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très-souvent dans les yeux du même homme après la mort ; c’est ce que l’on voit aussi dans les animaux à quatre piés, les oiseaux & les poissons.

Il avoit encore promis de dire quelque chose de l’excentricité naturelle de la prunelle au centre de l’iris dont parle Galien sous le titre de mutatio pupillæ de loco ; & de l’accidentelle, dont parle Arnaud de Villeneuve ; mais M. Petit n’a point exécuté ces deux promesses. (D. J.)

PRUNELLIER, s. m. (Jardinage.) arbrisseau épineux qui est l’espece sauvage du genre des pruniers. On lui donne le nom d’épine noire. Il vient communément dans les bois, dans les haies, & dans tous les lieux incultes ; il s’éleve à six ou huit piés. Son écorce est noire. Ses fleurs, qui sont blanches, précedent celles des autres pruniers. Ses fruits, que l’on nomme prunelles, sont ronds, petits, & couverts d’une fleur bleuâtre ; mais ils sont si âpres & si stiptiques, qu’il n’est guere possible de les manger cruds. Cet arbrisseau, qui est extremement commun, qui croît très-promptement, qui se multiplie plus qu’on ne veut, & qui réussit dans les plus mauvais terreins, seroit tout-à-fait convenable pour former des haies de défense, s’il n’avoit le plus grand défaut ; il trace en pullulant sur ses racines, & envahit peu-à-peu le terrein circonvoisin : ce qui fait qu’on le redoute, qu’on cherche au contraire à s’en débarrasser, & qu’on ne l’emploie tout au plus qu’à former des haies seches, où il est plus durable que l’aubépin. La Pharmacie tire quelques secours de ce vil arbrisseau ; le suc de son fruit exprimé & épaissi en consistance d’extrait, est ce que l’on appelle l’acacia nostras, que l’on substitue quelquefois au vrai acacia. On tire des prunelles encore vertes un vinaigre très-fort, par la distillation au bain-marie. Les prunelles vertes pilées dans un mortier, sont une ressource immanquable pour rétablir le vin tourné. On peut aussi les manger comme les olives, après les avoir fait passer par la saumûre ; & en les faisant fermenter après qu’elles ont été séchées au four lorsqu’elles sont mûres, on en tire une boisson qu’on prétend être agréable. Tant il est vrai qu’on peut tirer du service des productions de la nature qui paroissent les plus abjectes.

PRUNIER, s. m. prunus, (Hist. nat. Bot.) genre de plante à fleur en rose, composée de plusieurs pétales disposés en rond. Le pistil sort du calice, & devient dans la suite un fruit ovoïde ou rond, charnu & mou, qui renferme un noyau ordinairement pointu par les deux bouts ; ce noyau contient une amande. Tournefort, Inst. rei herb. Voyez Plante.

Prunier, prunus, (Jardinage.) arbre de moyenne grandeur, qui se trouve dans les pays tempérés de l’Europe, de l’Asie & de l’Amérique septentrionale. Sa tige est courte & rarement droite ; la tête en est assez considérable pour la stature de l’arbre, mais irrégulierement disposée. Son écorce est inégale par les gersures qui s’y font de bonne heure. Ses feuilles sont dentelées, presque ovales & d’une verdure desagréable, parce qu’elles sont souvent gâtées par les intempéries du printems, & sur-tout par les insectes. Ses fleurs qui sont blanches & disposées en rose, paroissent au mois d’Avril. Les prunes qui succedent different pour la grosseur, la forme, la couleur & le goût, selon les diverses especes de prunier qui les produisent. Ces fruits renferment un noyau qui contient une amande amere.

