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fant, & enfieller celles qui lui sont nuisibles ».

Les Romains choisissoient ordinairement entre leurs esclaves celui qui étoit le plus capable d’instruire un jeune enfant. Long-tems l’éducation a été chez eux très-soignée ; mais la mauvaise éducation suivit de près le luxe. Les études furent négligées & altérées, parce qu’elles ne conduisoient plus aux premiers postes de l’état. On vouloit qu’un précepteur coûtât moins qu’un esclave. On sait à ce sujet le beau mot d’un philosophe ; comme il demandoit mille drachmes pour instruire un jeune homme : c’est trop, répondit le pere, il n’en coûte pas plus pour acheter un esclave. Hé bien, à ce prix vous en aurez deux, reprit le philosophe, votre fils & l’esclave que vous acheterez.

On raconte que Diogene étant exposé en vente dans l’île de Crete, pria celui qui le publioit de déclarer qu’il étoit esclave, & qu’il savoit fort bien enseigner les jeunes gens. Ce fut cette publication qui engagea Céniades de l’acheter. On appelloit les précepteurs gardiens, custodes. Horace dit dans sa poétique,

Imberbis juvenis tandem custode remoto.

On est trop heureux de trouver un précepteur ami des muses & de la vertu, qui veuille se charger de l’éducation d’un enfant, & prendre les sentimens d’un pere tendre : rien n’est plus rare qu’un maître de cette sorte. Il y a sans doute encore dans le monde des hommes qui seroient d’excellens précepteurs ; mais comme ils sont sensés, & qu’ils connoissent tout le prix de leur liberté, ils ne peuvent se résoudre à la sacrifier qu’on ne leur donne des dédommagemens capables de les tenter ; c’est-à-dire un peu de fortune & beaucoup de considération. Souvent ils ne trouvent ni l’un ni l’autre : on attache un assez grand mépris à leur profession ; ce mépris est-il bien fondé ? Quoi ! parce que l’enfance est un état de foiblesse, le soin de la perfectionner sera-t-il un emploi bas & honteux ? Que la scene couvre leur maintien de ridicule, il n’est pas moins certain que la plûpart des républiques n’auroient pas eu besoin de faire tant de lois pour réformer les hommes, si elles avoient pris la précaution de former les mœurs des enfans. (D. J.)

PRÉCEPTION, (Hist. de France.) les préceptions étoient des ordres, des lettres que le roi envoyoit aux juges, pour faire, ou souffrir certaines choses contre la loi. Ces préceptions étoient à-peu-près comme les rescrits des empereurs romains ; soit que les rois francs eussent pris d’eux cet usage, soit qu’ils l’eussent tire du fond même de leur naturel.

On voit dans Grégoire de Tours, que les rois francs commettoient des meurtres de sang froid, & faisoient mourir des accusés qui n’avoient pas seulement été entendus ; ils donnoient des préceptions pour faire des mariages illicites ; ils en donnoient pour transporter des successions ; ils en donnoient pour ôter le droit des parens ; ils en donnoient pour épouser les religieuses. Ils ne faisoient point, à la vérité, des lois de leur seul mouvement ; mais ils suspendoient la pratique de celles qui étoient faites.

L’édit de Clotaire II. qui regna seul en 613, & fit fleurir la justice, fut un édit heureux qui redressa tous les griefs. Personne ne put plus être condamné sans être entendu : les parens dûrent toujours succéder, selon l’ordre établi par la loi ; toutes préceptions pour épouser des filles, des veuves ou des religieuses, furent nulles ; & on punit séverement ceux qui les obtinrent, & en firent usage.

Nous saurions peut-être plus exactement ce qu’il slatuoit sur ces préceptions, si l’article 13 de ce decret & les deux suivans, n’avoient péri par le tems. Nous n’avons que les premiers mots du 13. art. qui ordonne que les préceptions seront observées, ce qui ne peut pas s’entendre de celles qu’il venoit d’abolir par la même loi. Nous avons une autre constitution

du même prince, qui se rapporte à son édit, & corrige de même de point en point tous les abus des préceptions. Esprit des lois. (D. J.)

PRÉCEPTORIALE, Prébende, (Jurisprudence.) Voyez ci-devant au mot Prébende, l’article Prébende préceptoriale.

Préceptoriales, lettres, (Jurisprud.) Voyez au mot, l’article Lettres Préceptoriales. (A)

PRÉCESSION des équinoxes, ou simplement Précession, s. f. est un terme dont on se sert dans l’Astronomie pour exprimer le mouvement insensible, en vertu duquel les équinoxes changent de place continuellement, & se transportent d’orient en occident, c’est-à-dire, comme disent les Astronomes, in antecedentia, ou contre l’ordre des signes. Voyez Équinoxes.

Il est prouvé par les observations astronomiques, que les poles, les solstices, les équinoxes, ont un mouvement retrograde, & vont continuellement d’orient en occident : par ce mouvement les points de l’écliptique reculent continuellement contre l’ordre des signes, de la quantité d’environ 50 secondes par an ; & ce mouvement retrograde est appellé précession ou rétrocession des équinoxes.

Or, comme les étoiles fixes sont immobiles, & que les points des équinoxes sont retrogrades, il s’ensuit que les étoiles doivent toujours paroître de plus en plus à l’orient par rapport à ces points, & qu’ainsi les longitudes des étoiles, qui se comptent depuis le premier degré d’aries, c’est-à-dire, depuis le point de l’équinoxe de printems, doivent croître continuellement. Voyez Longitude & Étoile.

C’est pour cette raison qu’aucune constellation n’est aujourd’hui au même endroit où les anciens astronomes l’avoient placée : du tems d’Hypparque les points équinoctiaux étoient aux premieres étoiles d’aries & de libra ; mais ces points en sont à présent fort éloignés ; & les étoiles qui étoient alors en conjonction avec le soleil au tems de l’équinoxe, en sont aujourd’hui distantes vers l’orient d’un signe entier, c’est-à-dire, de 30 degrés ; ainsi la premiere étoile d’aries est à présent dans la portion de l’écliptique appellée taurus : la premiere étoile de taurus est dans les gémeaux ; & les gémeaux sont en cancer. Voyez Signe & Constellation.

Les équinoxes qui retrogradent continuellement vers l’occident, reviendront enfin au premier point d’aries après plusieurs années ; & toutes les constellations reprendront alors leur premiere situation par rapport aux points des équinoxes ; la durée de cette révolution est de 25816 ans, selon Tycho ; de 25920, selon Riccioli, & de 24800, selon M. Cassini.

Les anciens, & même quelques modernes, ont cru faussement que les points des équinoxes étoient immobiles ; & ont attribué le changement de place des étoiles par rapport aux équinoxes, à un mouvement réel dans l’orbe des fixes, qu’ils supposoient tourner fort lentement sur les poles de l’écliptique ; selon ces Astronomes, les étoiles font leurs révolutions autour de ces poles en 25920 ans ; après quoi elles doivent revenir à leur premiere place.

Les anciens appelloient cette période l’année platonique, ou la grande année. & ils croyoient (mais sans aucun fondement) que quand cette période seroit finie, toutes choses recommenceroient dans leur premier état, & reviendroient dans le même ordre où elles étoient arrivées. Voyez An.

La précession des équinoxes fait que le tems qui s’écoule depuis un équinoxe de printems ou d’automne jusqu’à l’équinoxe suivant de printems ou d’automne est un peu plus court que le tems que la terre met à faire sa révolution dans son orbite. Voyez An.

Selon M. Newton, la cause physique de la préces-