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Dans le même tems, on en créa six pour la Bretagne.

Enfin on en créa dans tous les parlemens, il en fut même établi quelques-uns dans des villes où il n’y avoit point de bailliage ou sénéchaussée royale.

Mais, par l’ordonnance de Moulins de 1566, on supprima tous ceux qui étoient établis dans les sieges particuliers des bailliages & sénéchaussées, & il fut reglé qu’il n’y auroit qu’un siege présidial dans le principal siege & ville capitale de chaque bailliage & sénéchaussée, de maniere que les juges du présidial ne font qu’une même compagnie avec les juges des bailliages & sénéchaussées où ils sont établis ; ils jugent à l’ordinaire les causes qui excedent les deux chefs de l’édit des présidiaux, & en dernier ressort ou présidialement celles qui sont au premier ou au second chef de l’édit.

Il fut aussi défendu par l’ordonnance de Moulins aux juges des présidiaux de tenir deux séances différentes, une pour les causes au premier chef de l’édit, l’autre pour les causes au second chef.

Cette même ordonnance porte qu’ils connoîtront par concurrence & prévention des cas attribués aux prevôts des maréchaux, vice-baillifs, vice-sénéchaux pour instruire les procès & les juger en dernier ressort au nombre de sept, & de même pour les vagabonds & gens sans aveu ; c’est ce qu’on appelle les cas prevôtaux & présidiaux. On peut voir sur cette matiere l’arrêt de reglement du 10 Décembre 1665 le titre I. de l’ordonnance criminelle, la déclaration du roi du 29 Mai 1702, & celle du 5 Février 1731.

On ne peut se pourvoir contre un jugement présidial au premier chef de l’édit que par requête civile adressée au présidial même, qui a rendu le jugement.

Henri II. par l’édit du mois de Juin 1557, créa dans chaque présidial un office de président, lequel officier a la préséance sur le lieutenant-général à l’audience du présidial. Ces offices de présidens furent supprimés par les ordonnances d’Orléans & de Moulins, mais ils furent rétablis en 1568.

Le nombre des conseillers & autres officiers des présidiaux a été augmenté & diminué par divers édits, qu’il seroit trop long de détailler ici.

Les magistrats de plusieurs présidiaux ont la prérogative de porter la robe rouge les jours de cérémonie ; ce qui dépend des titres & de la possession.

Dans toutes les villes où il y a un siege présidial, & où il ne se trouve point de chancellerie établie près de quelque cour souveraine, il y a une chancellerie présidiale destinée à sceller toutes les lettres de justice nécessaires pour l’expédition des affaires du présidial. Voyez Chancellerie présidiale. Voyez Chenu, Joly, Néron, Guenois, le diction. de Dechasles au mot présidial. (A)

PRESME ou PREMESSE, (Jurispr.) dans la coutume de Bretagne est ce qu’on appelle dans les autres coutumes retrait lignager. Voyez Lignager.

PRÉSOMPTIF, adj. (Jurisprud.) signifie celui qui est présumé avoir une qualité. Ainsi présomptif héritier est celui que l’on regarde comme l’héritier, quoiqu’il n’en ait pas encore pris la qualité, ni fait aucun acte d’héritier. Voyez Héritier & Succession. (A)

PRÉSOMPTION, s. f. (Morale.) Le desir excessif que nous avons de nous faire estimer des autres hommes, fait que nous desirons avec passion d’avoir des qualités estimables, & que nous craignons extrèmement d’avoir des défauts qui nous fassent tort dans l’esprit des hommes. Or, comme on se persuade ce qu’on desire & ce qu’on craint trop fortement, il arrive que nous venons à concevoir une trop bonne opinion de nous-mêmes, ou à tomber dans une ex-

cessive défiance de nous. Le premier de ces deux défauts

s’appelle présomption, le second timidité. Ces deux défauts qui semblent opposés, viennent d’une même source, ou plûtôt ils ne sont qu’un même défaut sous deux formes différentes. La présomption est un orgueil confiant, & la timidité un orgueil qui craint de se trahir. Nous avons du penchant à l’un ou à l’autre, selon la diversité de notre tempérament.

Tout le monde croit qu’un présomptueux s’estime trop ; mais nous croyons pouvoir dire, contre le sentiment de tout le monde, qu’il ne s’estime pas assez, & qu’il manque par un excès de bassesse, & non pas par un excès d’élévation disproportionnée à ce qu’il est. Il ne s’apperçoit point en effet qu’il y a en lui une plus grande excellence que celle qui fait l’attention de sa vanité, & que le mérite de l’homme qui périt est peu de chose comparé au mérite de l’homme immortel.

Il ne faut pas s’étonner néanmoins qu’il aime mieux se considérer par rapport au tems que par rapport à l’éternité, puisque dans la premiere de ces deux vûes il usurpe la gloire de Dieu en s’attribuant tout, & rien à l’Etre suprème ; au lieu que dans la vûe de l’éternité il est obligé de se dépouiller de toute sa gloire pour la rapporter à Dieu. Etrange aveuglement qui ne lui permet pas de reconnoître qu’il n’y a point d’autre bonheur véritable que celui qui se confond avec la gloire de Dieu.

Présomption, (Jurisprud.) est une opinion que l’on a d’un fait dont on n’a pas une preuve certaine, mais qui est fondée sur certaines apparences ; telles sont les conséquences que l’on tire d’un fait connu, pour servir à découvrir la vérité d’un fait dont on cherche la preuve.

Par exemple, en matiere civile s’il y a contestation entre le possesseur d’un fonds & un autre qui s’en prétende le maître, c’est une présomption que ce fonds est au possesseur.

De même en matiere criminelle si un homme a été tué sans que l’on sache par qui, on présume que cela peut venir de celui qui l’avoit menacé peu de tems auparavant.

On distingue les présomptions en legeres ou téméraires, probables & violentes.

Les présomptions legeres ou téméraires sont de simples soupçons qui n’ont aucun fondement raisonnable : celles-ci ne font pas même semi-preuve.

Les présomptions probables sont celles qui ont pour fondement quelque raison légitime, mais qui n’est pourtant pas concluante. Ces sortes de présomptions jointes à une autre semi-preuve, forment une preuve complette.

Les présomptions fortes ou même violentes, sont celles qui ont quelque cause antécédente, comme si un mari au retour d’une longue absence trouve sa femme enceinte, la présomption est qu’elle a commis adultere. Il y a des présomptions de cette espece qui sont si fortes, qu’elles tiennent seules lieu de preuve. Ainsi dans le jugemens de Salomon, la tendresse que la véritable mere fit éclater pour son enfant, fut regardée comme une preuve suffisante.

On distingue aussi les présomptions en négatives ou confirmatives, selon la nature des faits.

Il y en a qu’on appelle præsomptiones juris, & d’autres juris & de jure. Les premieres sont celles qui ont l’équité pour principe ; les secondes sont celles qui ont pour fondement quelque texte précis du droit.

Les présomptions se tirent de différentes sources : les unes sont puisées dans la nature des choses, d’autres tirées de la qualité des personnes, de leur bonne ou mauvaise renommée, & des différentes circonstances & indices qui se trouvent.