit, par la même raison, se lever perpendiculairement de bas en haut, au lieu de descendre comme elle fait.

M. Dodart a donc eu recours à une autre explication pour ces deux actions si différentes.

Il suppose que les fibres des tiges sont de telle nature qu’elles se raccourcissent par la chaleur du soleil, & s’alongent par l’humidité de la terre, & qu’au contraire celles des racines se raccourcissent par l’humidité de la terre, & s’alongent par la chaleur du soleil.

Selon cette hypothèse, quand la plante est renversée & que la racine est par conséquent en enhaut, les fibres d’un même écheveau, qui fait une des branches de la racine, ne sont pas également exposés à l’humidité de la terre ; celles qui regardent en enbas le sont plus que les supérieures. Les fibres inférieures doivent donc se racourcir davantage, & ce

raccourcissement est encore facilité par l’alongement des supérieures, sur lesquelles le soleil agit avec plus de force. Par conséquent cette branche entiere de racine se rabat du côté de la terre, & comme il n’est rien de plus délié qu’une racine naissante, elle ne trouve point de difficulté à s’insinuer dans les pores d’une terre qui seroit même assez compacte, & cela d’autant moins qu’elle peut gauchir en tout sens, pour trouver les pores les plus voisins de la perpendiculaire. En renversant cette idée, M. Dodart explique pourquoi au contraire la tige se redresse : en un mot, on peut imaginer que la terre attire à elle la racine, & que le soleil contribue à la laisser aller ; qu’au contraire le soleil attire la tige à lui, & que la terre l’envoye en quelque sorte vers le soleil.

A l’égard du second redressement, savoir du redressement de la tige en plein air, M. Dodart l’attribue à l’impression des agens extérieurs, principalement du soleil & de la pluie, car la partie supérieure d’une tige pliée est plus exposée à la pluie, à la rosée, & même au soleil, que la partie inférieure : or la structure des fibres peut être telle que ces deux causes, savoir l’humidité & la chaleur, tendent également à redresser la partie qui est la plus exposée à leur action, par l’accourcissement qu’elles produisent successivement dans cette partie : car l’humidité accourcit les fibres en gonflant, & la chaleur en dissipant. Il est vrai qu’on ne peut deviner quelle doit être la structure des fibres pour qu’elles aient ces deux différentes qualités.

M. de la Live explique ce même phénomene de la maniere suivante : il connoit que dans les plantes la racine tire un suc plus grossier & plus pesant, & la tige au contraire & les branches un suc plus fin & plus volatil ; & en effet, la racine passe chez tous les Physiciens pour l’estomac de la plante, où les sucs terrestres se digerent & se subtilisent au point de pouvoir ensuite se lever jusqu’aux extrémités des branches. Cette différence des sucs suppose de plus grands pores dans la racine que dans la tige & dans les branches, en un mot une différente contexture ; & cette différence de tissu doit se trouver, les proportions gardées, jusque dans la petite plante invisible que la graine renferme. Il faut donc imaginer dans cette petite plante, comme un point de partage, tel que tout ce qui sera d’un côté, c’est-à-dire, si l’on veut, la racine, se développera par des sucs plus grossiers qui y pénetreront, & tout ce qui sera de l’autre par des sucs plus subtils.

Que la petite plante, lorsqu’elle commence à se développer, soit entierement renversée dans la graine, de sorte qu’elle ait sa racine en haut & sa tige en bas ; les sucs qui entreront dans la racine ne laisseront pas d’être toujours les plus grossiers, & quand ils l’auront développée, & en auront élargi les pores, au point qu’il y entrera des sucs terrestres d’une certaine pesanteur, ces sucs toujours plus pesans appesantissant toujours la racine de plus en plus, la tireront en enbas, & cela d’autant plus facilement, ou avec d’autant plus d’effort, qu’elle s’étendra ou s’alongera davantage, car le point de partage supposé étant connu comme une espece de point fixe de levier, ils agiront par un plus long bras. Dans le même tems les plus volatils qui auront pénétré la tige, tendront aussi à lui donner leur direction de bas en haut, & par la raison du levier ils la lui donneront plus aisément de jour en jour, puisqu’elle s’alongera toujours de plus-en-plus. Ainsi la petite plante tourne sur le point de partage immobile, jusqu’à ce qu’elle se soit entierement redressée.

La plante s’étant ainsi redressée, on voit que la tige doit se lever perpendiculairement pour avoir une assiette plus ferme, & pour pouvoir mieux resister aux efforts du vent & de l’eau.