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la matiere du crime, savoir, du vol sur les grands chemins, sans que les rues des villes & fauxbourgs soient à cet égard réputées grands chemins. Ils connoissent de même des vols faits avec effraction, lorsqu’ils sont accompagnés de port d’armes ou violence publique, ou lorsque l’effraction se trouve avoir été faite dans les murs de clôture ou toîts des maisons, portes & fenêtres extérieures, quand même il n’y auroit eu ni port d’armes, ni violence publique ; des sacrileges accompagnés des circonstances marquées ci-dessus à l’égard du vol avec effraction ; des séditions, émotions populaires, attroupemens & assemblées illicites avec port d’armes ; des levées de gens de guerre sans commission du roi ; & de la fabrication ou exposition de fausse monnoie. Il n’y a point d’autres crimes qui par leur nature soient réputés cas prevôtaux.

Les prevôts des maréchaux ne peuvent connoître des crimes mentionnés dans l’article précédent, lorsqu’ils ont été commis dans la ville & fauxbourgs de leur résidence.

Les présidiaux ont la concurrence avec eux, excepté pour ce qui concerne les déserteurs, subornateurs, & fauteurs d’iceux.

En cas de concurrence, les présidiaux & même les baillis & sénéchaux ont la préférence, s’ils ont informé ou decreté avant eux ou le même jour. La même chose a lieu pour tous les autres juges royaux ou seigneuriaux quant aux crimes qui ne sont pas prevôtaux de leur nature.

Les ecclésiastiques ne sont sujets en aucun cas à la jurisdiction des prevôts des maréchaux.

Les gentils-hommes jouissent du même privilege, à-moins qu’ils ne s’en fussent rendus indignes par quelque condamnation à peine corporelle, bannissement & amende honorable.

Les secrétaires du roi & officiers de judicature dont les procès criminels sont portés à la grand’chambre du parlement, ne sont pas non plus justiciables des prevôts des maréchaux.

Il suffit que l’un des accusés ne soit pas leur justiciable, pour qu’ils doivent s’abstenir de connoître de l’affaire, quand même la compétence auroit été jugée en leur faveur.

Ils peuvent néanmoins informer & decreter contre ceux qui ne sont pas leurs justiciables, à la charge de renvoyer le procès aux juges qui en doivent connoître.

Lorsque les cas prevôtaux ont été commis dans une ville où il y a parlement, ou dans les fauxbourgs, les prevôts des maréchaux n’en peuvent connoître, quand même ils ne résideroient pas dans ce lieu, à-moins qu’il ne fût question de cas prevôtaux par leur nature.

La compétence des prevôts des maréchaux doit être jugée au présidial le plus prochain.

Quand le jugement de compétence est en leur faveur, ils doivent ensuite juger le procès au siege royal le plus prochain, quand même ce ne seroit pas un présidial.

Les jugemens rendus par les prevôts des maréchaux sont toujours en dernier ressort.

Outre les cas dans lesquels ils ont jurisdiction, ils doivent arrêter tous criminels pris en flagrant délit, ou à la clameur publique.

Ils sont aussi obligés de prêter main-forte à l’exécution des jugemens.

Les captures qu’ils font hors les cas qui sont de leur compétence, ne leur attribuent aucune jurisdiction. Voyez Chenu, Joly, Guenois, Néron, le traité de la police, & les articles Maréchaux de France, Maréchaussée. (A)

Prevôt, (Cour des Monnoies.) Les prevôts sont une espece d’officiers subalternes dans les monnoies

de France. Il y en a de deux sortes : les prevôts des ouvriers & tailleresses, & ceux des monnoyers. Ils sont à vie, & se font par élection.

C’est au prevôt des ouvriers de se charger des lames d’or, d’argent & de cuivre, pour les leur distribuer, afin qu’ils les taillent au coupoir, & qu’ils leur donnent les autres façons qui les rendent flaons, c’est-à-dire, propres à recevoir la marque qui leur fait avoir cours dans le public. Le prevôt des monnoyers en fait autant des flaons ; & c’est de sa main qu’ils les reçoivent pour les frapper au balancier. L’un & l’autre répond des lames ou des flaons, tant qu’ils restent entre leurs mains. (D. J.)

Prevôt de Paris, est un magistrat d’épée qui est le chef du châtelet, ou prevôté & vicomté de Paris, justice royale ordinaire de la capitale du royaume.

L’établissement de cet office remonte jusqu’à Hugues Capet ; la ville de Paris & tout le territoire qui en dépend, étoient alors gouvernés par des comtes qui réunissoient en leur personne le gouvernement politique & militaire, l’administration de la justice & celle des finances. Ils rendoient la justice en personne dans Paris, & avoient sous eux un vicomte qui n’étoit pas juge de toute la ville, mais seulement d’une petite portion qui formoit le fief de la vicomté & d’un certain territoire au-dehors. Hugues Capet qui étoit d’abord comte de Paris, étant parvenu à la couronne en 987, y réunit le comté de Paris qu’il tenoit en fief ; & l’office de vicomte ayant été supprimé vers l’an 1032, le prevôt de Paris fut institué pour faire toutes les fonctions du comte & du vicomte : c’est pourquoi le titre de vicomté est toujours demeuré joint avec celui de prevôté de Paris.

Le prevôt de Paris fut donc institué non pas seulement pour rendre la justice, il étoit aussi chargé comme les comtes du gouvernement politique & des finances dans toute l’étendue de la ville, prevôté & vicomté de Paris.

On ne doit pas le confondre avec les autres prevôts royaux, qui sont subordonnés aux baillis sénéchaux. Il n’a jamais été subordonné à aucun bailli ou sénéchal, ni même au bailli de Paris, tandis qu’il y en a eu un. Il précede même tous les baillis & sénéchaux, & a plusieurs prérogatives qui lui sont particulieres.

Jean le Cocq dit que le prevôt de Paris est le premier dans la ville après le prince & messieurs du parlement qui représentent le prince, qu’il précede tous les baillis & sénéchaux ; & l’auteur du grand coutumier dit qu’il représente la personne du roi au fait de la justice.

Aussi voit-on que cette place a toujours été possédée par des personnes de distinction, & même par les plus grands seigneurs du royaume.

Le premier qui soit connu se nommoit Etienne. Il souscrivit en 1060 & 1067 deux chartes de fondation de saint Martin, faites par Henri I. & Philippe I. suivant l’usage où étoient alors nos rois de faire souscrire leurs chartes par leurs principaux officiers. Il y est qualifié Stephanus, præpositus parisiensis.

Philippe-Auguste établit en 1192 pour prevôt de Paris Anselme de Garlande, fils de Guillaume qui étoit dapifer, ou grand-maître de la maison de Louis le Gros, & d’une maison des plus distinguées qu’il y eût alors.

On voit dans plusieurs chartes que nos rois, en parlant du prevôt de Paris, l’appelloient par excellence notre prevôt, ensorte qu’il étoit le prevôt du roi ; c’est ainsi qu’il est qualifié dans une charte de Louis le Gros en 1126, qui le commit pour rendre en son nom à l’évêque de Paris certains droits, comme cela se pratiquoit alors.

En 1134, le même roi Louis le Gros donna aux bourgeois de Paris le privilege de pouvoir faire arrêter leurs débiteurs forains, & attribua la connoissance