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plus bas, le voisinage des montagnes, des collines & des bois, qui forment certaines chaînes, dont les unes sont propres à repousser les vents humides, tandis que les autres leur donnent passage, & nous en parlerons plus en détail à la fin de cet article.

Nous tirons divers avantages de la pluie. 1°. Elle humecte & ramollit la terre qui se trouve desséchée, & durcie par la chaleur du soleil : la terre ainsi humectée par la pluie devient fertile ; de sorte qu’on peut y semer des graines que l’humidité fait croître, & qui nous fournissent ensuite toutes sortes de plantes, des herbes. 2°. La pluie lave & purge l’air de toutes les ordures qui pourroient être nuisibles à la respiration ; & c’est pour cela que l’air paroît plus léger après la pluie quand on le respire. 3°. La pluie modere la chaleur de l’air près de notre globe, car elle tombe toujours en été d’une région de l’air plus haute & plus froide, & nous remarquons toujours à l’aide du thermometre, que l’air devient plus froid en été proche de la surface de la terre aussi-tôt qu’il a un peu plu. 4°. Enfin la pluie est la principale cause de toutes les sources, des fontaines & des rivieres ; car ce qui vient de la rosée ou des vapeurs, est très peu de chose en comparaison de la pluie. Article de M. Formey, qui l’a tiré de M. Musschenbrock, Essai de Phys. S. 1547.

Sur les phénomenes de la pluie qui ont rapport au barometre. Voyez Barometre & Tems.

Quant à la quantité de pluie qui tombe, en quelle proportion elle tombe à différens lieux en même tems, & au même endroit en différens tems : on le trouve déterminé par des observations & des journaux exacts, dans les mémoires de l’académie royale des Sciences de Paris, dans les Transactions Philosophiques de Londres, &c.

Pour mesurer la quantité de pluie qui tombe chaque année, il en faut prendre la hauteur comme on le voit pratiqué dans les tables suivantes.

Hauteur de l’eau de pluie tombée en un an en différens lieux.
pouces.
A Townley dans le Lancashire, M. Townley a observé, 42 .
A Upmunster dans le comté d’Essex, M. Derham en a observé, 19 .
A Zurich en Suisse, M. Scheuchzer en a observé, 32 .
A Pise en Italie, M. Mich. Ang. Tilli en a observé, 43 .
A Paris, M. de la Hire en a observé, 19.
A Lille en Flandre, M. de Vauban en a observé, 24.
Quantité de la pluie tombée dans un endroit en plusieurs années, mise en proportion avec ce qu’il en est tombé dans un autre.
A Upminster. A Paris.
  pouces cen-
tiemes
  pouces cen-
tiemes
1700 19 3. 21 38.
1701 18 69. 27 78.
1702 20 38. 17 42.
1703 23 99. 18 51.
1704 15 81. 21 20.
1705 16 93. 14 82.
Quantité de la pluie tombée dans un endroit en différentes saisons, mise en proportion avec ce qu’il en est tombé dans un autre.
1708. A Pise. A Upminst. A Zurich. 1708 A Pise. A Upminst. A Zurich.
  pouces cen-
tiemes
pouces cen-
tiemes
pouces cen-
tiemes
  pouces cen-
tiemes
pouces cen-
tiemes
pouces cen-
tiemes
Janv. 6 41. 2 88. 1 64. Juil. 0 00. 1 11. 3 50.
Fevr. 3 28. 0 46. 1 65. Août. 2 27. 2 94. 3 15.
Mars. 2 65. 2 3. 1 51. Sept. 7 21. 1 46. 3 2.
Avril. 1 25. 0 96. 4 69. Oct. 5 33. 0 23. 2 24.
Mai. 3 33. 0 2. 1 91. Nov. 0 13. 0 86. 0 62.
Juin. 4 90. 2 32. 5 91. Déc. 0 00. 11 97. 2 62.
Dans les
6 mois.
28 82. 10 67. 17 31. Dans les
6 mois.
14 94. 8 57. 15 35.

Ajoutons aux pluies naturelles quelques observations sur certaines pluies tout-à-fait singulieres que l’on a vu tomber, & qui doivent leur origine aux exhalaisons qui se mêlent avec la pluie, & tombent de l’air avec elle. Telles sont, par exemple, les pluies de soufre, celles de sang, ou d’une liqueur rouge comme le sang ; celles de fer, de laine, de pierres, de poissons, de grenouilles, de lait, de chair, de terre, &c.

On peut ajouter divers exemples de pluie de soufre à celui que Moïse nous fournit dans la subversion de Sodôme. Spangenberg rapporte qu’il y eut en 1658, une pluie de soufre qui tomba dans le duché de Mansfeld. Nous apprenons d’Olaüs Wormius qu’il vit tomber en 1646, à Copenhague, une grosse pluie qui sentoit le soufre ; & qu’après que l’eau se fût écoulée, on pouvoit ramasser ce soufre en divers endroits. M. Siegesbeck fait mention dans les mémoires de Breslau, Octobre 1721, d’une pluie de soufre tombée à Brunswick, & qui étoit un vrai soufre miné-

ral. Quelques chimistes nient la possibilité du fait,

alléguant pour raison que le soufre a besoin d’une grande quantité de feu, avant que de devenir volatil. Scheuchzer, parlant d’une poudre jaune combustible, qui tomba à Zurich en 1677, soupçonne que ce n’étoit autre chose que la poussiere des fleurs des jeunes pins, que le vent avoit enlevé des arbres d’une forêt voisine. M. Formey.

A l’égard des pluies de sang, on auroit tort d’adopter tous les récits des poëtes, & même des historiens, sur de pareils phénomènes ; mais il y a pourtant des faits de cette nature bien avérés. Du tems de M. de Peirese il tomba en France une pluie rouge, qui jetta une si grande épouvante parmi les paysans, qu’ils abandonnerent les champs pour se sauver dans leurs maisons. Peirese, qui se trouvoit alors à la campagne, rechercha avec soin la cause de ce phénoméne. Il trouva que les gouttes de pluie étoient effectivement de couleur rouge ; mais qu’elles se trouvoient remplies de certains petits insectes rouges, qui vo-