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geant avec de petites pinces, & on le posera sur le moule, ensorte que le verre ne touche en aucun endroit la figure imprimée, qu’il pourroit gâter par son poids.

On aura un petit fourneau pareil à ceux dont se servent les peintres en émail (Voyez Email), dans lequel il y aura une moufle ; on aura en soin de remplir ce fourneau de charbon de bois, de façon que la moufle en soit environnée dessus, dessous, & par ses côtés. Lorsque le charbon sera bien allumé & la moufle très-rouge, on mettra le moule, garni du morceau de verre sur lequel on veut tirer l’empreinte, sur une plaque de tôle, & on l’approchera ainsi par degrés de l’entrée de la moufle, au fond de laquelle on le portera tout-à-fait lorsqu’on le jugera assez chaud pour que la grande chaleur ne fasse pas casser le morceau de verre ; on bouchera alors l’entrée de la moufle avec un gros charbon rouge, de façon cependant qu’il se trouve un petit intervalle par lequel on puisse observer le verre. Lorsque le verre paroîtra luisant, & que ses angles commenceront à s’émousser, on retirera d’une main avec des pincettes la plaque de tôle ; & avec l’autre main, sur le bord même du fourneau, sans perdre de tems on pressera fortement le verre avec un morceau de fer plat que l’on aura tenu chaud.

L’impression étant finie, on laissera le tout à l’entrée du fourneau, afin que le verre refroidisse par degrés, sans quoi il seroit sujet à casser.

Si l’on veut copier en creux une pierre qui est en relief, ou en relief une pierre qui est en creux ; il faut en prendre une empreinte exacte avec de la cire d’Espagne, ou avec du soufre fondu avec un peu de minium Il faut abattre avec un canif & une lime ce qui aura débordé l’empreinte, & on se servira de cette empreinte de cire d’Espagne ou de soufre pour imprimer sur le tripoli.

Comme par le procedé que l’on vient de donner, on voit que l’on ne peut avoir que des pierres d’une couleur, on va donner celui qu’il faut suivre pour imiter les variétés & les différens accidens que l’on voit dans les camées.

Les agates onix dont on forme les camées, étant composées de couches de différentes couleurs, & n’étant point transparentes, on a pris pour les imiter des morceaux du verre colorié dont on se servoit pour composer les vitres des églises ; on a rendu ces verres opaques en les stratifiant dans un creuset avec de la chaux éteinte à l’air, du plâtre, ou du blanc d’Espagne, c’est à-dire, en mettant alternativement un lit de chaux ou de plâtre, & un lit de verre. En exposant ce creuset au feu augmenté par degrés pendant trois heures, & finissant par un feu assez fort, ces verres deviennent opaques en conservant leurs couleurs ; & ceux qui n’en avoient point deviennent d’un blanc de lait comme l’émail ou la porcelaine.

Si le feu a été bien ménagé dans le commencement, & qu’on ne l’ait point poussé trop sort sur la fin, ces verres opaques sont encore susceptibles d’entrer en fonte à un plus grand feu ; on peut donc souder les uns sur les autres ceux de différentes couleurs, & par ce moyen imiter les lits de différentes couleurs que l’on rencontre dans les agates onix. On rencontre même dans les vitrages peints des anciennes églises, des morceaux de verres dans lesquels la couleur n’a pénétré que la moitié de leur épaisseur ; les pourpres ou couleur de vinaigre sont tous dans ce cas ainsi que plusieurs bleus. Lorsque ces verres sont devenus opaques, ainsi qu’on l’a dit, la partie qui n’a point été pénétrée de la couleur, se trouve blanche & forme avec celle qui étoit coloriée deux lits différens, comme on en voit dans les agates onix : lorsqu’on ne veut point souder ensemble les verres de différentes couleurs, il faut travailler sur ceux-là. Avant que de se servir de ces verres qui ont des couches de différen-

tes couleurs, il faut les faire passer sur la roue du lapidaire,

& manger de la surface blanche qui est destinée à représenter les figures du relief du camée, jusqu’à ce qu’elle soit réduite à une épaisseur plus mince, s’il est possible, qu’une feuille de papier.