Le prunier est le plus commun des arbres fruitiers à noyau. Son fruit n’est pas plus de garde que celui des autres arbres à noyau ; il faut le manger dans le tems de sa maturité, à moins qu’on ne le fasse cuire ou sécher. Le prunier ne prospere qu’autant qu’il est dans une terre cultivée ; il languit dans un sol inculte, & dépérit bientôt. Il vient à toutes les expositions,

il se plaît dans une terre plus séche qu’humide, plûtôt sablonneuse que forte, mais particulierement dans le sable noir. Cependant on peut dire qu’il ne craint pas l’humidité, pourvu qu’elle ne soit pas permanente. En général il s’accommode assez bien de toutes sortes de terreins, pourvu qu’ils soient en culture, parce que ses racines tracent entre deux terres. Mais il craint la glaise ; il n’y fait nuls progrès, & son fruit n’y vaut rien. Quant aux terreins absolument secs & légers, sablonneux & trop superficiels, le prunier ne s’y soutient que foiblement & n’y donne que des fruits maigres, verreux & mal conditionnés, dont la plûpart tombent avant leur maturité. Dans la glaise au contraire & dans les terres grasses & sortes, ils ne sont pas si sujets à tomber, ni à être verreux : mais ils pechent par le goût.

On peut multiplier le prunier de semence & par la greffe. On ne se sert du premier moyen que pour avoir des sujets propres à greffer. Il n’y a que quelques especes de prunes d’une qualité médiocre dont les noyaux produisent la même sorte de fruit ; mais les noyaux du plus grand nombre d’especes ne donnent que des plants bâtards & dégénérés ; & c’est un hasard quand il s’en trouve quelques-uns de bonne qualité. Il est donc d’usage de greffer le prunier, pour avoir sûrement l’espece de prune que l’on desire, avec d’autant plus de raison que la greffe donne encore de la perfection au fruit. Les meilleurs sujets pour greffer le prunier sont la cerisette & le saint-Julien. On se sert de la greffe en fente ou en écusson, mais la premiere réussit mieux, & fait des progrès plus rapides. Les sujets qu’on vient de désigner conviennent pour toutes sortes de terreins, à moins qu’ils ne soient trop secs, trop légers, ou trop sablonneux. Dans ce cas, il faut y mettre des pruniers greffés sur l’amandier, qui n’a pas l’inconvénient de pousser des rejettons sur ses racines, ce qui est à charge & fort desagréable : mais cette greffe réussit rarement. L’amandier a un défaut, il reprend difficilement, sur-tout lorsqu’il a été transporté de loin. On peut aussi greffer le prunier sur des pêchers & des abricotiers venus de noyau : il est vrai que les arbres qui en viennent étant délicats, demandent quelques ménagemens, & ils ne sont pas de durée. Voyez le mot Pépiniere.

Le prunier peut servir de sujet pour greffer le pêcher, l’abricottier, l’amandier ordinaire qui manque souvent, & l’amandier nain à fleur double, qui y réussit très-aisément. On vient à bout aussi de greffer le mahaleb, l’arbre de sainte-Lucie, le laurier-cerise, &c. sur le prunier ; mais les suites n’en sont pas heureuses : la greffe & le sujet tout périt dans l’hiver qui suit.

Les pruniers que l’on tire de la pépiniere pour les planter à demeure, doivent être greffés de deux ans. Si on ne peut les avoir de cet âge, il vaut mieux les prendre d’un an que de trois ; ces derniers réussissent moins sûrement que les autres. Cet arbre peut paroître dans les jardins sous différentes formes ; d’abord à haute tige, qui est la figure qu’on lui donne communément ; ensuite en espalier, où le plus grand nombre des especes de prunes réussissent mieux qu’à haute tige ; enfin la forme du buisson convient à toutes les especes. La distance qui convient à ces arbres est de douze à quinze piés pour ceux à haute tige en plein air, dix où douze pour ceux en espalier, & quinze à dix-huit aux pruniers que l’on destine à faire le buisson ; attendu qu’ils poussent vigoureusement, & qu’ils s’étendent plus sous cette forme que s’ils étoient à haute tige. C’est sur la qualité du terrein & sur sa profondeur qu’il faut déterminer le plus ou le moins de ces distances.

Le prunier fait de bonnes & fortes racines bien ra-