On pose ce verre du côté de la surface blanche que l’on a rendue si mince, sur le modele dans lequel est l’empreinte de la gravure qu’on veut imiter ; on le fait chauffer dans la moufle, & on l’imprime de la maniere que l’on a dit ci-devant.

Les verres que l’on a rendus opaques, en suivant le procedé ci-dessus, étant alors susceptibles d’être travaillés au touret, on y applique la pierre dont on vient de parler, & avec les mêmes outils dont on se sert pour la gravure en pierres fines, on enleve aisément tout le blanc du champ qui déborde le relief, & les figures paroissent alors isolées sur un champ d’une couleur différente comme dans les camées.

Si l’on ne vouloit imiter qu’une simple tête, qui ne fût pas trop difficile à chantourner, on pourroit se contenter, après avoir moulé cette tête, de l’imprimer ensuite sur un morceau de verre opaque blanc. On feroit ensuite passer ce verre imprimé sur la roue du lapidaire, & on l’useroit par-derriere avec de l’émeril & de l’eau, jusqu’à ce que toute la partie qui fait un champ à la tête, se trouvât détruite, & qu’il ne restât absolument que le relief. S’il se trouve après cette opération qu’il soit encore demeuré quelque petite partie du champ, on l’enleve avec la lime ou avec la pointe des ciseaux ; on applique cette tête ainsi découpée avec soin sur un morceau de verre opaque d’une couleur différente ; on l’y colle avec de la gomme ; & quand elle y est bien adhérente, on pose le verre du côté de la tête sur un moule garni de tripoli, & on l’y presse comme si on l’y vouloit mouler : mais au lieu de l’en retirer, comme on fait quand on prend une empreinte, on laisse secher le moule toujours couvert de son morceau de verre ; & lorsqu’il est sec, on l’enfourne sous la moufle, & on le presse avec la spatule de fer lorsqu’il est en fusion, ainsi qu’il a été expliqué ci-devant. La gomme qui attachoit la tête sur le fond se brûle ; ainsi les deux morceaux de verre, celui qui forme le relief & celui qui lui doit servir de champ, n’étant plus séparés, s’unissent étroitement en se fondant, sans qu’on puisse craindre que dans cette fonte le relief puisse souffrir la moindre altération, puisque le tripoli, en l’enveloppant de toutes parts, lui sert comme d’une chape, & ne lui permet pas de s’écarter. Si on vouloit que quelques parties du relief, comme les cheveux, fussent d’une couleur différente, il suffit d’y mettre au bout d’un tube de verre un atome d’une dissolution d’argent par l’esprit de nitre, & faire ensuite chauffer la pierre sous la moufle, jusqu’à ce qu’elle soit très-chaude sans rougir. Il faut seulement prendre garde que la vapeur de l’esprit de nitre ne colore le reste de la figure.

Les verres tirés des anciens vitrages peints des églises, sont ce qu’il y a de meilleur pour faire ces especes de camées : il est vrai qu’ils ont besoin d’un très grand feu pour les mettre en fonte quand ils ont été rendus opaques, comme on l’a dit ; mais ils prennent un très-beau poli, & ne sont pas plus susceptibles d’être rayés que les véritables agates.

Pierres précieuses, (Hist. nat. Mineral.) C’est ainsi que l’on nomme des pierres à qui leur dureté, leur transparence, leur éclat, leurs couleurs & leur rareté ont fait attacher un prix considérable dans le commerce ; c’est suivant toutes ces circonstances que l’on a assigné divers rangs aux pierres précieuses.

Les vraies pierres précieuses doivent avoir de la transparence & de la dureté ; c’est sur-tout par cette derniere qualité qu’elles different du crystal. Cette dureté suppose des parties plus denses & plus rapprochées, ce qui doit produire nécessairement un plus